Zoé Sonobe (zizogoto) La confiance Rennes Chapitre 7-2

Chapitre 7-2

Bien que timide, je ne peux m’empêcher de m’avancer un peu dans son salon au pas de loup afin d’observer un peu plus en détail la personne qu’il est. Ne dit-on pas toujours que la décoration intérieure reflète la personnalité de celui ou celle qui l’a faite ? Près de son sofa, une magnifique bibliothèque blanche, posée transversalement au mur et donc perpendiculairement au canapé qui a l’air si confortable. Il possède de nombreux livres, notamment de la fantaisie, mais aussi quelques livres d’histoire. À vu d’œil, étant friande de bouquins, s’il les a achetés neufs, il y en a au moins pour plus de 1 500 € rien que dans cette bibliothèque en forme d’escaliers. Alors que je suis toujours autant plongée dans les différents titres que je déchiffre sur les tranches, les pas de Thomas résonnent dans la pièce. Je me retourne et me mords la lèvre inférieure en faisant une petite moue.


— J-Je suis désolée, je ne voulais… pas fouiller, je regardai juste et…


— Ne t’en fais pas ! Ce n’est rien, tu peux regarder autant que tu le souhaites et si un livre te donne envie, tu peux me l’emprunter, enfin, si tu veux, me propose-t-il gentiment.


— Oh merci, mais ça ira, enfin peut-être une prochaine fois. Je ne voulais vraiment pas être aussi indiscrète.


— Tu sais, tu n’es pas obligée de t’excuser tout le temps, tu n’as rien fait de mal et je ne t’ai fait aucun reproche, alors tu n’as aucune raison de le faire. Tu peux te détendre avec moi, je ne suis pas là pour te mettre la pression.


— C’est vraiment gentil, merci, réponds-je en rougissant légèrement.


— Si tu es prête, on peut y aller, je pensais t’emmener dans un petit restaurant, pas très loin de République, qu’en penses-tu ? Il s’agit d’une pizzeria, alors si ce n’est pas trop ton truc, je peux très bien modifier le plan de la soirée !


— Non ! C’est parfait, j’aime beaucoup ce genre d’endroit et je raffole des bonnes pizzas.


Il sourit et récupère sa veste. Il éteint toutes les lumières des pièces allumées et me laisse sortir de chez lui avant de fermer sa porte à clef.


— Très bien, alors, allons-y ! m’encourage-t-il à le suivre.


Nous marchons l’un à côté de l’autre sur les trottoirs de Villejean jusqu’au métro du même nom. Nous descendons les marches en riant, suite à l’une de ses blagues qui n’a pu m’empêcher d’esquisser plus qu’un sourire. Nous entrons dans la rame et nous nous accrochons à la même barre. Nous continuons de discuter de ses folies boulangères et de toutes les gourmandises que nous aimons. J’ai pu apprendre qu’il aimait beaucoup les choco-suisses et qu’il détestait les pains aux raisins d’une force presque indescriptible. Arrivés à l’arrêt République, il me fait signe de descendre et m’accompagne jusqu’aux escalators en se moquant de mon goût irréfutable pour la baguette viennoise nature. En effet, j’en raffole tellement que j’ai eu une période, pendant mes études, où je ne mangeais que ça dans une journée. Puis, nous passons les portillons et reprenons un escalator, celui de gauche, se rapprochant des distributeurs automatiques de billets de La Poste. Le vent reste frais et même si ma veste me suffit pour ne pas avoir froid au bras, je ne peux pas en dire autant de mes mains, qui sont presque aussi gelées qu’en hiver. Me voyant frotter les mains, Thomas me propose de prendre ma main pour la réchauffer. Il y a bien longtemps que je n’ai pas tenté de tel rapprochement avec un homme — sans compter Dono, qui est bien plus qu’un meilleur ami pour moi — et bien que hésitante, j’accepte son offre et glisse ma main frêle dans la sienne, plus grande, chaude et réconfortante.


Nous continuons notre chemin, passant devant l’arrêt Saint-Germain de la ligne B et remontant vers la Rue Derval. Alors que nous marchions tranquillement, Thomas s’arrête devant une boutique, en train de fermer : « Saint-Germain des Fleurs ». Il me demande si je peux l’attendre là et entre dans le magasin. Il semble négocier quelque chose avec la jeune femme brune armée d’un balai. Enfin, après quelques brèves minutes, il revient dehors avec, à la main, un joli bouquet de fleurs sur les tons rouges et roses.


— Accepterais-tu cet humble présent pour cette soirée sans ambiguïté ? chantonne-t-il tout sourire.


Je ris et accepte son bouquet, les joues roses. Nous reprenons alors notre chemin en continuant de remonter la rue, puis nous tournons à droite et un peu avant la prochaine intersection, il s’arrête et me présente le restaurant où nous dînerons ce soir : l’« Italia Trattoria ». Alors que la fleuriste venait de fermer boutique, la pizzeria vient à peine de l’ouvrir. Thomas m’attire à l’intérieur du restaurant et annonce sa réservation au nom de Leblanc. Le serveur, très aimable, nous présente une table, en face du bar sur lequel un homme et une femme, tous deux, ayant l’air adorables, préparent les plats commandés. Nous nous installons et le serveur nous apporte une carte chacun avant de repartir.


— J’ai l’impression que nous allons être aux premières loges pour admirer le magnifique spectacle de le préparation de notre dîner, débuté-je la conversation.


— Si la place ne te plaît pas, je peux demander à ce que l’on soit mis autre part, me propose-t-il gentiment.


— Non, non ! Pas du tout, vraiment, je suis plus que conquise par cette table. Je trouve l’ambiance très chaleureuse et nous ne risquons pas d’avoir froid avec les fours près de nous.


— Parfait ! Allez, vas-y, je te laisse choisir un apéritif si tu le souhaites et le plat ou l’entrée que tu souhaites commander.


Je plonge mon nez dans les pages de la carte et me surprends à avoir bien plus faim que je ne le pensais. Cela fait bien longtemps que je n’ai pas mangé une vraie pizza et encore plus longtemps que l’on me propose de venir dîner. Je frotte mon pouce sur les ongles de la même main, tout en tenant la carte de l’autre. Je ne peux m’autoriser à un tel écart, je le sais bien. Je n’ai pas oublié et je ne compte pas revenir à cette période. Mais, si, en effet, je décide de le rejoindre, je n’ai pas intérêt à le décevoir.


— Je pense que ça ira pour l’entrée et je pense prendre la pizza au saumon, c’est ma préférée et j’aime bien goûter cette pizza dans chaque pizzeria où je vais, et ce, depuis que je suis entrée dans l’âge ingrat. Et toi, que prendras-tu ?


— Je pensais me prendre un petit kir breton et la pizza aux mets AOP, elle me paraît bien plus succulente que les autres. Tu veux prendre un apéritif ?


— Oh non, ça ira, je ne suis pas très alcool, depuis… le métro…


— Je comprends, pas de soucis.


Il est si simple. Je n’ai pas besoin d’être une autre personne, ou de me forcer à en être une autre. Un peu comme Donovan, sauf que lui, il sait par quoi je suis passée et il me connaît depuis longtemps. Je ne pensais pas qu’il pouvait exister d’autres hommes comme lui. Il n’a pas insisté sur l’apéritif et je lui en suis vraiment reconnaissante. Lorsque Mike m’emmenait au restaurant, il choisissait toujours ce que j’allais prendre, d’une manière ou une autre.



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