Gabriele VICTOIRE LILITH__La face cachée de la Lune **LILITH__IV (1/2)**

**LILITH__IV (1/2)**

Une fine langue rosée, pointue et fourchue, dansait, accaparant la totalité de mon champ de vision. Plus je battais des paupières, plus la belle s'agitait. Elle s'immobilisa enfin. Son extrémité froide glaçait mon nez.

Tssss... Pour qui te prends-tu pour t'endormir ainssssi dans mon nid ? Pour écraser mes bébés ? Tsss... Ssssi un sssseul d'entre eux a péri, tu connaîtras le même ssssort ! Tsss...

Sa menace télépathique acheva de m'amener à la vie. Ses bébés ? Lesquels ? L'arrière de mon corps répondit à ma question. Ça grouillait contre moi. Ça rampait. Ça faisait chuter ma température. La langue dansante quitta mon visage et disparut. Mon cerveau analysa ces données à la vitesse de la lumière, quelle perfection cette création ! Mère n'avait pas lésiné sur les détails.

Ma raison m'alertait, me pressait. Mais de quoi ? Je ne saisissais pas le sens de cette prévenance. "Fais confiance à ton corps, Lilith !" Je m'exécutai aussitôt ! Mes jambes se replièrent et me hissèrent en positon verticale. Mes bras agrippèrent une branche au-dessus de ma tête et je finis par m'extirper, bancale, de...d'une fosse ?! Observant ma piste d’atterrissage, je manquai de suffoquer. Un matelas de bébés reptiles avait amorti ma chute. Mon rythme cardiaque affolé accéléra ma respiration. Pourvu que je n'en aie blessé aucun !

Sont-ils indemnes ?

Tsss... Toi, l'humaine, tu te préoccupes de la ssssanté de mes petits ? Tsss...quel piège encore, est-sssse ssssela ?

Langue en avant, crocs rutilants, la bête se redressa de toute sa longueur, en hauteur. Son mouvement ralenti m'hypnotisa. Je relevai la tête au fil de son étirement.

Tsss... Quelle étrange créature es-tu pour ne pas fuir en sssset instant ? Tes ssssemblables auraient déjà quitté cette partie du jardin. Tsss...

Toujours sous son emprise visuelle, mon corps ne répondait pas à mon envie de bouger, de m'éloigner de cet être vivant gigantesque. Il en profita pour s'enrouler autour de moi. Cette fois, l'étau prenait tout son sens. A peine débarquée, déjà en très mauvaise posture ! Mère ? Que suis-je censée faire ? Il resserra son étreinte. j'entendais ma peau crisser sous la torture. Mince ! Une peau neuve, si vite abîmée ! Mère ?

Tsss...tu transssspires la sincérité, femme.

La bête lâcha du lest, jusqu'à retourner auprès de ces enfants.

Tsss...je ne ssssais quel miracle a permis qu'aucun ne ssssouffre. Je te laisssse la vie ssssauve, pour ssssette fois. Ne t'avise plus de t'endormir ici, ou je ne répondrais de rien. Tsss...

Tu es un serpent, n'est-ce pas ?

Tsss...tsss...tsss...

D'accord, les serpents peuvent rire. Noté !

Je cherche quelqu'un.

Tsss...obsssserve autour de toi ! Perssssonne d'autre issssi. Tsss... Tes ssssemblables sssse trouvent de l'autre côté de la rivière, derrière sssses arbres tortueux. Tsss...Tu viens d'où pour ignorer tout de sssse jardin ? Tsss... Qu'importe ! La nuit tombe, laissssse-nous ! Tsss !

En effet, la lumière du Soleil déclinait dans le ciel bas. Il n'était pas aussi profond et étendu que le ciel galactique, mais il n'en était pas moins beau. Plus palpable sans doute. Mes yeux se posèrent tour à tour sur des plantes majestueuses, des arbres immenses, des buissons aux fleurs multicolores. Chaque élément de vie de cette nature luxuriante ravissait mes sens. Les odeurs me chatouillaient parfois, m’embaumaient d'autre fois. Une jeune mousse massait chaque centimètre carré de mes voûtes plantaires, un vrai bonheur de sensations matières. Quel régal !

Et puis, je l 'entendis. Une mélodie si harmonieuse qu'elle me fila la chair de poule. Chaque pore de mon corps nu avala cette symphonie pour mieux la goûter. Écartant deux branches touffues qui me barraient la route, je la vis. Splendide, étincelante, pure et magique : une cascade. Chaque goutte d'eau qui suivait son courant avec frénésie émettait une note unique et toutes ensemble formaient ce choeur parfait. Une boule d'énergie gonfla ma poitrine. Je me remplissais de bonheur à l'état pur. La surface de l'eau du bassin, dans lequel se fondait la cascade, m'appela. Le désir d'y plonger me submergea. Connaître la caresse de l'eau sur ma peau me semblait une bonne expérimentation de la matière. Après tout, je venais d'échapper à la mort de justesse, je méritais bien une pause délicieuse. Toutes mes cellules se réjouissaient de ce plan spontané lorsqu'une interpellation télépathique freina mon pas enjoué.

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3 commentaires

Azalyne Margot (miss Ninn)

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Il y a 4 ans

très beau chapitre! le jardin d'Eden???
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