Fyctia
Chapitre 13.1
Londres, octobre 2024, présent
Elena Benson ouvrit les yeux et fixa le plafond blanc sur lequel les rayons du soleil dansaient. Son corps était courbaturé, son esprit muet. Elle resta longtemps sur le dos, le regard dans le vague, croyant que, tant qu’elle laisserait le vide en elle, il était encore possible que rien ne se soit passé. Mais quand le sommeil la submergeait de nouveau, elle était envahie par les mêmes images ; le liquide rouge s’imbibant dans le tissu blanc, les yeux bleu océan qui se fermaient, le corps qui s’écrasait brutalement contre le sol.
Noah était mort.
Avec Lévi, ils avaient réussi à s’enfuir, ce dernier les ayant fait sauter jusqu’à son appartement. Il lui avait proposé de se doucher — ce qu’elle avait fait sans discuter — et lui avait laissé sa chambre pour dormir.
Les heures étaient passées, elle avait perdu la notion du temps, mais Elena n’avait pas pu sortir de ce lit. Parfois, elle entendait des bruits en bas, probablement Lévi, mais elle n’avait pas encore pris la peine de regarder via la mezzanine pour le vérifier.
Ce fut son ventre qui criait famine et sa vessie sur le point d’exploser qui la firent sortir du lit. Elena descendit sur la pointe des pieds l’escalier noir en métal, tout en regardant autour d’elle. Elle eut l’impression de découvrir l’appartement de Lévi Parkes pour la première fois. À leur retour de la crypte, il faisait nuit et elle ne se souvenait de rien.
La hauteur sous plafond était d’au moins quatre mètres, le logement était grandiose et comprenait une grande pièce ouverte, où se situait un immense salon et une cuisine toute équipée en bois foncé. Sur le canapé d’angle en velours côtelé couleur rouille trainait un oreiller et deux couvertures, comme si Lévi en avait fait son lit. Au-dessus de la cuisine, en mezzanine, la chambre dans laquelle Elena avait dormi était entourée d’une verrière. Le loft était très lumineux, avec ses imposantes fenêtres qui offraient une vue impressionnante sur les toits de Londres.
Tout ce luxe rappela à Elena à quel point Lévi était devenu une personnalité connue ces dernières années. Il avait réussi à chasser les rumeurs à propos de sa famille lors de la guerre des Ombres, et s’était construit une vie loin de tout ça. La jeune femme comprenait à quel point il était important pour lui d’arrêter les méfaits de son père. Il ne voulait prendre le risque de voir à nouveau le nom des Parkes déshonoré.
Une porte blanche mena Elena Benson à la salle de bain dans laquelle se trouvaient les toilettes. Ici tout était très moderne, blanc et d’une propreté impeccable. Sur un meuble, une pile de vêtements était soigneusement pliée ; des vêtements pour femmes. Lévi avait dû les mettre là pour elle.
Fraîchement douchée et habillée, Elena sorti de la salle de bain en quête de nourriture. Elle se dirigeait vers la cuisine quand un mouvement à l’extérieur attira son attention. Lévi Parkes était sur la grande terrasse, une tasse de thé dans une main et le journal de son père dans l’autre. Assis sur un fauteuil en rotin, il avait les sourcils froncés et semblait perdu dans la contemplation du journal. Elena, ne souhaitant pas le déranger, entreprit de trouver de quoi manger seule. Elle ouvrit le réfrigérateur pour en sortir trois œufs, et chercha de quoi les faire cuire. En voulant sortir une poêle, elle en fit tomber une autre dans un fracas assourdissant.
_ Merde ! Grommela-t-elle en rangeant et refermant rapidement le tiroir de la cuisine.
Quand elle se retourna pour faire face à l’immense plan de travail en bois, Lévi était dans le salon.
_ Installe-toi, je vais m’en occuper.
Elle ne chercha pas à contester et s’assit sur l’un des nombreux tabourets haut en cuir noir tout en le regardant découper quelques champignons puis les faire frire, cuire des œufs sur le plat et du bacon et griller du pain. Ils ne se parlèrent pas, Elena se contenta de l’observer, l’eau à la bouche.
La jeune femme réalisa qu’ils s’étaient, en réalité, très peu parlés depuis leurs retrouvailles. Ils avaient surtout échangé concernant les desseins de Morbius Parkes mais rien de plus. Et en même temps, que pourraient-ils bien se dire ? Elena ne le connaissait pas vraiment. Même si à son arrivée au Château, le courant était bien passé entre eux, leur relation n’avait jamais été plus loin que ça.
Elena le remercia quand il posa une assiette alléchante devant elle. Alors qu'elle dévorait son repas, Lévi fit la vaisselle.
_ Tu t’es douchée, dit-il sans la regarder.
_ Euh, oui. Je me suis permise de mettre les vêtements qui étaient dans la salle de bain.
Elle portait un jean clair, un t-shirt gris et un gilet violet. Tout était parfaitement à sa taille.
_ Tu as bien fait. Ils étaient pour toi.
_ Merci.
Il se tourna vers elle et leurs yeux se croisèrent. Elena déglutit, elle n’aurait pu dire ce que ressentait Lévi à cet instant tant ses yeux étaient indéchiffrables. Pourtant, son regard sur elle la réconfortait. Elle se souvint alors de leur proximité dans la crypte et sentit ses joues s’empourprer. Dans l’obscurité de cet endroit lugubre, cela avait été tout à fait naturel de saisir le jeune homme contre elle ou encore de lui caresser les cheveux. Mais, à la lumière de cette matinée froide et ensoleillée, l’idée de toucher Lévi Parkes lui paraissait complètement insensée.
_ Je nous ai amené chez moi, commença le jeune homme. C’est la première idée qui m’est venue. Mais, rien ne t’oblige à rester.
Il n’y avait aucun reproche dans sa voix.
_ Je n’ai pas trop envie de me retrouver seule.
_ Bien. Tu es la bienvenue tant que tu le veux.
_ Merci Lévi.
Il hocha la tête et se dirigea vers le salon, alors Elena remarqua qu’il boitait.
_ Tu as mal ? demande-t-elle en lui faisant un signe de tête lui montrant sa jambe.
_ Petits souvenirs des vampires, dit-il en grimaçant. Il va me falloir quelques jours pour récupérer.
_ Je pourrais t’aider à te soigner plus vite. Dans ma boutique de fleurs, je vends aussi des herbes médicinales aux propriétés magiques.
Lévi hocha une nouvelle fois la tête.
_ Alors, tu as ta propre boutique de fleurs.
_ Euh…Oui, confirma Elena. Ça fait bientôt deux ans maintenant.
_ C’était l’un de tes rêves.
Elle ne sut que répondre. Comment savait-il cela ? Elle avait le faible souvenir de lui en avoir parlé lors du banquet de bienvenue au Château au moment de leur rencontre, mais comment pouvait-il se le rappeler aujourd’hui ?
_ J’y passerai cet après-midi, dit-elle simplement.
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Catherine Domin
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Siha
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Claire Berthomy
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Il y a un an