Fyctia

Dans aucun cas elle n’acceptera de livrer Justin à ces hommes, surtout pas après la discussion qu’elles viennent d’avoir avec Matt un peu plus tôt.

Heureusement, un contact léger de la main d’Ava sur la sienne vient rapidement rassurer Sarah. Toujours méfiant, le policer les maintient toujours en joue de son arme lorsqu’il reprend la parole.

— Ceci est mon dernier avertissement, rejoignez la voiture où nous devrons prendre action !

— Désolée, mais ce ne sera pas possible.

Étonnée par cette réponse, Sarah se prépare mentalement à une réplique des agents, mais une puissante vague d’énergie la submerge avant qu’elle ne puisse réagir. Devant son regard ébahi, les quatre hommes tombent au sol sans un bruit. À ses côtés, Ava est toujours immobile, ses yeux entièrement noirs fixés sur les victimes de son attaque.

— Mais qu’est-ce que tu as fait !? s’insurge Sarah.

— Ces hommes n’agissaient pas selon leur volonté. Jamais des policiers n’oseraient recourir à la force contre deux femmes désarmées. Il y a quelque chose qui ne tourne pas rond ici. Tiens-toi prête.

— Tu crois que le père de Larry est ici ?

— Cet homme est le dernier de mes soucis en ce moment. Je sens une puissance magique en provenance de cet entrepôt.

— Ne viens-tu pas de me dire que ta famille n’a aucun intérêt à s’impliquer dans cette histoire ?

— L’énergie que je ressens n’est pas liée à la magie noire.

En réponse au doute exprimé par Ava, une nouvelle onde magique en provenance du bâtiment vient soudainement balayer la zone, projetant les deux femmes vers l’arrière avec violence. Prises par surprise, toutes deux tombent lourdement à la renverse, leurs corps percutant le sol dans un bruit sourd.

Une pluie d’étoiles s’abat sur Sarah lorsque sa tête frappe le sol. Le regard voilé par l’étourdissement qui la gagne, elle remarque que sa compagne n’est pas dans un meilleur état, son corps inerte reposant près du sien.

Paniquée, elle tente de reprendre le contrôle, mais un bourdonnement sourd dans sa tête l’empêche de mettre de l’ordre dans ses idées. Sur sa poitrine, son médaillon commence à chauffer, dégageant une grande quantité d’énergie dans tout son corps meurtri par sa chute. Concentrée sur ce flux magique, elle ressent une nouvelle onde de choc passer au-dessus de son visage. L’impact sur la voiture située plusieurs mètres plus loin est fulgurant : les pneus du véhicule crissent sur le ciment et les vitres volent en éclats. Dans l’habitacle, le corps de Boranok émet une série de craquements qui lui lèvent le cœur.

Visiblement, leur ennemi ne compte prendre aucune chance et semble au courant de la présence du démon. Une seconde vague invisible, encore plus puissante, vient littéralement écraser la carrosserie dans une cacophonie de froissements métalliques.

Terrifiée, Sarah se relève de peine et de misère, observant la silhouette qui sort lentement du bâtiment, les mains pointées vers ce qui reste de la voiture qui les as emmenées ici. Étourdie, l’adolescence fait l’impossible pour ancrer ses pensées sur un sort pouvant les aider. Malheureusement pour elle, une soudaine présence dans son esprit vient rapidement brouiller les cartes.

— Cesse de résister, lui indique une voix qu’elle ne reconnaît que trop bien. Ta seule option est de me remettre ce médaillon si tu ne veux pas que je broie chacun des os de ton amie.

Appuyant sa menace, le nouvel arrivant pointe la main vers le corps d’Ava qui émet alors un gémissement. Voyant le corps de sa compagne se tordre sous l’effet de l’attaque, Sarah hurle sa douleur.

— Zadriel, arrête ! Pourquoi t’en prendre à elle si c’est moi qui t’intéresse ?

— J’ai eu vent de ce dont tu es capable et je ne compte prendre aucune chance. Si tu tentes quoique ce soit contre moi, elle mourra dans de terribles souffrance sans que tu ne puisses rien y faire.

— Comment peux-tu commettre une telle horreur ? répond-elle mentalement. Tu es supposé être un mage de lumière !

— Et alors ? Tu crois que la souffrance est réservée aux ténèbres ? Si c’est le cas, voilà la preuve que tu n’es pas digne de posséder une relique comme ce médaillon ! Donne-le-moi et je te promets que tu ne te rappelleras de rien et que tu pourras vivre ta petite histoire d’amour avec cette sorcière insignifiante.

Voyant le mépris évident sur les traits de Zadriel, Sarah est en proie à un mélange de peur et de dégoût profond. Certes, Ava ne semble en rien représenter une menace pour ce monde cruel, mais cela ne la rend pas insignifiante pour autant.

Loin de là.

Animée par la rage qui prend naissance dans son cœur, Sarah chasse Zadriel de son esprit et se redresse, stoïque. Puisant dans l’énergie dégagée par le médaillon, elle tente un sort pour le repousser. Une lumière éblouissante vient toutefois l’englober, chassant toute trace d’ombrage dans les environs.

Posant un regard satisfait sur elle, Zadriel reprend de vive voix.

— Bien essayé, mais je connais tes petits trucs à présent. Il n’y a pas d’ampoules que tu peux briser ici et les ombres ne te seront d’aucune aide. Mon père a toujours été si faible. Pas surprenant qu’il ait décidé de te porter allégeance ! Je te le demande une dernière fois : remets-moi ton médaillon !

Le cri de douleur qui parvient aux oreilles de Sarah ne laisse aucun doute quant à la véracité de ce dernier avertissement. Près d’elle, le corps d’Ava se cambre sous la souffrance qu’elle subit.

— Si tu tardes trop, son corps ne s’en remettra pas, menace Zadriel.

— Tu sais bien que le médaillon s’est fusionné à moi ! hurle Sarah. Même si je le voulais, je ne pourrais pas te le remettre. Laisse-la partir et je te suivrai, je te le promets !

— Il est hors de question que je m’encombre de ta présence à mes côtés. Après ce que tu as fait hier, toute la communauté de la sorcellerie est à tes trousses. Crois-moi, la douleur que tu subiras à te retirer cet objet de la poitrine n’est rien en comparaison de ce que ton amie va subir dans quelques secondes si tu ne me remets pas ton pendentif !

Un autre cri de souffrance déchire alors le cœur de Sarah. Ses yeux rivés sur le corps tordu de son amie laissent dès lors couler deux rivières de larmes qui s’opposent au feu qui la brûle de l’intérieur. À sa poitrine, son médaillon vibre à présent d’une puissante énergie qui menace d’exploser à tout moment.

« Laisse ta rage prendre le contrôle. Cette vermine périra avant même d’avoir compris ce qui lui arrive ! » lui hurle la noirceur de son esprit.

« Ava ne survivra pas à une telle décharge magique. » complète sa raison.

Atterrée par la souffrance d’Ava et par la torture que lui inflige son propre esprit, Sarah hésite encore un moment. Puis, sans même pleinement réaliser son geste, elle porte la main à sa poitrine et descend brusquement le col de son chandail, enfonçant ses ongles dans sa propre chair pour saisir le médaillon.

Insensible à la douleur, elle saisit l’objet et tire de toutes ses forces.

Fébrile, Zadriel observe la scène avec ravissement, relâchant son emprise sur Ava.