Fyctia
Chapitre 1
Je suis presque prête. Il ne me reste que la touche finale. Mon voile. Je grommelle alors que je dois me déplacer dans ma chambre. Je déteste les robes. Habituellement, j’ai le droit de porter des pantalons.
— Mac ! C’est le grand jour !
Rosaleen pénètre dans ma chambre en criant. Son excitation est perceptible. Elle tourbillonne dans la pièce après avoir bien refermé la porte.
— Dans quelques heures, nous serons en présence de la délégation de Zefar ! Je vais bientôt rencontrer mon futur mari !
Ses yeux violets pétillent de malice. Ses cheveux blonds sont noués dans une coiffure compliquée avec un chignon et des multitudes de tresses. Son visage maquillé met en valeur son visage. Rosa a toujours été une d’une grande beauté. Elle tient de sa mère, la reine Maureen. Enfin presque, elle tient du roi Kiéron, ses yeux violets.
Je lève les yeux au ciel :
— Rosa, ne me casse pas les oreilles dès le matin !
— Pourquoi tu ne t’es pas mieux apprêtée ?
Je la dévisage, interdite.
— Quoi ? Ce n’est pas parce que tu dois porter ton voile que tu ne peux pas être jolie ! Tu as de magnifiques cheveux bruns et je pourrais en faire une coiffure simple, mais sublime. Pour les yeux, on a les mêmes donc il te faut juste un trait noir et enfin pour les lèvres, on pourrait opter pour du rouge, qu’en dis-tu ?
Je me tourne vers le miroir pour m’observer. Elle se place derrière moi. Je suis un peu plus grande qu’elle et elle se met sur la pointe des pieds pour pouvoir poser son menton sur mon épaule.
— Même si personne ne te voit, nous, on saura que tu es jolie, ajoute-t-elle avec un doux sourire.
Nos iris si semblables se croisent dans le miroir. Preuve du sang royal qui coule dans nos veines. Nous nous ressemblons peu. Elle est douce, gentille et diplomate. Je suis violente, dure et intransigeante. Nous sommes si proches et pourtant nous ne pouvons avoir de destins plus éloignés. Elle est la fille chérie d’Esthate, je ne suis que la bâtarde du roi. Je ne devrais pas me plaindre. La tradition veut que fils ou filles illégitimes du monarque soient tués dès sa naissance. Mon père l’a rompu en me gardant en vie alors que je n’étais qu’un nourrisson.
Son épouse, la reine, était déjà enceinte et presque à son terme. Il a alors eu une idée. Faire de moi la protectrice de la princesse. M’entraîner et apprendre toutes les techniques pour tuer dans le seul et unique but de protéger Rosaleen. J’ai même parfois servi de doublure lors d'événements publics risqués.
— Qui sait ? Tu vas peut-être trouver ton futur mari dans la suite de mon époux ! Allez dis oui !
Sa petite moue boudeuse me fait sourire. J’aurais pu développer une grande haine envers Rosaleen. Après tout, elle avait tout eu alors que je ne récoltais que coups et mépris. C’était sans compter sur la gentillesse de ma petite sœur. Elle m’a toujours tendu la main, a soigné toutes mes blessures et même si je n’avais pas le droit de dîner à la table royale, elle chipait des gâteaux pour me les apporter en cachette.
Encore aujourd’hui, je ne comprends pas comment une personne aussi belle que Rosa perd son temps avec moi. Qu’importe, je chéris notre relation fraternelle de tout mon être. Nous avons toujours pu compter l’une sur l’autre.
— Pitié… Tout, mais pas ça !
— Je ne comprends pas ton point de vue sur le mariage ! C’est si beau de savoir que tu vas pouvoir vivre ta vie à côté de la même personne tout en se jurant amour et fidélité !
Je la dévisage avant de rétorquer :
— Dois-je te rappeler comment je suis venue au monde ? Sûrement pas grâce à la fidélité !
Elle me lance un regard noir. Si nous parlons ouvertement de mon statut d’enfant illégitime, c’est parce qu’en dehors de nos chambres, personne ne le sait. Le nombre de personnes connaissant mon identité se compte sur les doigts d’une main. Pour le reste du palais, je ne suis que la protectrice masquée de la princesse. Je n’ignore pas les rumeurs sur mon compte. Les rumeurs les plus sérieuses sont des cicatrices qui défigureraient mon visage. Certains parient sur le feu et d’autres sur une malformation de naissance. Cela fait beaucoup rire Rosa. Je sais que régulièrement elle en lance pour pimenter les ragots.
— On ne peut pas trop en demander aux hommes, tu sais !
— Pardon ? Si je jure devant Dieu d’être fidèle, pourquoi devrais-je respecter ma promesse si mon époux ne le fait pas ? Je refuse de penser que parce qu’ils sont des hommes, ils ont un droit supplémentaire !
Elle pouffe avant de partir dans ma salle de bain pour aller chercher une trousse à maquillage. Celle qu’elle m’a fournie et que je ne touche absolument jamais.
— Mac ! Je te signale qu’à la mort de papa, j’accéderai au trône. La plupart des autres pays à commencer par Gogi ne veulent que des héritiers mâles.
Je grogne. Gogi… C’est à cause d’eux que ma sœur et moi nous retrouvons à devoir quitter notre terre natale pour rester un an et un jour à Zefar. Ensuite, le prince Justin et sa suite viendront ici pendant une année et un jour. Le but est de faire table rase du passé pour regarder vers l’avenir. Si nos ancêtres savaient que nous enterrions la hache de guerre, je crois qu’ils ne s’en remettraient pas. Du plus loin qu’on remonte nos écrits, Zephar et Esthate ont toujours été en désaccord. La paix n’a jamais été durable.
Cela aurait dû continuer si notre voisin Gogi n’avait pas annexé différents territoires autour de lui et commençait à loucher sur nos pays. Nous sommes de taille moyenne et nos denrées sont nombreuses. Pour un envahisseur, nous représentons un appât alléchant. Pour pallier le risque d’invasion, les deux monarques ont décidé d’une trêve. Quoi de mieux qu’un mariage pour sceller un accord de paix ?
— Et alors ? Je ne vois pas pourquoi si tu es avec un mari volage, tu ne pourrais pas l’être toi non plus !
— Parce que si je ne porte pas ses héritiers ou héritières, nous risquons de briser la paix et donc de nous faire envahir ?
Je grommelle :
— Je trouve cela quand même injuste !
Rosa revient avec la trousse et se met à me maquiller. En quelques minutes, mon visage est sublimé. Alors qu’elle veut s’attaquer à ma chevelure, on toque à la porte. Les domestiques savent qu’ils ne doivent, sous aucun prétexte, ouvrir.
— Mademoiselle Mac, princesse Rosaleen, il est l’heure !
Nous nous regardons. La peur et l’excitation se mêlent sur le visage de ma sœur. Je l’embrasse sur le front puis récupère mon voile avant de le nouer avec des épingles. Il repose devant moi. Ma vision se teinte de noir même si mon champ de vision n’en est pas altéré !
— Prête, petite sœur ?
Je lui tends mon bras et elle s’en empare avec un énorme sourire :
— Avec toi à mes côtés ? Toujours !
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Toyjeci
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Il y a 3 ans
Andrée Martin
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Justine Hurido
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