Clara Soudy Love Dies Last Chapitre 1 : Dans cet enfer

Chapitre 1 : Dans cet enfer

– Kal, tu sais quel est le comble pour un avion ?


– Mm…


Je ne lève même pas les yeux de mon téléphone. Je ne laisse qu’une réponse sourde, à peine un son. À ce moment précis, j’ai juste envie d'être tranquille. Mes yeux, cachés derrière mes mèches sombres, restent fixés sur l'écran. Je suis allongée sur mon lit, l’air ailleurs, loin de ses préoccupations enfantines.


– C’est d’avoir un antivol !! Avoue, elle était drôle celle-là !


Théo. Il est debout près de mon lit, ses yeux pétillant d'excitation, comme s’il avait la meilleure blague du siècle à partager. Il se met à sautiller autour de mon lit, impatient, attendant que je réagisse. Il n’arrête jamais. Avec son pyjama coloré trop grand et ses cheveux décoiffés, il ressemble à un petit fou qui ne peut rester en place. Il triture un coussin nerveusement, espérant au moins un sourire de ma part.


– Mm…


– Kal ! Tu abuses ! Arrête de faire ta face de cul de mouche qui pue !


Mon frère, visiblement frustré, pose ses poings sur ses hanches en signe d’irritation, gonflant légèrement les joues comme il sait si bien le faire. Il me regarde avec son expression exagérément dramatique, comme s’il espérait que son reproche me fasse bouger.


– Mm…


Ça en devient presque drôle. Je détourne enfin les yeux de l'écran. Mon regard tombe sur lui, et c'est là que je le vois. Ce que j'avais toujours voulu ignorer jusque-là : des larmes silencieuses coulent le long de ses joues. Il essaie de les cacher, mais je vois bien qu’il est blessé. Il renifle, puis ses petites épaules se secouent sous le poids de ses émotions. Théo s'arrête dans son agitation, la bouche entrouverte, comme s'il réalisait enfin que quelque chose ne va pas vraiment.


Je le vois pleurer à chaude larme. Ce n’est pas comme si c’était ma faute, en même temps. Il me colle toute la journée et parfois je n’ai juste pas l’énergie de répondre à ses attentes.

Et pourtant, malgré son caractère envahissant, il est étrangement réconfortant. Sa présence est omniprésente dans la maison, il est comme une ombre qui me suit partout, sans que je ne puisse vraiment m’en débarrasser.


Enfin bref, maintenant que le silence est revenu dans ma chambre – une petite pièce encombrée de vêtements éparpillés et de vieux posters accrochés aux murs noirs – j’enfile une paire d’écouteurs. La musique commence à résonner dans mes oreilles, couvrant tout le reste. Je monte le volume à fond, cherchant à me couper du monde extérieur, à m’échapper.


Je me tourne vers mon bureau en désordre, où un tas de feuilles froissées s’entassent. Je prends un crayon et commence à dessiner, traçant des lignes sans réfléchir, sans but précis. Mon beau père appellerait ça "gribouiller dans mon vieux tas de feuilles", comme si ce n'était rien d'important.


Celui qui a volé la place de mon père. C’est ma mère qui l’a choisi, alors j’ai dû accepter, c’est elle qui m’a mise au monde, mais dont le rôle de mère semble s’être évaporé le jour de ma naissance.


Elle est toujours absorbée par son travail, l'hôpital prenant toute son énergie. Et ne voie pas l’impact de son nouveau mari sur moi.


Quand j’ouvre pleinement mes yeux, le seul mot qui me vient lorsque je vois mon dessin, c’est la sombre réalité qui approche : la rentrée.


Un calendrier griffonné sur une feuille évoque les jours qui filent trop vite. Cette année, après avoir passé difficilement la Première, j’entame la terminale. Je ne me sens pas du tout prête pour le bac, ni pour rien d'autre, à vrai dire. Je pense aux camarades de classe, aux notes, aux évaluations… et surtout aux regards, aux surnoms, aux humiliations. Rien ne va vraiment changer.


Il me reste exactement 25 jours, soit 600 heures, ou 2 160 000 secondes de vacances, loin de la paix ou de repos avant de rejoindre l'enfer sur Terre. Mon cœur se serre à cette idée, et je m'enfonce un peu plus dans ma chaise, espérant que ces secondes s’étirent encore un peu.


J-20 :

– Ma chérie, je viens de recevoir tes uniformes pour cette année ! m’informe ma mère depuis la cuisine, sa voix forte résonnant dans toute la maison.


Sa voix porte facilement, traversant les murs fins de notre vieille maison aux escaliers qui grincent et aux tapis usés par les années. Dans la cuisine, elle s’affaire probablement à préparer un dîner simple.


– Ok, réponds-je distraitement, les yeux fixés sur mon téléphone.


Je suis dans ma chambre, petite et encombrée, entourée de piles de livres et de vêtements. Un rayon de soleil passe à travers les rideaux à moitié tirés, illuminant un coin de mon bureau où s’entassent des papiers froissés et des stylos.


– Viens les essayer tout de suite ! continue-t-elle, cette fois avec une pointe d’exaspération dans la voix.


– Dans 5 minutes, j'écris là ! lui réponds-je, commençant à m'énerver face à l'insistance de ma mère. Mon ton est plus sec que je ne l’avais prévu, mais l’envie de terminer ce que j’ai commencé est plus forte que le reste.


– Jeune fille ! Maintenant ! Hurle-t-elle pour de bon.


Son cri me fait sursauter, et je peux presque voir son visage se froncer de colère, les sourcils arqués de manière dramatique. Il ne sert à rien de discuter avec elle quand elle en arrive à ce point-là. Résignée, je me lève de ma chaise, traînant des pieds en direction de la porte.

Je descends, non sans râler, en perdant l’équilibre dans les escaliers, que pourtant je côtoie depuis ma plus tendre enfance et qui ne m’empêche pas chaque fois de trébucher. Ces escaliers, raides et en bois, sont comme un ennemi juré.


Chaque marche semble prête à me faire tomber, même si je les connais par cœur. Ma mère, toujours tirée à quatre épingles, porte son éternel tablier fleuri, sa chevelure brune impeccablement relevée en chignon.


Une fois la tenue enfilée, je me regarde dans le grand miroir de l’entrée, une grimace se dessinant instantanément sur mon visage. Deux choses frappent mon regard fatigué : ils ont changé le logo hideux en quelque chose de potable, un détail qui me surprend agréablement. Ensuite, je remarque que la jupe plissée a été raccourcie, et les chaussettes blanches allongées, elles me montent maintenant jusqu’au-dessus des genoux. On se croirait dans une putain de

Drama coréen.


Je me tourne pour examiner l’uniforme sous tous les angles, toujours cette même grimace accrochée à mes lèvres. Les plis parfaits de la jupe et les chaussettes hautes donnent une allure trop « mignonne » à mon goût. Je ne sais pas si je dois en rire ou pleurer.

Derrière moi, j’entends ma mère marmonner quelque chose, probablement satisfaite du résultat. Elle adore ces moments où tout doit être conforme, impeccable, comme dans ses magazines de mode. Moi, j’ai juste l’impression d’être un personnage sorti d’un manga.

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2 commentaires

Karla VALON

-

Il y a 2 mois

A jour de ton histoire ! N'hésite pas à aller voir la mienne 😉

Clara Soudy

-

Il y a 2 mois

Je vais jeter un coup d'œil ;-)
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