R W Le fil du destin Chapitre 7 partie 2

Chapitre 7 partie 2



Des rires et des gloussements le réveillèrent le lendemain soir. Le plafond au-dessus de lui était désormais fait terre jaune comme les murs qui l’entouraient, et la lumière de la lune décroissante filtrait à travers une petite ouverture carrée.


Tournant le regard, il aperçût alors Babil, assis à son chevet, en train de discuter avec deux soigneuses vêtues de noir.


_ ...Et là Qahir me prend l’outre avec un regard dur, et il me dit “Mon ami, si tu ne rends pas ce butin là où tu la pris, je te dénonce !” continuait-il dans une imitation franchement grotesque de sa voix en remuant exagérément un doigt accusateur. _ “Là c’est trop !” Sauf que l’un des gandarïs du palais se trouvait juste derrière lui !


Les deux guérisseuses poussèrent une exclamation de surprise en se couvrant la bouche.


_ Et je me suis fait punir à ta place... lâcha Qahir en se redressant lentement.


_ Ah Qahir ! S'exclama Babil en sautant de sa chaise pour venir l’enlacer.


_ Aïe ! Cria le garçon en souriant malgré lui.


Il rendit l’accolade à son ami, soulagé de le voir en bonne santé.


_ Tu m’as fait une de ces peurs mon vieux ! J’ai cru que tu étais passé de l’autre côté !


_ Moi aussi...


Il repensa en frissonnant à l’énorme dard planté dans sa poitrine.


_ Qu’est-ce qu’il s’est passé ? Je croyais que j’allais mourir...


_ Tu as bien failli ! Enfin peut-être que tu es vraiment mort et que tu es revenu, fit son ami en s’approchant les yeux écarquillés.


Qahir vit les deux prêtresse se jeter des regards gênés, et le repoussa faiblement en arrière, puis regarda son torse entièrement bandé. Il n’avait presque plus mal désormais et réussissait même à respirer normalement. Il leva sa main pour toucher le tissu mais fut stoppé par une soigneuse. Relevant la tête il reconnut celle qui s’était occupé de lui.


_ Crois-moi tu n’as pas envie de voir ça, lui conseilla son ami en réprimant une grimace.


_ Mais je n’ai plus mal.


_ Pour ça il faut remercier notre nouvelle amie, fit Babil en jetant un regard appuyé à la jeune guérisseuse qui rougit sous son voile.


Soudain un énorme gargouillis s’échappa de l’estomac de Qahir et ce dernier devint aussi rouge que la jeune fille.


_ Ah ah ! rigola Babil. Tu ne perds pas le nord toi !


Les deux guérisseuses sortirent de la pièce et leur ramenèrent à tous les deux un bol de ragout qu’il partagèrent en discutant des fameux évènements.


Babil lui raconta comment s’était déroulée la fin du combat, si on pouvait le qualifier ainsi plutôt que de massacre. En effet, une fois le gigantesque Scorpion tué par Qahir, les autres monstres avaient cessé de les attaquer pour fuir vers la frontière. Mais les garidans et les autres gamins, sous les ordres des garandïs avaient passé le reste de la nuit à les pourchasser et à les exterminer.


Babil, lui avait d'abord suivi discrètement son ami évanoui, que les garandïs avaient fait transporter jusque dans la tente des prêtresses, pour être sûr qu’il n’était pas mort. Puis il avait bien sûr du se joindre aux autre pour finir la bataille.


Ils étaient ensuite restés sur place une journée entière et une nuit, pendant que les prêtresses s’affairaient autour des blessés. Durant ce temps Babil et les autres enfants de leur escouade avaient été chargés de découper les dards des scorpions pour en récupérer le venin. Qahir, lui, était bien content de ne pas avoir pu participer à cette mission.


_ Tu es devenu une vraie légende ! Tous les gamins parlent de toi ! Même les garidans et certain garandïs !


_ Je n’ai pas vraiment fait grand-chose, répondit le garçon, ses joues rosissant malgré tout.


_ Tu es fou ? Tu as terrassé un scorpion gigantesque plus gros qu’un Homme ! S'exclama Babil en écartant largement les bras. Et surtout, insista-t-il, tu as survécu au poison alors que cela aurait dû te tuer !


Il marqua une pause et sembla hésiter.


_ Quoi ? Lui demanda Qahir perplexe.


Babil regarda autour de lui, visiblement gêné. Les guérisseuses était parties depuis un moment, et ils étaient seuls dans la pièce. Finalement, il se décida à parler :


_ Quelqu’un de normal n’aurait pas survécu à ça... commença-t-il en parlant plus bas.


_ Oui ça je sais. Ce sont les prêtresses qui...


_ Non, le coupa son ami. Ce ne sont pas les prêtresses. D’autres sont morts bien plus vite que toi avec beaucoup moins de poison dans leur corps... Toi, tu l’as eu directement dans le cœur...


Il grimaça en lui montrant son torse.


Qahir posa inconsciemment la main là où se trouvait sa blessure.


_ Et ce n’est pas tout. Regarde-toi ! Cela fait à peine trois jours et tu te tiens assis, à parler avec moi comme si de rien était !


Qahir fronça les sourcils en réfléchissant. C’était vrai, il avait clairement entendu ses côtes se briser et sentit son sang le brûler au contact du poison. Pourtant, il ne ressentait quasiment plus aucune douleur.


Mû par une pulsion soudaine, il entreprit de défaire le bandage qui enserrait le haut de son corps. L’opération se releva assez périlleuse, et son ami finit par l’aider à contrecœur.


Une fois le tissu retiré, il eut le souffle coupé en découvrant son corps. Une énorme cicatrice rose sphérique se dessinait sur sa poitrine, d’un mamelon à l’autre. Il toucha la peau fine, presque translucide. La blessure formait un creux dans ses côtes, comme si on les lui avait enfoncés vers le cœur. Sa gorge se serra sous le coup de l’émotion et il sentit son souper remonter le long de son œsophage. Il fit signe à Babil qui lui apporta rapidement un seau dans lequel il vida l’intégralité de son repas, la bile lui brûlant la gorge et l’intérieur de la bouche.


Ses larmes commencèrent à monter, lui piquant les yeux et il se détourna vers la fenêtre pour que son ami ne le voit pas. Pour quelle raison régissait-il ainsi ? Il n’en savait rien. La peur de la mort ? Il s’était convaincu depuis toujours que cela l’importait peu... La vie était suffisamment cruelle, qu’aurait pu lui faire de plus la mort ? Pourtant, le soulagement qu’il ressentait à cet instant lui prouvait qu’il n’avait pas renoncé. Que malgré tout il était encore là.


Ils restèrent ainsi un moment, puis l’une des prêtresses entra et décréta qu’il était temps que le patient se repose et fit sortir Babil.



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