R W Le fil du destin Chapitre 22 partie 1

Chapitre 22 partie 1


Eylen le reconnut immédiatement, c’était un ami de maître Marwen, un chevalier qui avait étudié dans la même académie que lui. Il était plus jeune de quelques années que le guérisseur, les deux hommes s’étant simplement croisés, mais n’ayant pas été dans les mêmes classes d’études.

Il passait régulièrement à la boutique pour s’entretenir avec Marwen, leurs discussions finissant inévitablement sur le souhait du chevalier qui demandait à son ami de redevenir mage et de partir en mission avec lui. Proposition que le guérisseur refusait systématiquement avec un petit rire amusé.


— Sire Aodren, dit Eylen en descendant de l’échelle. Maître Marwen est parti rendre visite à un patient.


Le visage de l’homme se détendit légèrement.


— Oh, j’espérais m’entretenir avec lui, répondit-il visiblement déçu.


Eylen le dépassa et ne put s’empêcher de sourire discrètement, la déception était tellement évidente sur le visage du chevalier qu’on aurait presque dit un petit enfant contrarié.


— Il ne devrait pas tarder, voulez-vous l’attendre dans la cuisine ?


— Oui, merci.


Ils passèrent derrière le comptoir pour accéder à la pièce qui se trouvait derrière la petite ouverture et Eylen s’occupa de faire chauffer de l’eau tandis que sire Aodren s’installait à table, mal à l’aise.


Il ne devait pas avoir plus de vingt-cinq ans, pourtant on sentait dans sa façon de se comporter qu’il avait l’habitude d’être obéi. Eylen supposait qu’il devait occuper une place importante, surtout qu’il portait toujours des vêtements de très grande qualité, il n’aurait pas été étonnant qu’il travaille pour la garde du palais. Pourtant, il paraissait toujours gêné en sa présence, presque sur la défensive.

Si elle s’en était inquiétée au début, elle avait fini par s’en amuser, maître Marwen lui ayant expliqué qu’elle risquait de provoquer cette réaction chez les combattants et mages entraînés qui se reposaient trop sur leur perception de l’Energie ou l’aura pour repérer les autres. Eylen n’ayant pas d’Energie propre, ils ne pourraient pas la détecter de cette manière.


Elle servait le thé au chevalier lorsque la porte de la boutique s’ouvrit à nouveau.


— Lyne ? Appela Marwen en se dirigeant vers la cuisine.


— Sire Aodren est venu vous rendre visite, lui répondit Eylen en se dirigeant vers la boutique.


— Ah ! Bonjour mon ami ! S'exclama le guérisseur en les rejoignant.


Il posa négligemment son sac par terre et sa veste sur le dossier d’une chaise avant de s’asseoir face au chevalier. Eylen lui servit une tasse de thé et récupéra le manteau et le sac pour les ranger à leur place respective.


— Marwen, l’accueillit l’homme, son visage s’illuminant. Je viens te faire part d’une affaire importante.


Eylen tendit inconsciemment l’oreille, intriguée. Marwen sorti sa pipe de la poche de son veston brun et la remplie de tabac avant de l’allumer.


— Lyne, tu peux t’occuper de fermer la boutique s’il te plaît ?


— Oui, maître.


Eylen se précipita dans la boutique, quelque peu déçue de ne pas pouvoir entendre leur conversation. Après avoir tourné la pancarte de l’entrée et fermé la porte, elle s’attela à finir l’inventaire et à préparer la commande.

Lorsqu’elle eut fini sa tâche, elle rejoignit les deux hommes dans la cuisine. Maria était occupée à sortir la marmite chaude du feu pour le repas.


— Quand veux-tu partir ? Demandait Marwen préoccupé.


— Il faudra deux jours pour tout préparer... Puis-je compter sur ta présence à nos côtés ?


Le jeune homme semblait tendu, serrant nerveusement sa tasse vide.


— Laisse-moi y réfléchir, je dois m’assurer que mes patients iront bien durant mon absence.


Aodren laissa échapper un petit grognement dédaigneux qui ne manqua pas de faire réagir le guérisseur.


— Ils méritent tout autant que les nobles d’être soignés, Aodren, le réprimanda-t-il calmement, mais sèchement. Si je m’absente trop longtemps, qui s’occupera d’eux ?


— J’en conviens, excuse-moi mon ami. Mais j’ai moi aussi besoin de tes compétences. Ce ne sera que l’histoire de quelques jours, peut-être deux semaines tout au plus. Mes hommes et moi serons plus rassurés si un mage de ton envergure se tient à nos côtés. Les habitants de Toren ont besoin de nous...


— Il y a plein de très bons mages à l’académie...


— Oui, mais ils ne t’arrivent pas à la cheville, le coupa le jeune homme agacé.


Marwen soupira, aspirant une nouvelle bouffée de sa pipe. Il sembla réfléchir un moment, observant pensivement Eylen qui avait entrepris de mettre la table.


— Je ne peux pas laisser mon élève seule ici...


— Pourquoi donc ? Elle semble suffisamment âgée pour se débrouiller seule quelques jours.


— Non, répondit fermement Marwen les sourcils froncés. J’ai promis à Sidélie de prendre soin de son élève, je ne la laisse pas seule ici.


— Alors qu’elle vienne ! Elle ne sera pas de trop si elle sait soigner certaines blessures.


Eylen releva la tête surprise.


— Un champ de bataille n’est pas un lieu pour une jeune fille Aodren !


— Une bataille ? ne put s’empêcher de s’exclamer Eylen.


— Elle ne sera pas présente en cas de conflits voyons, continua le chevalier, ignorant l’intervention de l’assistante. Il n’y aura peut-être même pas de conflit si tout se passe comme je l’espère.


— Tu jures qu’elle restera en retrait ? En sécurité ?


— Oui...


Eylen se mordit la lèvre, inquiète. Elle ne savait pas où voulaient l’emmener Marwen et le chevalier, mais s’approcher d’un conflit ne l’enchantait guère. En même temps, elle ne se voyait pas rester seule dans la demeure du guérisseur en son absence. Maria venait pratiquement tous les jours, mais Eylen n’était pas assez confiante pour se débrouiller seule dans la gigantesque cité deux semaines durant.

Ses rêves de l’homme qui la cherchait ne s’étaient pas arrêté et au contraire s’étaient intensifiés au cours des deux années qui s’étaient écoulées. Pourtant, il ne semblait pas s’être approché d’elle, gardant toujours la même distance entre eux. Elie l’avait informé par courrier que des étrangers étaient venus au village quelques jours après son départ, mais après avoir demandé quelques renseignements sur les créations de Sacha, ils étaient rapidement repartis sans causer de soucis.


— Lyne ? Qu’en penses-tu ? la questionna Marwen.


Eylen jeta un regard gêné à son maître. Elle s’était tellement habituée à la présence de l’homme qu’elle ne s’imaginait pas le laisser partir seul. Surtout si c’est pour ne pas le voir revenir, se dit-elle en sentant son cœur se serrer. La jeune femme avait déjà perdu trop de monde, elle n’était plus une enfant désormais et ne laisserait plus les gens auxquels elle tenait disparaître.

C’est rempli de cette conviction qu’elle fixa son maître fermement décidée.



Tu as aimé ce chapitre ?

2

0

0 commentaire

Vous êtes hors connexion. Certaines actions sont désactivées.

Cookies

Nous utilisons des cookies d’origine et des cookies tiers. Ces cookies sont destinés à vous offrir une navigation optimisée sur ce site web et de nous donner un aperçu de son utilisation, en vue de l’amélioration des services que nous offrons. En poursuivant votre navigation, nous considérons que vous acceptez l’usage des cookies.