Miss Bly Le moulin des disparues. 3. L'appel.

3. L'appel.

Jonathan était sorti au moment où la sonnerie à l’autre bout du fil retentit. Il tapotait nerveusement le crépis du bâtiment de la main droite.

La tension était palpable, il ne savait pas vraiment comment annoncer ça à la police, mais il n’avait pas réellement d’autres choix. Il se devait de prévenir quelqu’un, sinon il serait complice de cette mort, accidentelle ou non.

L’eau coulait encore de son jogging, créant différentes petites flaques d’eau sur son parcours.

Le jeune homme était très nerveux, faisant des allers-retours, se posant une demi-seconde contre le mur avant de redémarrer un cercle devant la porte d’entrée du bâtiment.

L’attente lui parût infinie avant qu’une voix s’adresse enfin à lui.

En entendant la voix féminine à l’autre bout du fil, il s’immobilisa, retenant son souffle. Différentes formulations lui étaient venues en tête, mais lorsqu’il ouvrit la bouche aucune ne lui revinrent.

- Bonjour, commissariat de… commença une voix lasse.

Jonathan se lança ne prenant même pas le temps d’écouter l’annonce d’accueil.

- J’aimerai signaler une noyade.

Il avait sorti ça de manière abrupte. Presque violente. Des centaines de solutions s’offraient à lui, et il avait choisi la plus brutale.

- On dit Bonjour, en premier lieu. De plus, on n’est pas les pompiers nous. Vous les appelez et après on arrive.

Le ton de la policière avait été sec, presque agressif.

Jonathan crut pendant une fraction de seconde, qu’elle venait déjà de raccrocher. Il observait le téléphone, abasourdi.

- Mais… elle, balbutia-t-il ne sachant plus quoi lui dire.

- Elle est morte ? le coupa-t-elle presque ironique.

Son sarcasme venait, sans qu’elle puisse le savoir, sûrement de viser juste.

Jonathan avala sa salive, encore sous le choc des réactions des personnes à chaque fois qu’il parlait de cette inconnue probablement déjà morte.

- Je ne sais pas. Elle a disparu.

Jonathan aurait aimé être plus sec dans sa manière de lui répondre, mais il n’était pas du genre nerveux. Il détestait hausser le ton pour un rien., et même sous la pression il restait souvent impassible. C’est ce qui avait plu chez lui en premier à ses supérieurs. Être posé quand on est un pompier est une bonne chose. Il était énergique, mais pas violent.

- Disparue ? Elle arrive à vous échapper alors qu’elle se noie ?

Son ton était moqueur. Complètement irrespectueux.

- Allez décuver et prenez une bonne douche ça aide, répliqua-t-elle une nouvelle fois.

Jonathan regarda sa tenue, comme si la policière avait pu voir comment il était vêtu.

Il secoua la tête, pas prêt à lâcher l’affaire. Petit à petit son visage se tendait, la tension montait.

- Attendez, vous ne comprenez pas. Il y avait vraiment quelque chose d’étrange. On aurait dit qu’elle… Elle a disparu sous le moulin et je n’ai pas…

- Quel moulin ? le coupa-t-elle une nouvelle fois.

Son ton venait immédiatement de changer. Jonathan venait de l’intéresser, elle l’écoutait enfin. Il allait répondre quand elle répliqua de nouveau.

- Vous êtes un de ces hommes du parc ? On m’en a parlé mais…

Elle parût réfléchir à ce qu’elle devait dire à Jonathan.

- Je vous passe Vilbert, il vous raisonnera peut-être une bonne fois pour toute.

Jonathan voulut lui répondre, mais la musique d’attente le prévint qu’elle avait déjà passé l’appel.

Il commençait à trembler légèrement. Le vent froid s’insinuant sous ses vêtements mouillés.

Le jeune homme éloigna le combiné de son oreille, laissant son regard se perdre sur les jardins du parc.

L’eau ruisselait silencieusement sous le bâtiment de l’accueil, des dizaines d’années auparavant, utilisée comme une extension du moulin. Ce vieux bâtiment recouvert d’un crépi des années 80 semblait très fatigué. Ses murs épais coupaient largement le vent glacial de l’automne, laissant le jeune homme mouillé légèrement à l’abri de la brise.

Ce dernier avait toujours les yeux rivés sur une partie du parc, fixant le ballet des feuilles tombantes à la surface de l’eau. Certaines grenouilles venaient briser ce silence, sautant d’un caillou à un autre, loupant parfois leur cible et retombant lourdement dans l’eau.

La nature avait l’air sereine, malgré ce qui coulait au fond de la rivière, et cette constatation fit monter la bile chez Jonathan.

Il dut se retenir de vomir quand une voix masculine sortit du combiné.

Au vu du temps qu’il avait attendu, la policière avait dut traverser le commissariat dans sa globalité pour trouver ce fameux inspecteur Vilbert.

Jonathan resta silencieux, distinguant deux voix d’hommes différentes.

- Merci, vous pouvez sortir. Et vous, j’aimerai n’avoir plus rien à redire sur votre comportement.

Jonathan comprit qu’un homme devait subir des remontrances à l’heure actuelle et qu’elles ne lui étaient aucunement adressées.

- Bien monsieur.

La deuxième voix était plus fluette, et moins menaçante.

Jonathan lâcha un sourire malgré lui, se souvenant des conversations avec ses supérieurs.

Cette hiérarchie n’allait vraiment pas lui manquer.

Pour la première fois de la journée, il pensa à sa reconversion d’une toute autre manière. Elle était peut-être en quelque sorte un nouveau départ qu’il devrait prendre avec bonheur…

L’inspecteur Vilbert se racla la gorge. Cela fit réagir immédiatement Jonathan qui se redressa, tel un soldat devant son supérieur.

Il se passa la main dans les cheveux pour se détendre, personne n’était là. Il n’avait pas besoin de se mettre au garde à vous, et il n’avait rien fait de mal tentait de se répéter le jeune homme.

La main de Jonathan se mit à trembler au son de la voix de l’inspecteur qui s’adressait enfin à lui.

- Ecoutez, Mr Wilson… Ce n’est pas possible. Pas chaque année. Je sais que vous êtes tous persuadé de ce que vous avez vu mais j’ai de vraie affaire en cours, commença l’inspecteur Vilbert.

L’inspecteur s’arrêta comme s’il n’y avait plus rien à rajouter. Jonathan hésita un instant, ne sachant pas si c’était bel et bien à lui qu’il venait de s’adresser.

Le vent se leva une nouvelle fois, sifflant violemment entre les branches de feuilles mortes, obligeant Jonathan à se boucher l’autre oreille pour continuer sa conversation.

- Excusez-moi mais… C’est à moi que… demanda-t-il timidement.

Il se frottait le visage, mal à l’aise de devoir déranger un inspecteur dans ce genre de moment.

- Bien sûr que c’est à vous, à qui croyez-vous que je parle comme ça ! s’énerva-t-il.

Jonathan grimaça puis avala sa salive, assez bruyamment pour que quelqu’un en face de lui puisse l’entendre mais pas à travers un téléphone.

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12 commentaires

Madame Split

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Il y a 6 ans

Génial ! Plein de gens là voient et personne ne la trouve. Juste génial !

Sandra MALMERA

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Il y a 6 ans

Le mystère s'épaissit. C'est intriguant et ça nous amène à nous poser des questions, est ce une hallucination ou y a-t-il eu d'autres corps avant celui-ci ? :)

Miss Bly

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Il y a 6 ans

Merci !!

Mymy M. *Sakuramymy*

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Il y a 6 ans

Étrange ... ce serait une hallucination ? Mais le petit garçon la vu aussi. C'est mystérieux j'aime bien

Miss Bly

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Il y a 6 ans

Tu as bien raison, la plupart des résumés gâche une partie de l’histoire. Effectivement, je devrais rajouter certains détails. Dans ma tête il consomme beaucoup de médicament à cause des derniers événements au sein des pompiers. Et la douleur lui est habituelle grâce ou à cause, de son métier. L’adrénaline prend le dessus. Mais je devrais sûrement y faire référence de manière plus explicite ! Très bonne remarque !

Nine C

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Il y a 6 ans

Le mystère s’épaissit... ce n’est donc pas le premier corps aperçu dans cette rivière (je ne lis presque jamais les résumés, je préfère être surprise :) ) une fois par an, comme une date anniversaire... intéressant. Toujours dans l’optique où tu souhaiterais retravailler ton manuscrit, il y a une légère incohérence. Dans le chapitre précédent, Jonathan est blessé à la cheville, assez pour avoir des difficultés à se déplacer. Dans celui-ci, il fait les cent pas

Miss Bly

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Il y a 6 ans

Effectivement, si cela peut aider à la compréhension du lieu, et de la fonction du moulin au sein du parc, je vais revoir le premier chapitre (équivalent des premiers sur la plateforme) pour y remédier et y incorporer des détails et informations plus parlantes à ce sujet.

MICHEL DELARCHE

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Il y a 6 ans

OK. Il serait utile d'expliciter la nature de l'endroit, un peu plus en amont, au niveau de la description du parc.

Miss Bly

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Il y a 6 ans

Bonjour, Mon histoire est basée sur un réel moulin de mon secteur, et même s'il n'est plus en activité depuis des décennies, il a été restauré dans les années 90. Dans l'histoire, son activité est abandonnée, mais pas le bâtiment, qui est en plein centre d'un parc. En France, nous avons la chance d'avoir de nombreuses associations pour préserver le patrimoine. Jonathan est un pompier traumatisé...qui sort difficilement d'un arrêt brutal et forcé de carrière, ce qui explique l'incompréhension qui se transpose entre l'inspecteur borné et l'ancien pompier envieux d'aider mais incapable. Merci du temps que vous avez passé à votre lecture.

MICHEL DELARCHE

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Il y a 6 ans

Le dialogue a un petit problème de crédibilité: quelqu'un qui aurait été pompier saurait interagir de manière plus professionnelle avec la gendarmerie. Autre détail: un ancien moulin à eau abandonné n'aurait pas un crépi datant seulement des années 80; j'imagine que cela vous paraît loin dans le temps, mais les années 30 ou 40 seraient plus cohérentes. (j'ai eu un arrière-grand père meunier dont le moulin avait été reconverti en ferme dans les années 50).
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