Josyanna Le Tabernacle Trouver Antonio

Trouver Antonio

— Vous dites qu’il a disparu? Pourquoi n’avez-vous pas déclaré sa disparition? hurla Douglas, hors de lui.


La pauvre infirmière tremblait dans son uniforme blanc. Elle tentait d’expliquer les circonstances malgré la fureur que contenait bien mal l’agent fédéral.


— Nos résidents sont libres et autonomes. Ils ont le droit d’aller et venir comme bon leur semble. Les portes ferment à 22 h, mais il y a un gardien de nuit pour les retardataires.


— Il est plus de 23 h!


Molly se dit qu’il était épuisé pour être aussi furieux. Ils avaient passé la journée à analyser les documents concernant le père Antonio, puis analyser les rapports des différents services. L’empreinte trouvée sur le bassin doré ne donnait aucun résultat dans les bases de données. Ils avaient donc travaillé d’arrache-pied pour monter un semblant de dossier sur le prêtre pour avoir recours à un mandat pour fouiller sa chambre. Le juge avait hésité puis l’avait cédé sous condition que tout soit fait dans le respect et l’ordre.


Ils avaient bien peu trouvé : une plainte pour harcèlement réglée à l’amiable, du vandalisme répétitif sur le bâtiment de l’église et étonnamment de nombreux événements publics qu’il avait présidés pour l’ouverture d’un orphelinat, un hôpital pour enfants et de nombreuses associations sportives pour lesquelles il avait levé des fonds pour les plus démunis. Que des documents ayant un lien avec les enfants. Molly sentait que Douglas devenait de plus en plus hargneux et cette petite empreinte l’obsédait. Elle ressentait elle-même un mélange d’angoisse et d’appréhension. Au point qu’elle avait dit tout haut ce qu’ils pensaient.


— Tu crois que le vieux avait un penchant pour... enfin...


— J’espère que non pour lui, lui avait répondu sèchement Douglas.


Mais cette idée s’était aussi infiltrée dans sa tête. Au point où il demanda les dossiers complets des prêtres assassinés pour repasser au travers. Vers 17 heures, ils étaient encore plongés dans la paperasse et les fichiers. Une interne leur apporta des sandwichs et demanda s’ils progressaient. Molly mit un doigt sur sa bouche et Douglas grogna. Deux heures plus tard, il lança à bout de bras le dossier qu’il tenait.


— Whoa! Qu’est-ce qui se passe? demanda Molly, effrayée.


— Il y a que ces dossiers ont été lavés! hurla-t-il.


— Lavé? Tu veux dire épurés?


— Quelqu’un a ôté des documents. Et récemment. J’ai le vague souvenir d’avoir vu un pamphlet similaire à celui trouvé sur la scène de crime à l’église Saint-Christophe dans le dossier de l’un des prêtres assassiné. Il n’y est plus. Bordel!


— Qu’est-ce que ça veut dire? Quelqu’un de l’intérieur est complice? Au FBI? Peut-être que tu t’es trompé? osa-t-elle dire malgré la fureur bouillante qui pourrait s’abattre sur elle.


Il la regarda avec dédain.


— On ne devient pas agent du FBI sans être un observateur extraordinaire. Alors quand je dis que j’ai vu quelque chose, cette chose existe. Enfile ton manteau. On va aller dans chaque église et on le retrouvera. Il se peut très bien qu’il y en ait eu dans les autres églises, mais que personne n’y ait prêté attention.


Si quelqu’un avait nettoyé les dossiers classés au FBI, Molly supposait avec raison que le même ménage aurait été fait dans les classeurs des églises.


— J’en ai marre! dit Douglas en claquant la porte de son véhicule.


Il prit son portable et gueula sur son interlocuteur.


— File-moi l’adresse de la résidence du père Antonio Sardena!


— Douglas, il est tard...


Il leva la main devant le visage de Molly. Frustrée, elle se colla le nez à la fenêtre. La fatigue la gagnait aussi, mais il semblait que vivre était secondaire pour l’agent Douglas.


Il démarra à toute vitesse bien inutilement, car quelques minutes plus tard, il se retrouvait à gueuler encore une fois.


— Agent Douglas, je peux vous parler un moment?


Molly devait prendre les choses en main sinon il allait faire mourir de peur la pauvre femme.


— Ça ne sert à rien de lui crier après. Vous êtes fatigué. Lancez un avis de recherche et demandez une équipe pour s’occuper de sa chambre en spécifiant ce que vous cherchez. Si vous ne dormez pas et moi non plus, nous ne serons plus efficaces et même dangereux, dit-elle en pointant l’infirmière qui pleurait à présent dans les bras d’une autre femme portant le même uniforme.


Douglas grogna, puis s’éloigna en tripotant son téléphone. Molly en profita pour retourner voir l’infirmière.


— Une équipe d’agents du FBI viendra sous peu. Soyez très coopérative. L’agent Douglas a eu une dure journée et nous sommes à la poursuite de quelqu’un de très dangereux.


— Je ne comprends pas, hoqueta la femme, pourquoi il veut voir le père Antonio ? C’est un vieil homme qui n’a plus de force et son esprit s’en va. Il devait être transféré sous peu dans une institution où il aurait eu les soins appropriés.


— Qui s’occupait de lui pour faire cette demande? Je veux dire, il est ici selon sa propre volonté.


L’infirmière hocha la tête.


— Oui, mais il est temps pour lui d’être pris en charge. Il divague et oublie tout. Alzheimer. C’est un homme de l’évêché qui s’occupe de lui. Attendez, j’ai les informations juste ici : il a appelé aujourd’hui. Ah. Il est même venu. Ce doit être avec lui que le père Antonio est parti. Vous devriez voir avec lui.


Molly saisit le papier que lui tendait l’infirmière et rejoignit Douglas qui donnait ses derniers ordres.


— Je ne suis pas certaine que nous allons pouvoir nous coucher avant un certain temps. Quelqu’un est venu prendre le père Antonio. Je suis prête à parier que ce n’est pas l’homme de l’évêché, responsable du vieux padre.

Tu as aimé ce chapitre ?

0 commentaire

Vous êtes hors connexion. Certaines actions sont désactivées.

Cookies

Nous utilisons des cookies d’origine et des cookies tiers. Ces cookies sont destinés à vous offrir une navigation optimisée sur ce site web et de nous donner un aperçu de son utilisation, en vue de l’amélioration des services que nous offrons. En poursuivant votre navigation, nous considérons que vous acceptez l’usage des cookies.