Mouna Les méduses ne vivent pas éternellement Chapitre 15 : Dorian Crowe 1/2

Chapitre 15 : Dorian Crowe 1/2

Chapitre 15 : Dorian Crowe


— J’aurai pu t’aider.

— Non. Tu comprends pas, Mélissa. C’était elle ma mère, la seule qui m’a aimé.

— C’est toi qui te méprends parce que moi je t’ai aimé. Mais ça n’a pas été suffisant pour toi.

Elle me regarde un mélange troublant de colère destructrice et de pitié, un truc que je n’ai pas envie de discerner dans son regard.

— Et toi tu aurai pu être là pour moi aussi. J’ai dû tout gérer toute seule. On m’a…

— Je ne pouvais pas t’aider si moi même j’avais besoin d’aide. Surtout en étant un adolecent immature qui ne connaissait encore rien à la vie. Mais je t’aime… t’aimais. J’ai lâchement fui je te l’accorde mais…

— Oui tu es lâche ça je n’en ai aucun doute. Tu…

Elle ravale des sanglots et continue de me poignarder avec ses mots qui raisonnent comme des accusations. Accusations valables mais qui font tout de même très mal. Son indexe pointé dans ma direction.

— Tu m’as abandonné quand j'avais le plus besoin de toi et quelqu’un qui prétend m’aimer, ne m’aurai jamais fais un putain de coup pareil.

Son visage inondé par des larmes finit de m’achever. Mais je ne comprends pas pourquoi elle aurait eu besoin de moi. Je me rends compte que je ne connais rien de sa vie. Je ne sais même pas son obsession pour les enfants. Elle ne m’en avait jamais parlé.

Alors quand elle court aux toilettes, je la suis. L'écriteau indiquant que ce sont des toilettes pour femme ne m’arrête pas. De toute façon, il n'y a personne.

— Sors !

Je n’en ferai rien. Déterminé à tout mettre à plat. A la trouver cette vérité qui semble aimer se cacher, se terrer en elle, la dévorer.

— Il s’est passé autre chose pour que tu me haïsses autant, affirmais-je. Dis moi Oriana !

Sans que je puisse l’en empêcher, elle s’enferme dans une cabine. Je tambourine à la porte, imitant parfaitement mon cœur contre ma poitrine.

— Laisses moi tranquille je t’en supplie…

Je ressens sa souffrance. Non sa détresse et alors moi aussi je craque. Je craque parce que c’en est trop pour moi. Je suis terrifié. Je suis brisé.

Je me laisse glisser contre la porte, essayant de calmer les palpitations. Je vais mourir. Peut être maintenant ? Je suis en train de mourir. Le corps de ma mère me vient à l’esprit. Mon père adoptif me mettant à la porte. Moi laissant Oriana dévastée.

La panique trouve un chemin pour se frayer. Entre pleurs et peur, je ne sais plus où donner de la tête. Perdu comme l’enfant orphelin, l’enfant abandonné, qui cherche désespérément une main à laquelle s’accrocher.

— Je l’ai tué, lâche-t-elle en se mettant dos à moi, seule une fine porte nous séparant.

Alors je ferme ma bouche, écoutant son récit, son vécu, buvant ses paroles empoisonnées et amères.

— Je me mens à moi-même en affirmant que je te hais mais c’est faux… J’essayais de trouver un coupable mais c’est moi la fautive. C’est moi que je hais le plus. Parce que je les ai écouté. Je me suis laissée faire.

La dernière pièce du puzzle en place, ma poitrine se serre si fort que je crois mourir. J’ai déjà fait des crises de panique. Je connais les couleurs et les formes de l’anxiété mais cette fois c’est différent.


***

Oriana


J’entends une chute, des bruits de respiration erratique , un souffle court et paniqué. Mon cœur rate un battement.

— Dorian ?

Aucune réponse. Juste ce son saccadé, entrecoupé de plaintes à peine audibles. Je déglutis, luttant contre mon propre tourbillon intérieur. Puis, lentement, je déverrouille la porte et tente de pousser mais elle est bloquée.

Je frappe doucement contre la porte.

— Dorian… ? Ce n’est pas drôle. Laisses moi sortir.

Toujours rien. Juste ce souffle court, entrecoupé, et ce silence lourd qui suinte l’angoisse. Mon cœur cogne contre ma poitrine.

Je pousse un peu plus fort, mais la porte résiste. Mon esprit s’emballe. Il est derrière, je le sais, mais pourquoi ne répond-il pas ?

— Dorian, ouvre-moi… Ouvre la porte.

Ma voix tremble. L’adrénaline pulse dans mes veines tandis que j’appuie mon épaule contre le battant, forçant un peu plus. Rien.

— Bordel…

Je prends une grande inspiration et frappe plus fort.

— Dorian ! S’il te plaît, ouvre. Dis quelque chose !

Le poids derrière la porte bouge légèrement, un bruit de tissu froissé. Un gémissement étouffé.

Il est là. Il est conscient. Effondré contre le mur des toilettes, le visage livide, les mains tremblantes crispées sur son torse. Ses yeux sont écarquillés, perdus dans un vide qui me fait peur.

Je m’accroupis, le souffle court, la panique prenant le dessus.

— Dorian… regarde-moi.

Ses lèvres tremblent, son regard est perdu Ses doigts s’agrippent à son torse, comme s’il essayait de retenir quelque chose qui lui échappe.

Je tends la main sans aucune hésitation et je la pose sur la sienne.

— Je suis là, Dorian. Tu m’entends ?

Il sursaute à peine sous mon contact, mais son regard ne se lève toujours pas. Sa respiration reste hachée, irrégulière, comme s’il se noyait dans un océan invisible.

— Inspire lentement, fais comme moi…


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