Fyctia
Chapitre XXIII - Maxen
Il y eût un silence. Maxen rageait de l'intérieur. Il n'aimait pas son comportement avec Ellie, et s'en voulait souvent d'être rude avec elle. Elle ne méritait pas cela, mais il détestait qu'elle le voie encore comme un enfant. Plus que tout, Maxen s'était habitué à ne dépendre de personne, et Ellie lui rappelait constamment que son père avait décidé de privilégier son travail à sa vie de famille. Ce n'était pas la faute de la gouvernante, bien sûr, mais Maxen avait parfois du mal à le supporter.
- Qu'est-ce qui se passe, Maxen ?
- Rien du tout, marmonna celui-ci, encore énervé.
- Ne me mens pas. Tu n'es pas allé à une soirée et tu n'as pas ramené à la maison l'affreuse serpillère qui te sert de petite amie. Il a forcément quelque chose que ne va pas.
Le garçon sourit. Ellie le connaissait mieux que bon nombre de ses amis, en partie parce qu'il lui racontait plus de choses qu'à eux.
- Ne parle pas de Vanessa comme ça. C'est méchant pour les serpillères ce que tu dis la.
- Je ne comprends pas pourquoi tu restes avec elle. Tu mériterais tellement mieux, mon chéri.
- Elle baise bien. Y a rien d'autre à comprendre, Ellie.
- Charmant. Tu comptes me dire ce qu'il t'est arrivé, ou est-ce que je peux aller faire une machine et laver les carreaux ?
De nouveau, Maxen ne dit rien. Il aurait aimé tout lui raconter, lui dire tout ce qu'il avait sur le cœur depuis ces deux dernières années, mais il ne pouvait pas. Elle allait le trouver complètement ridicule, et il ne voulait pas subir son jugement. Il s'humecta les lèvres, et repensa à la fille.
- Y a une nouvelle au lycée. Elle s'appelle Eleanor. Elle est étrange.
- Tu lui as parlé ?
- Non. Mais j'arrête pas de penser à elle. Y a quelque chose qui m'intrigue chez elle, mais je ne sais pas quoi.
Ellie ne répondit pas, et Maxen la comprenait. Que pouvait-elle bien dire d'autre ? Lui-même ne savait pas pourquoi il lui avait raconté cela : cela n'avait aucun intérêt. Il souffla, puis alla chercher les pancakes qu'il avait faits. Il se réinstalla et commença à les manger, sans grand appétit pourtant, lui qui avait eut si faim auparavant. L'évocation d'Eleanor lui avait coupé l'envie de manger, sans qu'il ne comprenne pourquoi.
Ellie ne lui posa plus d'autres questions, et recommença à s'activer autour de Maxen, qui pensait toujours à Eleanor. Que lui avait donc fait cette fille pour le perturber ainsi ? Jamais il n'avait connu de tel trouble de sa vie. Il ne se reconnaissait même pas. Habituellement, les jolies filles ne lui faisaient pas cet effet. Il n'aimait personne, pas même Vanessa. Pourquoi l'obsédait-elle à se point ? Il haussa les épaules en pensant que de toute manière, ce trouble partirait d'ici une semaine ou deux, tout au plus. La vie reprendrait son cours normal.
On sonna soudain à la porte. Maxen laissa tomber le pancake qu'il était en train de manger, et alla jeter un coup d'œil à l'œilleton de la porte. Ce qu'il vit lui fit froncer les sourcils, et il retourna en tout hâte dans la cuisine.
- Ellie ?
- Qu'est-ce qui se passe, Maxen ?
- Pourquoi Jules Thompson est-il devant la porte ?
Il y eu un long silence, pendant lequel Ellie, apparemment très occupée à nettoyer l'évier déjà impeccable, s'appliqua à ne pas regarder Maxen dans les yeux, ce dernier sentant sa rage calmée relancée. Il ne bougea pas, et il y eut une autre sonnerie à la porte.
- Alors, tu m'expliques ? s'échauffa le garçon.
- Ces parents ne sont pas là, et ils ont demandé à ton père de l'héberger pendant un mois, finit par avouer Ellie, comme une confession dont elle avait honte.
- Quoi ?! explosa Maxen.
La sonnerie retentit une troisième fois, stridente, ce qui eût pour effet de mettre Maxen encore plus en colère qu'il ne l'était déjà. Il ne supportait pas les contrariétés.
- Mais il a dix-huit ! s'égosilla-t-il, la fureur marbrant son visage. Ce petit con n'est pas capable de se garder tout seul ?!
- Maxen, enfin ! Ne l'appelle pas comme ça !
- Je ne veux pas le voir, t'as compris ?
- Ton père a promis, Maxen. Tu vas devoir t'y faire pour le mois qui va suivre.
- Eh bien je resterai dans ma chambre tout le mois s'il le faut.
- Enfin Maxen, c'est ridicule. Tu le connais depuis que tu es enfant et...
- Je m'en fiche comme de ma première couche. JE NE VEUX PAS LE VOIR.
- Dis-lui au moins bonjour, tenta désespérément Ellie.
- Non.
Rageur, Maxen attrapa ses pancakes et son t-shirt, et lança un regard furieux à la gouvernante, qui l'observait d'un air déconcerté, ne sachant que lui dire. Les veines sur les bras de Maxen avaient commencé à se contracter, signe qu'il était réellement en colère. Il allait sûrement casser une dizaine de bibelots dans sa chambre avant de se calmer.
- Ne lui ouvre qu'une fois que j'aurais quitté le salon, c'est clair ?
- Limpide, répondit-elle, les lèvres pincées, les sourcils froncés.
- Et ne m'appelle pas pour dîner, c'est inutile. Fais en sorte qu'il ne me croise pas, ordonna-t-il, impérieux.
- Maxen...
Il s'éloigna à grands pas de la cuisine, et traversa le salon à grandes foulées. Pour la première fois de sa vie, il maudit les baies vitrées qui donnaient sur le jardin et qui permirent à un jeune homme aux cheveux châtains et à la carrure de footballeur de le dévisager. Il retourna à cet intrus qui entrait chez lui un regard de profonde colère et de pure haine tandis qu'il atteignait le couloir qui donnait sur l'escalier permettant d'accéder à sa chambre. Il entendit Ellie ouvrir la porte du salon, et s'exclamer :
- Bonsoir Jules ! Comment vas-tu ? Ce que tu as grandi ! Viens, je vais te montrer ta chambre...
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