Suelnna La Dernière Invocatrice Chapitre 5 (1/2)

Chapitre 5 (1/2)

— J’ai horreur de cet amphithéâtre, grince Naïa avant de littéralement se jeter sur le banc en pierre.


Aïe.


— Moi j’ai horreur de cette prof, se plaint Alina en lâchant son sac par terre avant de s’asseoir avec distinction.


Moi, Lucie Aziz, 16 ans, est assise dans ce qui ressemble à s’y méprendre à un ancien temple grec avec à ma gauche ce que je devine être une sorte de vampire qui sort en plein jour et à ma droite, une demi-sirène au comportement lunaire.


J’aurai pourtant juré que l’intérieur de cette École était d’inspiration gothique médiéval, mais je n’ai pas les nerfs pour demander pourquoi on passe d’une époque à l’autre en un claquement de porte.


— Et moi je déteste ma vie, me contenté-je de soupirer.


Un rire grave résonne derrière nous. Moqueur et donc signe de mauvais augure malgré la tessiture de la voix, j’ai déjà hâte de voir ce que je vais découvrir si je me retourne. Raison pour laquelle, peut-être, je continue de fixer le vide comme si je n’avais rien entendu.


— Naïa, tu as des feuilles pour moi, pour que je prenne des notes ?


— Des notes ? répète-t-elle, comme si je venais de lui demander quelque chose d’invraisemblable.


— On ne prend pas de notes, intervient Alina.


— Et on fait comment pour réviser les examens ?


— Le seul examen que tu vas passer, c’est l’examen qui va te faire sortir de cette École, ou qui, dans ton cas, va sceller le reste de ton existence dans une institution psychiatrique après que tes pouvoirs t’auront été arrachés, énonce-t-elle platement.


— Mes pouvoirs, oui. Et c’est quoi cette épreuve ?


Alina hausse les épaules.


— Je ne sais pas.


— Personne ne le sait, et c’est différent pour chaque élève, renchérit Naïa.


— C’est sérieux ce délire ?


— T’es pas au bout de tes peines ma grande. C’est ça, l’Invocatrice que le dirlo t’a filée comme colocataire, Naïa ? Je suis impressionné. Encore deux jours et elle se fait manger par une fée avec sa jolie tête d’ange.


C’est qui cet enfoiré condescendant ?


Je me lève et fait volteface, ignorant le ton suppliant de Naïa qui m’implore de garder mon calme. Des yeux sombres comme la nuit, des ailes au plumage brun foncé s’étendant de chaque côté du banc de pierre sur lequel il est affalé, un air arrogant peint sur un visage angulaire à la mâchoire carrée. Son uniforme noir souligne sa taille svelte.


Ils ont donc un corps d’humain ?


Ce mec est la copie miniature et moins colorée du truc en plume qui est aux commandes de cet asile de fous.


Son arcade sourcilière s’abaisse alors qu’il me détaille, traînant un peu plus longtemps sur mon blason, avant d’ancre son regard au mien.


— Bonjour, Lucie Aziz.


Son ton est prétentieux et formel. Tout comme celui du directeur. Son attitude propose un net contraste avec sa manière de s’exprimer. Je le considère vite fait.


— Bonjour, créature pleine de plume numéro deux de la journée.


Naïa produit un son qui me fait hésiter entre un gémissement d’adulation et un gargouillis craintif tandis qu’Alina toussote discrètement et bredouille quelque chose à une telle vitesse que je ne comprends rien. Quant au jeune inconnu, le même sourire que celui que le directeur ourle ses lèvres.


À tout moment je viens de tomber sur le beau gosse intouchable de ce qu’ils appellent le Purgatoire. Voilà notamment une des raisons pourquoi moi, Lucie Aziz, n’ait pas d’amie ou de petit copain.


Pourtant, à mesure que la pièce se remplit, tout le monde évite avec soin de s’asseoir sur la même rangée que lui.


D’accord, peut-être pas le beau gosse, mais plutôt le psychopathe rancunier qui offre des petits poussins au crépuscule en guise de sacrifice ?


— Un jour, finalement, décrète-t-il, me tirant de mes spéculations à son encontre.


— De ? questionné-je.


— Survie.


Il pointe le menton en avant et regarde vers l’estrade.


— Au fait, tu continueras de m’insulter plus tard, Py est là et elle déteste l’indiscipline.


Je retourne et vois… un animal ailé qui nous offre son dos en contemplant une plaque de marbre, la même que j’ai vue dans la salle du directeur. Je plisse les yeux et y discerne mon nom, ainsi que ceux de Naïa et d’Alina.


La longue queue de la créature effectue un mouvement de balancier et est agrémentée d’une touffe de poil à son extrémité.


Non.


— Cette Py est…


La bête prend appui sur ses pattes arrière et nous fait face. Une tête de femme, des ailes.


— C’est quoi ce truc, soufflé-je à moi-même.


— Assis, scande la chose au corps de bête et à la tête de femme en dardant son regard félin sur moi.


Je sens qu’on me tire vers le bas. C’est Alina et Naïa qui chacune, m’indique que je dois m’asseoir. Après un rapide tour d’horizon, je réalise que je suis la seule à être restée debout.


Je m’assieds en sentant l’attention d’une bonne dizaine de créatures tout sauf humaine peser sur moi. La pierre est froide et semble vieille. J’ai l’impression que ma salle de classe est une ruine, et que des créatures dont on ne fait que trouver des statues ont pris vie et font vivre cet endroit.


— Un sphinx, murmure Alina, comme en Égypte, tu vois ?


Ouais, vaguement.


— Quel être, dont la suprématie des ancêtres sur Terre fut jadis mise à mal, voit son plumage s’embellir au printemps de sa vie, sa sagesse grandir tout au long de sa vie, et ses décisions le hanter une fois la nuit tombée ?


La créature sonde les élèves de l’auditoire et Naïa lève son bras, en proie à l’excitation. Les prunelles de la prof s’arrêtent sur notre trio et ont un moment de considération pour Naïa, qui essaye probablement de toucher le plafond vouté avec le bout de ses doigts tendus.


Je pourrais jurer voir les pupilles de la Sphinx se rétracter lorsqu’elles glissent sur moi. L’effort que je déploie pour ne pas m’y soustraire en levant les yeux vers la voute du plafond qui nous surplombe est surhumain.


Merci, Naïa, de tout mon cœur.



Tu as aimé ce chapitre ?

23

23 commentaires

Origami

-

Il y a 4 mois

Lucie est comme téléporter a l’époque grecque, ce Py un des représentant de la mythologie. C’est tout de même important de savoir enfin son age, soit 16 ans pour Lucie. Naia attire évidemment tout les regards avec sa joie de vivre, et permets une pause temporelle à Lucie. Naia est un personnage intéressant, tandis que Lucie est plutôt froussarde. Le meilleur dans ce chapitre, c’est cet intriguant et arrogant jeune homme ailé, qui semble déjà connaître Lucie. Peut être même la connaît il plus qu’elle même, si secrète. Tu poses les bases d’une nouvelle relation, pas forcément saine mais ça redéploye l’histoire car après l’épisode du blond, je me demandais comment elle allait l’oublier.

Livia Tournois

-

Il y a 5 mois

On a une transition rapide vers la salle de classe et quelques explications sur l'examen final, mais on ne sait pas trop ce que Lucie est censé apprendre, ni étudier dans cette école. Elle se met dans le rang sans se rebeller, sans se demander pourquoi elle est là, pourquoi elle doit aller en classe et ce qu'il se passera si elle refuse de coopérer.

Suelnna

-

Il y a 5 mois

Ce qui arrivera si elle refuse de coopérer, elle l'a vu quand elle a été emmenée par les sirènes. Tu te doutes bien que noyer les élèves n'est pas une entrée conforme. C'est l'entrée des adolescents qui ne veulent pas suivre de leur plein gré les sirènes. C'est là première des punitions. La deuxième c'est l'épreuve de la cascade, enfin, c'est particulier comme bahut.

Mary Lev

-

Il y a 5 mois

Une énigme évidemment ! Un hibou ?

Suelnna

-

Il y a 5 mois

Hmm, nop. C'est pas la perruche, non plus.

Gottesmann Pascal

-

Il y a 5 mois

C'est vraiment impressionnant et on comprend que Lucie soit effrayée. Et j'attends la réponse à l'énigme du Sphinx.
Vous êtes hors connexion. Certaines actions sont désactivées.

Cookies

Nous utilisons des cookies d’origine et des cookies tiers. Ces cookies sont destinés à vous offrir une navigation optimisée sur ce site web et de nous donner un aperçu de son utilisation, en vue de l’amélioration des services que nous offrons. En poursuivant votre navigation, nous considérons que vous acceptez l’usage des cookies.