Fyctia

Julia

Samedi

L’excitation montait à mesure que les heures passaient. J’avais enfilé mon maillot, prête à rejoindre l’équipe pour le match amicale qui aurait lieu en début d’après- midi. J’avais donc travaillé toute la matinée sur la préparation de mes cours. Eh oui, les cours ne se préparent pas tout seul ! Je terminerai dimanche si besoin.

Après une petite collation, je me rends au gymnase.

A peine entrée, le cœur battant, j’aperçois Manu, toujours aussi énergique, qui court vers moi. Et derrière elle, je remarque qu’Alice essaye de l’attraper pour je ne sais qu’elle raison. Je les laisse se débrouiller, et continue mon chemin. On les entend se chamailler jusqu’aux vestiaires.

Après l’échauffement, le match démarre. Le coup d’envoi retentit. Les passes fusent, les tirs s’enchaînent. Nos adversaires ont une avance, mais les filles ne baissent pas les bras. Manu, avec son bras puissant, marque un but crucial. L’espoir renait. Malgré nos efforts, notre équipe ne peut rattraper le retard. Les joueuses adverses sont plus rapides, plus expérimentés. Le score est serré pourtant.

En revenant au vestiaire nous sommes un peu déçues ; mais la joie revient vite lorsque nous parlons de la soirée qui s’annonce. Avec Manu et quelques autres, nous traînons puis Alice nous invite à prendre l'apéro chez elle avant d'aller au resto. Je dois d'abord passer chez moi pour me changer. Manu m'accompagne.

En chemin, elle qui connait mes déboires avec Héloïse me questionne, je lui raconte les dernières évènements. Elle ne comprend pas que je puisse continuer cette histoire. Moi non plus d’ailleurs, je ne me comprends pas.

Tandis que je me dirige vers ma chambre pour me changer, Manu patiente en navigant sur son portable :

J’ouvre mon armoire et fouille parmi mes vêtements. Que vais-je mettre ce soir ? J’ aimais les tenues simples mais élégantes. J’opte pour une robe fluide, légèrement décolletée, qui met en valeur ma silhouette athlétique. Petit maquillage léger, j’enfile des escarpins.

- Eh bien, habillée comme ça, tu vas faire des ravages, me dit Manu lorsqu'elle m’aperçoit.

je la remercie pour ce compliment.

Nous rejoignons les autres comme prévu chez Alice. Nous sommes les dernières et l’ambiance est déjà bien chaude. À peine le temps de m’asseoir qu’on me colle un cocktail dans la main. Je prends en cours le fil de la discussion. Les filles refont le match et je me joins à elle pour donner mon point de vue. Puis vient l’heure d’aller au restaurant.

Nous sommes très bruyantes et notre arrivée à la bodega est loin d’être discrète. Je scrute les tables proches des vitres mais je ne distingue pas grand-chose. Nous franchissons la première double-porte et arrivons dans cette espèce de sas. J’en profite pour regarder la salle et qu’elle n’est pas ma surprise d’apercevoir sur la table de gauche la mère d’Alexia.

Elle est assise avec des amis, et surtout à côté d’un homme. Ils semblent très proches, riant. Lui l’entourant de son bras. Je sens une pointe de contrariété. Pourtant il n’y a aucune raison à cet agacement. Je ne la connais pour ainsi dire pas mais cette scène me perturbe. Est-ce son ex mari ?

Ces quelques secondes me paraissent une éternité, c’est comme si le temps défilait au ralenti. Je me retrouve avec mes illusions déçues. Je me tourne vers la table de gauche, plonge mon regard dans celui de Clara et lui adresse un bonsoir. Elle me répond mais sa réponse est empreint de surprise.

Nous prenons notre table habituelle au fond de la salle.

Assise et pensive, je regarde mes amies rire et discuter joyeusement. Leurs voix se mêlent au doux murmure de la salle, créant une ambiance chaleureuse. Pourtant, mon cœur est lourd.

Cet homme qui la colle avec son bras autour de ses épaules, m’agace terriblement. Il n’arrête pas de parler en gesticulant, j’ai horreur ça !

Je suis bien bête d’avoir imaginé que la mère d’Alexia puisse être intéressée par une femme. Je m’en veux d’avoir pu m’emballer comme ça !

Manu qui s’aperçoit de mon absence, remarque que je ne suis pas du tout connectée à leurs délires. Elle s’inquiète, comme elle connait mes déboires avec Héloïse. Je ne dément pas.

Aucune des filles n’a eu l’air d’avoir remarqué mon trouble lorsque je suis entrée.

Manu continue en me taquinant, essayant de me divertir et me faire rire. Elle me colle un bisou sur la joue et pose sa tête sur mon épaule. Je la laisse faire. Manu est très tactile. Je l’étais avant de rencontrer Héloïse mais je le suis moins. Seulement ce soir, sa proximité me fait du bien. Mais mon regard discret est toujours posé sur Clara. Enfin je le pensais jusqu'à ce qu’elle relève la tête.

Le temps est suspendu, et nos yeux restent soudés quelques secondes Deux ou trois fois, nous nous scrutons au même moment. Avec Manu collée à moi Clara devrait peut-être comprendre que je préfère les filles. C’est contradictoire. Bien, mais elle est aussi parents d’élèves. Cela pourrait me porter préjudice. Mais les signes depuis que je la connais m’interrogent. Je sens que je ne lui suis pas indifférence. Ses regards devant l’école, comment elle me toise, m’observe aussi. peut- être y a-t-il de l’espoir ? Ou est ce de la curiosité ?

Alice qui est plus subtile que Manue, s’aperçoit que j’observe quelqu’un :

« Tu regardes qui comme ça ? me demande Alice.

— Quoi ? Décidément ce soir je suis à côté de la plaque et j’ai des réparties extraordinaires. Personne.

— Mais bien sûr Julia. C’est laquelle ?

Je leur explique une version qui calmera leur curiosité en leur expliquant que j’ai repéré la mère d’une de mes élèves, c’est tout.

Elles ne sont pas dupe :

- Ah oui ?! tu as « repéré » une mère d’élèves ?! me dit Alice en appuyant bien sur le mot « repéré »…

— Oui, Je regarde juste avec qui elle est. C’est la mère de ma nouvelle élève. C’est juste de la curiosité.

—Ouh ouh, me charrie Alice après avoir regardé en direction de Clara. Mais c’est qu’elle est pas mal !

Juste à ce moment là, je vois Clara se lever de table et venir dans notre direction. Je me fige. Elle n’a pas pu entendre, elle est trop loin !

- Ah, on dirait qu’on va la voir de plus près. Si elle va aller aux toilettes elle passera devant nous ! me lance Alice avec un sourire.

Je m’efforce de les calmer :

- Arrêtez elle va finir par nous entendre ! Soyez discrètes un peu !

Je fais semblant de reprendre une conversation imaginaire et je guette d’un œil Clara. Quand elle passe à la hauteur de la table je lui souris. Elle me sourit aussi un peu gênée on dirait.

- Elle n’a pas l’air toute jeune reprend Alice lorsque Clara a disparu.

- Dis donc ! Je vais aller lui dire tiens !

Je me lève.

- Quoi ? Mais ça va pas la tête ! panique Alice. Reviens t’asseoir Julia, je plaisantais !!

- Tu m’as cherchée… tu m’as trouvée ! Et je lui lance un grand sourire en me dirigeant vers les toilettes.

- Ce serait pas plutôt pour la draguer ? me glisse Manu au creux de l’oreille.

en fait je ne sais pas trop, mais quelque chose me pousse à aller la voir.