Suelnna La Cité du désert La Cité du désert

La Cité du désert

Le trajet dura une journée entière et en présence de Kissah, Kahina n’eut pas la témérité dont elle avait fait preuve quelques jours auparavant. Elle se garda de poser les questions qui lui venaient à l’esprit. De plus, Zahrédine lui avait bien fait comprendre qu’il ne s’était que trop avancé dans ses révélations.


Le paysage qu’offrait le désert restait inchangé depuis que Kahina avait quitté Ifrin, mais à ses yeux, sa beauté était désormais bien différente. Cette magnificence, qu’elle lui attribua jadis alors avec candeur, était devenue aussi chaleureuse que dangereuse, renfermant en son sein des créatures dont l’existence réelle demeurait insoupçonnée de l’esprit des hommes, qui les prenaient pour des légendes à destination de l’éducation de leur progéniture.

C’est en soirée qu’ils arrivèrent et se retrouvèrent, comme l’avait plus ou moins prédit Kahina non sans une pointe de déception, en présence de quelques palmiers, d’autant de chèvres, de chevaux et de dromadaires. Elle descendit de sa monture aux côtés de Zahrédine et le taquina :


« Elle est où, la reine ? »


Zahrédine considéra un instant la jeune femme, avant de se pencher et de murmurer à son intention :


« Tu la verras demain, il nous reste un petit bout de chemin à parcourir. En attendant, admire avec attention ces deux pics que tu vois là, devant nous. Et surtout repose-toi, des épreuves t’attendent. Sois prête peu avant…


— L’aube ? Oui, Zahrédine… »


Il la considéra de nouveau et cette fois sévèrement, puis s’éloigna en la laissant sous la surveillance de Merak. Il est vrai que les deux imposants pics qui se dressaient à l’horizon étaient remarquables si bien que même à cette distance, ils semblaient incroyablement hauts et lui faisaient l’effet de deux hautes tours de pierre surplombant le désert. Cependant, Kahina n’arrivait à leur prêter aucune autre particularité visuelle et se tourna vers Merak dans l’espoir d’obtenir plus d’informations.


C’était peine perdue.


Ce dernier demeurait distant et froid avec elle depuis les évènements d’Urduni. De plus, le fait de savoir qu’il était le descendant d’une de ces choses qui, la nuit tombée, errent dans les déserts à la recherche de cadavres à dévorer ou d’hommes à attirer dans leur repère la répugnait, malgré elle. Elle ne pouvait se résoudre à seulement considérer la part humaine de la condition du jeune guerrier.


Lassée, mais aussi pressée de potentiellement revoir sa sœur, elle décida de partir se coucher de bonne heure.


C’est après une courte nuit de sommeil, à son impression du moins, qu’elle sortit de sa tente. Merak l’attendait et l’invita à le suivre sans un mot. Il semblait avoir troqué ses apparats de guerriers contre une tenue plus quotidienne et sobre, à son image en somme : Une tunique bleue ouverte sur les côtés, certainement pour lui permettre de monter à cheval et par-dessus, un burnous ample de couleur gris foncé. Il ne portait ni arme ni chèche, il était chez lui.

Il l’amena devant Zahrédine et Loeh, déjà en selle. Eux aussi avaient échangé leur traditionnelle tenue de guerrier pour deux magnifiques tuniques couleur pourpres, recouvertes par un manteau ample d’un blanc immaculé, aux bordures subtilement brodées de fils dorés. La différence notable entre les deux manteaux de chefs était que celui de Zahrédine semblait plus long et plus largement brodé. Ni l’un ni l’autre ne portaient de chèche non plus.

Une fois Kahina en selle, Zahrédine avança en tête de file et lui fit signe de le rejoindre avec sa monture. Ils avançaient tous les deux au pas en direction des deux fameux pics lorsque Zahrédine prit la parole, d’une voix calme, mais imposante :

« Continue de fixer l’horizon qui s’offre à toi, Kahina. Pendant ce temps, récite-moi ce que tu sais à propos de la légende de la cité oubliée, s’il te plait.»


Kahina s'exécuta, son âme de conteuse prenant le dessus sur ses interrogations du moment pour réciter la légende qui fut autrefois sa préférée :


Au cœur du désert

Entre les montagnes de pierres

Se cache une cité oubliée

Qui malgré ses richesses inégalées

Fût jadis délaissée pour l'éternité


Zahrédine parut satisfait, pourquoi voulait-il qu’elle lui récite cette légende, elle savait qu’il la connaissait.


« Tu connais la suite ? »


Elle détourna son attention des pics pour le regarder :


« Quelle suite ? »


Pour toute réponse et avec un large sourire, il fit un signe de tête en direction des pics, au milieu desquels et sur lesquels, un paysage se formait au fur et à mesure que l’aube émergeait :


Afin que sa beauté soit préservée

De la cupidité des esprits bien mal intentionnés

Mais aussi et surtout, de celle de l’humanité.


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Merci à tous !

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