Laurence Chevallier Les amoureux de Montmartre Chapitre 35.2 Kaël

Chapitre 35.2 Kaël

C’est le début de soirée quand je rejoins Axel au Petit Montmartre. Dès qu’il me voit apparaître, il s’élance vers moi.

— Ça va mon pote ?

Non.

— Oui et toi ?

— Parfait, mais faut que je te dise, déclare-t-il avant de jeter un œil sur un coin de terrasse où une jeune femme blonde tape sur un ordinateur portable. Cette fille t’attend depuis des heures.

— C’est qui ?

— Elle m’a dit s’appeler Rebecca.

— Je ne la connais pas.

— Elle a essayé de te joindre sur ton portable sans succès.

— J’ai changé de numéro.

— Ça serait bien de me donner le nouveau. Je t’aurais prévenu aussitôt.

Je prends un morceau de papier sur le comptoir et lui note avant de me diriger vers la femme. Quand son regard se lève sur moi, elle se redresse, un franc sourire fendant son joli visage. Elle doit avoir à peine la trentaine et est habillée en tailleur-pantalon bleu nuit. De longs cheveux blonds et bouclés cascadent sur ses épaules.

— Comme je suis heureuse de vous rencontrer, Kaël. Je suis Rebecca V.

Je la détaille, suspicieux. Ses yeux noirs me scrutent et s’attardent un moment sur mon torse.

— Qui êtes-vous ?

— Puis-je vous commander quelque chose avant de me présenter ?

Je plisse les paupières, n’ayant pas vraiment envie de partager ma solitude dans laquelle je me plais à rester ces derniers temps. Mais j’acquiesce et m’installe tandis qu’Axel m’apporte une bière. J’observe la fille en m’allumant une clope.

— Vous êtes encore plus sublime que sur les photos ! s’exclame-t-elle, enthousiaste.

— Désolé, mais si c’est un plan drague, ce n’est pas…

— Oh, non ! se défend-elle en levant les mains. Pardon si je suis excitée par cette rencontre, enfin, non, c’est pas le mot que j’aurais dû choisir… oups. En fait, je vous cherche depuis trois jours et il me tardait de faire votre connaissance.

— Vous êtes une fan ?

— Depuis peu, ouais, lâche-t-elle en riant. Disons que je suis agent et que j’aimerais vous compter parmi mes modèles.

Mon regard étonné s’ancre au sien.

— Comment ça ?

— Avez-vous allumé votre portable récemment ?

— On me l’a volé.

— Ce qui explique mon impossibilité à vous joindre.

— Vous vouliez me joindre pour quoi ?

— Comme je viens de vous le dire, je souhaite que vous deveniez l’un de mes clients. Je suis bookeuse pour l’agence Nice Style. Vous connaissez peut-être ?

Surpris, je secoue la tête en signe de négation.

— Nous sommes une agence de mannequins et comédiens très réputée à Paris. Il y a quelques jours, j’ai déjeuné avec Rod Rive, le directeur artistique du magazine Citizen Men, pour un repas d’affaires. À la suite des conseils de Vadim, son plus proche collaborateur, il m’a parlé de l’expo de la galerie Prévost et m’a dit que je devrais vous démarcher. Je m’y suis donc rendue et votre profil m’intéresse.

— Vous intéresse pour quoi ? insisté-je. Vous savez que je suis dans le X, non ?

— En effet. Et je crois savoir que le but de cette expo était de vous lancer dans le mannequinat, n’est-ce pas ?

Je n’ose pas lui dire que le but n’était pas vraiment là et la laisse continuer.

— Je vous propose de réaliser un book avec nous. J’ai déjà négocié un contrat pour une grande marque de luxe avec Citizen Men. Je voulais vous en parler plus tôt mais vous êtes vraiment difficile à joindre.

— Vous… vous pouvez répéter ?

— Je vous dis que si vous acceptez de travailler avec Nice Style, vous pourrez prétendre à un contrat dès la semaine prochaine. Quand vous aurez un book, je pourrai répondre aux autres sollicitations.

— D’autres sollicitations ?

— Avez-vous consulté votre compte Instagram depuis deux jours, Kaël ?

Mon air perplexe répond pour moi.

— Une grande chanteuse américaine était en vacances à Paris, la semaine dernière. Elle en a profité pour venir visiter Montmartre et est tombée sur vos clichés dans la galerie Prévost. Elle a posté ses préférés sur son profil en rendant hommage à votre talent magnétique.

— C’est sympa, dis-je, je l’ignorais totalement.

— Comme vous devez ignorer qu’en une journée, vous avez reçu pas moins de quatre-vingt mille abonnés supplémentaires. Que le film Les dessous de la vertu est en train d’exploser un record de ventes. J’imagine que vous ignorez aussi que vos vidéos X sont actuellement les plus regardées en streaming sur les sites de charme.

Je reste hébété par ces révélations. Quoi ?

— Kaël, je crois que vous ne vous doutez pas de votre talent, ce qui est chou. Vous êtes magnétique, sexy, votre réputation dans le X est intouchable. Vous avez toujours milité pour le port du préservatif, ce qui vous cantonne à des productions françaises, puisque dans notre pays, c’est une mesure obligatoire pour être diffusé sur les chaînes du câble. Vos partenaires ne font que des éloges sur vous et vous savez jouer la comédie. Non, mais vraiment, comment ai-je pu passer à côté de vous si longtemps ?

Je me gratte la tête, un peu gêné, ne réalisant toujours pas ce qu’elle vient de m’annoncer. Mes pensées tournicotent et m’incitent à m’emparer de mon portable, à me connecter sur mon profil Instagram et à constater que ce qu’elle vient de me dire est vrai. Bah, merde, alors !


***


J’ai passé le reste de ma journée au Petit Montmartre avec Rebecca et j’ai rendez-vous ce matin chez Nice Style. Je n’arrive pas à croire que tout ceci m’arrive et m’attends à ce que l’on me dise bientôt : « C’était une blague, Kaël ». Mais quand j’entends Rebecca – qui souhaite désormais que je l’appelle Becky –, au téléphone avec Rod Rive pour convenir des modalités du shooting de la semaine prochaine, je comprends que c’est du sérieux. Quand ma bookeuse mentionne le cachet que je vais percevoir pour ces photos, mon cœur tombe dans ma poitrine. Je n’ai plus besoin d’aller en Californie, en particulier si Becky me confirme que je serai pris sur d’autres contrats, comme elle semble le penser. Ce n'est qu’après quelques essais photo qu’elle me dit :

— Tu es très beau, Kaël et ces photos mettent ton corps et ton visage en valeur, mais…

Merde, ça y est, elle se rend compte que je suis naze en mannequin, fallait s’en douter…

— … mais je ne retrouve pas vraiment ce que tu dégageais sur les clichés de la galerie. Il manque… Je sais pas trop, poursuit-elle en examinant les photos sur son ordinateur, il manque quelque chose que je n’arrive pas à définir.

— Il manque Zoé, affirmé-je.

— Zoé ? La photographe ?

— Oui.

Elle penche la tête en examinant encore les images.

— Tu crois qu’elle serait d’accord pour réaliser ton book ?

— Je… je ne sais pas. Vous seriez d’accord pour l’embaucher ?

— Le temps de tes photos, oui. Et si son travail nous plait, elle pourrait faire partie de nos prestataires. Les clichés de la galerie sont sublimes, mais j’ai besoin d’en voir plus.

Je hoche la tête, et lui souris. La perspective de revoir Zoé et de lui annoncer cette nouvelle me transporte. Et surtout, je n’ai plus besoin d’aller en Californie ! C’est rapidement que je dis au revoir à Becky et file en direction de Montmartre.


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61

61 commentaires

Nezumisoma

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Il y a 3 ans

Ah mais oui! Enfin! Goodbye Californie!

bookofthesylph

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Il y a 3 ans

Ohhhh!! Ça sent bon ça!!!!

Caroline VI

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Il y a 3 ans

changement de tempo pour kael..et pour zoé?

Eralya64

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Il y a 3 ans

Cours Forest, cours!!! Et dépêche toi de grimper cette butte qu'on est la suite ;) . Je suis contente qu'une échappatoire se profile pour eux!

Joelya

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Il y a 3 ans

Haaaaa oui !!!! Enfin une bonne nouvelle 😁😁😁 vite la suite !!!!😍😍😍😍

Pau_line_ott

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Il y a 3 ans

C'était finalement pas une pét*sse cette blondinette !

Caroline gayant

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Il y a 3 ans

☺️❤

Gottesmann Pascal

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Il y a 3 ans

Oh la bonne nouvelle, vraiment génial pour Kaël. Et même Zoé va participer à l'aventure. Tellement heureux pour eux deux.

vic.DS

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Il y a 3 ans

Haaaaaaaaaaaa j’adore

Magali DS

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Il y a 3 ans

Je suis contente pour Kael 😃, mais une question demeure qui a envoyé le texto à Zoé??
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