Fyctia

Londres, décembre 2019, 5 ans auparavant

Le jour laissait place à la nuit alors que des flocons de neige, petits et légers, se mirent à tomber du ciel, virevoltant dans l’air.

Elena Benson, immobile, regardait le corps inerte devant elle. C’était la première fois qu’elle voyait quelqu’un mourir. Le froid avait séché ses yeux et rendu sa bouche pâteuse. Sa respiration s’était accélérée, ses pensées s’étaient perdues et elle oublia un moment où elle était et ce qu’il s’était passé. Son corps ne lui répondait plus, comme si un serpent invisible s’était glissé autour d’elle, lentement, doucement, entourant ses membres et s'infiltrant à l’intérieur d’elle, toujours plus insidieux, paralysant son cœur.

D’un coup, l’ambiance changea dans la rue. L’atmosphère sinistre laissa place à une agitation silencieuse ; des dizaines de personnes étaient apparues et bougeaient tout autour d’elle et du corps. Certains agitaient une main devant eux en marmonnant des choses qu’Elena n’aurait pu entendre même si elle avait écouté.

Quelqu’un s’approcha d’elle, elle sentit une main entourer son bras avec tendresse. Elle ôta enfin ses yeux du frère de Lévi Parkes, dont elle ne savait même pas le prénom, et les posa sur le visage du professeur Loran.

— Elena, dit-il avec bienveillance. Viens avec moi, je te raccompagne chez toi.

— Je … je n’ai rien pu faire. Je voulais juste lui parler, et il …

— Je sais.

Des larmes coulèrent sur le visage de la jeune femme pour venir s’écraser dans la neige blanche.

— Il m’a attaqué … Je ne sais même pas ce qu’il me voulait.

Le professeur posa ses deux mains sur les épaules d’Elena, s’abaissant légèrement pour mettre ses yeux à hauteur de ceux de la jeune femme.

— Je t’expliquerai tout, mais je vais d’abord avoir besoin de réunir les informations, car moi-même, je suis surpris de ce qu’il s’est passé ce soir. Pour le moment, nous devons nous éloigner d’ici.

Elle acquiesça d’un signe de tête, et suivit le professeur. Après quelques pas, elle se retourna et lança un dernier regard au corps de l’homme qui l’avait attaqué.

— Que vont-ils faire de lui ?

— La Haute Autorité Magique s’en occupe, ne t’inquiète pas.

Les deux s’éloignèrent d’une marche lente, chacun de leurs pas faisant craquer la neige. Une fois dans la rue perpendiculaire, le Professeur Loran dit doucement :

— Nous sommes le soir du réveillon de Noël, je te conseille de rentrer chez toi, de profiter de ta famille pendant les derniers jours de vacances. Et d’ici la rentrée, j’aurai les informations nécessaires.

Elena voulut contester et ouvrit la bouche, mais le Professeur ne la laissa pas parler.

— Je te promets de tout te raconter à ton retour au Château. D’ici là, repose-toi.

Elena rentra chez elle et fut accueillie par ses parents et leur sourire chaleureux, alors elle leur sourit en retour. Que c’était difficile de leur mentir ces derniers mois. Ce soir elle était sur le point de craquer, c’est pour cela qu’elle monta tôt pour se coucher, essayant de ne pas penser à ce qu’il s’était passé pour trouver le sommeil. En vain.

Le reste des vacances permit à Elena de se ressourcer auprès de ses pères. Elle profita de chaque moment, de chaque rire et odeur, les gravant dans sa mémoire pour ne rien oublier. Car elle avait le pressentiment qu’une fois qu’elle parlerait au Professeur Loran, la vie qu’elle connaissait à présent n’existerait plus. Elle sentait planer sur elle une aura incontrôlable d’appréhension et de danger et elle souhaitait ne pas y penser, car elle ne se sentait pas encore prête à l’affronter.