Fyctia

Le lendemain, je reçois enfin une réponse de Zeus, il était temps. La réponse est courte, sans fioritures, c’est lui tout craché. Je savais déjà que la filature ne venait pas de lui, mais je trouve qu’il a quand même mis du temps à me répondre. Celui qui m’inquiète vraiment, c'est Poséidon, je n’ai pas eu de nouvelles de sa part. C’est très étrange, j’espère qu’il ne lui est rien arrivé. Peut-être est-il occupé à enquêter sur Arès. Si ce fumier lui a fait quelque chose, je le trouverai même en enfers s’il le faut et je le ferai payer.

Je suis en cours avec Calliopé quand la secrétaire du doyen entre dans la salle. Elle demande à ce que je la suive. Mon amie me lance un regard du genre qu’est-ce que tu as fait encore. Je me lève et sors rapidement de la salle.

- Votre père est ici !

- Mon père ?

- Oui, il souhaite vous voir rapidement, je suis navrée d’avoir dû vous interrompre dans votre cours, mais il a dit que c’était une urgence !

Je ne sais pas sur qui je vais tomber en arrivant, sachant que je n’ai pas de père. On longe les couloirs de l’université jusqu’au bureau du doyen. Une fois devant, je tombe sur un regard bleu azur. Bien sûr, j’aurais dû savoir que ça ne pouvait être que lui. Il débarque pile au moment où je reçois la réponse de Zeus, à croire qu’ils se sont passés le mot. Le doyen nous propose de prendre son bureau pour qu’on soit tranquille. On pénètre dedans et j’amorce directement.

- Je suis en colère contre toi ! Je n’ai pas eu de tes nouvelles et j’étais morte d’inquiétude. Tu as de la chance qu’Hermès ne me voulait pas de mal, sinon j’aurai pu finir découpée en rondelles.

- Tu n’es pas un peu dans l’exagération ? Tu ne l’aurais jamais laissé te découper et de ce que j’ai entendu, c'est toi qui l’as découpé !

- Pourquoi tu es là ? Il y a un problème ?

- Déjà, je voulais quand même m’assurer que tu allais bien, dans ton message, j'ai senti ton stress. Et puis, on a découvert qu’Arès serait au courant de tes pouvoirs, pas tous heureusement, mais assez pour que cela soit dangereux pour toi. 

Mince, il est clair que ce n’est pas une bonne nouvelle. Je ne sais pas ce que je vais faire maintenant, mais nous pouvons nous poser la question de savoir si d’autres dieux sont au courant. Je m’inquiète pour moi, et surtout pour mon entourage ; je préfère mourir plutôt qu’on se serve de moi pour faire du mal aux gens que j’aime. Déjà que j’avais pas mal de monde sur mon dos ces derniers temps, avec cette nouvelle, cela va être encore pire. J’en viens presque à me demander si mes pouvoirs ne seraient pas une malédiction au lieu d’un don. Je regrette instantanément cette pensée, car sans eux, je n’aurais jamais rencontré ceux qui sont comme ma famille.

Désormais, il va falloir décider si je dois me cacher ou bien continuer ma vie et augmenter le nombre de mes entraînements ainsi que leur difficulté. Je connais déjà mon choix, ce n’est pas dans ma nature de me planquer.

J’essaie de contrôler mon impulsivité qui me pousse à débarquer chez Arès pour lui tirer les vers du nez et découvrir ce qu’il prépare. Je fais vraiment un travail sur moi, Poséidon m’a toujours dit que je ne ressemblais jamais à une mer calme, sans vagues. Je l’ai toujours pris comme un compliment. Je pense qu’il disait surtout ça car je ne tenais pas en place plus jeune. Mais je préfère largement être tempétueuse comme un océan, même s’il ne l’admettra jamais, on se ressemble sur ce point. Il doit voir Zeus pour faire le point de tout ce qu’ils ont pu trouver et réfléchir ensemble à la meilleure solution. Il me contactera dès que ça sera fait. Je sais qu’il va gérer, j’ai une confiance absolue en lui comme ma mère avant moi.

- Tu sais que tu aurais pu attendre que je rentre chez moi pour venir me voir…

- Et manquer l’occasion de jouer le rôle de ton père, sûrement pas !

- Ce n’est pas qu’un rôle, même si nous n’avons pas le même sang, tu es mon père. Point à la ligne et je ne veux plus en parler.

Il m’embrasse sur le front avant de m’ouvrir la porte. Je l’abandonne au détour d’un couloir, et je me dépêche de retourner en cours. Sur le chemin, je sens tous les poils se dresser sur ma nuque. Il ne manquait plus que ça à ma merveilleuse journée.

Je ne peux pas retourner en cours, ça pourrait mettre Calliopé en danger. Je choisis de n’appeler personne, sinon après je ne pourrais pas bouger un orteil sans avoir une personne avec moi. Ce qui pourrait passablement m’énerver, surtout sur le long terme. Je me demande quand même ce qu’aurait été ma vie si je n’avais pas connu les dieux. J’aurai sûrement créé des catastrophes avec mes pouvoirs, ou alors, je n’aurai pas eu de protections durant mon enfance. Grâce à l’entraînement qu’ils m’ont donné, je peux au moins me défendre seule aujourd’hui.

Ma main se resserre autour de la bandoulière de mon sac pendant que j’observe les alentours. J’étais peut-être tranquille ces derniers jours, mais Arès a dû trouver une nouvelle personne pour me suivre. Enfin, j’espère que c’est lui et pas une autre personne à qui il aurait parlé de moi. J’opte pour l’approche frontale, je me place au détour d’un couloir de manière à pouvoir attraper l’individu. J’attends qu’il ou enfin je me rends compte au moment où elle passe que c’est une femme. Une kère, c’est bien ma chance. En y pensant, c’est probablement de son propre chef qu’elle me suit. Elles ne m’ont jamais trop aimé, même si j’aimerais dire que c’est grâce à mon charme naturel, je sais que c’est surtout à cause de ma relation avec Déimos. Je me glisse derrière elle et quand on arrive près du local de fournitures, je la tire par une aile à l’intérieur. Je la projette contre une étagère avant qu’elle n’essaie de se défendre. Elle tourne la tête vers moi et un sourire démoniaque prend place sur son visage. Elle sort lentement ses katanas placés dans son dos, j’ai la sensation que ça va être ma fête.

- On dirait bien que tu as décidé de te jeter dans la gueule du loup toute seule ! Je vais pouvoir te tuer tout de suite.

Je suis surprise que son attaque soit aussi directe, elle sait ce qu’elle risque si Déimos apprend ce qu’il se passe. Je la regarde plus attentivement et ses yeux rouges sont recouverts d’un léger voile blanc. Je ne comprends pas ce qu’il se passe, je n’ai jamais vu personne dont le regard ressemblait à ça.