Fyctia

Sous la douche, Lévi Parkes autorisa les perles salées de ses émotions se mêler à l’eau qui ruisselait sur son visage. Noah l’avait confronté à ses démons, et leurs griffes acérées avait fait ressortir la douleur du passé. À présent, Elena connaissait le pire en lui, son regard allait-il se métamorphoser ? Contre toute attente, elle était venue le retrouver dans ce bar, mais maintenant ?

Les souvenirs affluèrent, comme des spectres du passé, rappelant la solitude qui avait jadis tissé ses chaînes autour de lui. Il se revit, esseulé, face à ses parents indifférents, face à Brack. Même après le tumulte de la guerre, la solitude ne l’avait jamais abandonné. Malgré la notoriété et l’entourage que lui offrait son métier, il avait toujours été seul, isolé au milieu d’une mer de visages inconnus. Il avait effleuré l’éphémère bonheur d’être à deux, et désormais, comment envisager de s’en défaire ?

Lorsque Lévi émergea de la salle de bain, dépourvu de tout t-shirt, une serviette négligemment drapée autour de son cou, il découvrit Elena dans la chambre, perdue dans la contemplation du paysage au-delà de la fenêtre. D'un mouvement gracieux, elle se tourna vers lui, une cascade de cheveux tourbillonnant autour de son visage éclairé par un sourire radieux.

— Salut, dit-elle. Il y avait un chat noir qui se promenait dehors.

— Salut toi, répondit le jeune homme qui sentait une petite flamme réchauffer son cœur.

Elena s’assit sur l’un des lits, et lui fit signe de venir près d’elle.

— Comment vas-tu ? demanda-t-elle.

Personne ne lui avait posé cette question depuis des années, mais cette femme ne cessait de le surprendre.

— Ça va aller.

— Je te l’ai déjà dit, mais tu peux compter sur moi.

Elle glissa sa main dans la sienne, c’était devenu une habitude de voir leurs mains unies.

— Concernant Noah, continua-t-elle. J’ai discuté avec lui, il m’a promis de se calmer. Je sais qu’il est blessé par ce qu’il se passe entre nous, mais ça ne lui donnait pas le droit de réagir comme ça.

— Et que se passe-t-il entre nous ? questionna Lévi, à la fois surpris et amusé.

Elena posa sa tête sur l’épaule du jeune homme.

— Sommes-nous obligés de répondre à cette question ?

En guise de réponse, il fit glisser son bras autour du dos de son amie, posant sa main avec une assurance douce sur sa hanche, l’invitant à se lover contre lui. Elena refusait de sceller leur relation par des étiquettes, aspirant simplement à savourer l’instant présent de ce lien unique qui les unissait. Leur connexion différait de ce qu’elle avait connu avec Noah, où tout s’était déroulé naturellement, une amitié proche évoluant vers un amour paisible, facile. Jusqu’à ce que cela ne suffise plus.

Avec Lévi, c’était différent. Les émotions qui embrasaient le cœur d’Elena étaient d’une intensité passionnelle, un feu ardent. Elle n’avait pu résister, se sentant inéluctablement attirée vers lui, comme si une force mystérieuse les liait depuis l’éternité, poussant le temps lui-même à orchestrer leurs retrouvailles.

Elena, le visage contre la peau nue de Lévi, se laissa enivrer par sa douce odeur d’agrumes. Alors qu’elle sentait les battements de son cœur s’accélérer, elle leva la tête vers lui, leurs yeux se rencontrèrent et le monde autour d’eux n’existait plus. Un baiser fut échangé, puis deux et trois, bientôt, ils ne les comptèrent plus. Les doigts de la jeune femme effleuraient le torse de Lévi, tandis que les mains de ce dernier s’étaient posés dans le creux de son dos. Elle sentit une chaleur attiser ses joues, et le désir électriser ses organes. Son envie la poussa à grimper sur les genoux du jeune homme, ce dernier plaçant ses mains sur les cuisses de la brune. Elle embrassa délicatement son cou, s’exaltant d’entendre son souffle s’intensifier.

Il égara, avec délice, ses mains dans les cheveux de la jeune femme, réalisant un souhait présent en lui depuis longtemps.

_ Je peux ? souffla-t-il en posant ses doigts sur le gilet d’Elena qui opina.

Alors, il le fit glisser au sol, dévoilant ses épaules dans un petit débardeur noir. Retirant délicatement une des bretelles, Lévi aventura sa bouche de sa clavicule à la naissance de sa poitrine.

Un bruit sourd résonna dans la pièce voisine, faisant sursauter le couple et les ramenant brusquement à la réalité. Ils se regardèrent un moment, chacun maudissant intérieurement Noah. Puis ensemble, ils rigolèrent de la situation, renforçant un peu plus leur complicité.

— Et si on dormait ? proposa Lévi en souriant. Une grosse journée nous attend demain.

Elena acquiesça d’un signe de tête, déposa un dernier baiser sur les lèvres fines du jeune homme et s’allongea dans le lit, invitant Lévi à la rejoindre. Côte à côte, leurs bras entrelacés, ils s’abandonnèrent à la nuit, qui leur offra un sommeil sans rêves.

***

C’est au cœur d’une forêt près de St Yves où le trio se retrouva le lendemain après-midi. Les arbres centenaires semblaient veiller silencieusement sur les secrets enfouis ici depuis toujours. Un sentier sinueux, envahi par la mousse et les pétales de fleurs éthérées, les guidèrent vers le Bosquet des Souvenirs.

Lorsqu’Elena, Lévi et Noah pénétrèrent dans le bosquet, un léger frémissement dans l’air parut accueillir leur présence. Des murmures indistincts flottaient, comme si les arbres eux-mêmes s’apprêtaient à raconter une histoire. Une clairière baignée de lueur argentée émergea devant eux, révélant un ancien autel de pierre, entourée de fleurs.

À peine eurent-ils le temps de s’interroger sur cet étrange lieu que les premiers échos du passé commencèrent à se manifester. Des images flottantes se matérialisèrent, plongeant les trois compagnons dans des souvenirs. Ceux-ci surgissaient comme des vignettes dansantes, des fragments de vie, celle du père de Lévi.

Les échos du passé persistaient, tissant une toile invisible autour du trio, les emprisonnant dans le récit intime de Morbius Parkes.