De Ridder L'Amour ne connaît pas la Mort 35

35

J’ai une lettre à rédiger et à adresser à Henri. Je m’installe dans la bibliothèque. Je souhaite que toute cette violence cesse. Je ne me suis pas battue avec son spectre d’oncle pour lutter maintenant contre lui. Je montre le message à Gabriel qui acquiesce. Cependant, il ne semble pas convaincu.

Je m’allonge sur la méridienne. Gabriel s’assoit tout contre moi. Je le détaille. A mes yeux, il est parfait. Je me demande ce qu’il apprécie en moi. Que peut-il tant aimer ? Je me trouve un peu insignifiante et même banale. Je ne suis pas si différente des autre filles de mon âge. Je ferme les yeux et m’endors.


"- Je suis sincèrement désolé pour tout à l’heure. Je ne voulais pas te faire de peine.

Gabriel a l’air grave et très sérieux. Il me tient les épaules. Je baisse les yeux en me remémorant le chagrin qui m’a submergé un peu plus tôt.

- Ne refais plus jamais ça. Tu m’entends. Je ne veux pas que tu meures.

J’ai conscience d’avoir été excessive dans mon comportement. Je m’en veux un peu.

- Gabriel, ne t’éclipse plus de cette façon.

Il hoche la tête d’un air entendu.

- Il a de la chance que je ne sois pas en vie. C’est lui qui serait mort à l’heure qu’il est.

- Ne parle pas de malheur. Je serais hantée par Henri et il serait capable de me poursuivre jusque dans ma baignoire.

Cette idée nous fait beaucoup rire. Je me cale contre lui. Son étreinte est réconfortante. Je l’interroge.

- Qu’est-ce qui t’attire chez moi ? Pourquoi moi ?

- Tout me séduit en toi. Absolument tout. Et toi, qu’aimes-tu tant en moi ? Moi, qui ne suis qu’un simple fantôme.

En prononçant ces paroles, Gabriel sourit, de ce sourire enfantin qui me fait craquer. Je lui fais remarquer en lui caressant délicatement les lèvres.

- Eh bien, pour commencer, il y a ça. Il y a ceci également.

Je lui énumère en montrant ses yeux.

- Et puis, cela.

En lui touchant les cheveux. Mon cœur se met à battre très vite. Il me fait littéralement fondre.

- Ton cœur s’emballerait-il ?

Il rit. Je plisse les yeux, suspicieuse.

- Ce n’est pas la première fois que tu me le fais remarquer. Ne me dis pas que tu peux sentir les battements de mon cœur ?

- Je peux tout ressentir venant de toi.

Cela me met un peu mal à l’aise. J’espère qu’il n’a pas accès à chacune de mes pensées. Je me mords la lèvre pour ne pas éclater de rire. Je me plains faussement.

- Ce n’est pas juste !

- Oh ! Et moi qui croyais que tu pouvais voir à travers moi !

- Ce n’est pas amusant, dis-je rieuse. Et ce n’est pas pareil. Tu es un fantôme.

A cette pensée, je retrouve mon sérieux. Je m’allonge totalement sur le sol. Gabriel m’imite mais relève sa tête dans sa main, soutenue par son coude. Il m’interroge encore.

- Qu’est-ce qui te plaît d’autre en moi ?

J’éclate de rire.

- Ce n’est pas du jeu. Tu n’as pas répondu à toutes mes questions.

Devant sa mine enjouée, je poursuis lentement, tout en lui caressant les cheveux :

- Bon, d’accord ! J’apprécie… Non, j’adore… Oui c’est cela ! J’adore tes poèmes, tes dessins, ta présence, lorsque tu me tiens la main ou lorsque tu m’invites à danser. J’aime cela aussi.

Je me redresse pour poser un pieux baiser sur ses lèvres.

- Moi aussi, je trouve cela exquis, chuchote Gabriel.

Il rapproche davantage son visage du mien. Nos lèvres se rejoignent dans un doux bisou, plus long que le premier.

- C’est même délicieux, dit-il en s’écartant légèrement.

Et il m’embrasse de nouveau, mais cette fois-ci, nos langues s’entremêlent durant un long moment.

- C’est envoûtant et divin.

- Chut !

Je l’attire encore plus contre moi. Notre étreinte s’éternise. Je suis à bout de souffle mais j’en veux davantage. Une irrésistible envie s’est créée en moi. Je laisse mes mains descendre doucement le long des boutons de sa chemise et les ouvre un à un. Mes mains se mettent à trembler.

Gabriel plonge ses yeux dans les miens. Il me saisit une de mes mains et la pose sur son cœur. Je me relève brusquement tout en laissant ma main en place.

- Ton cœur ! Il bat !

Gabriel sourit.

- Eh oui, j’en ai un, me répond-il taquin.

- Mais tu es mort.

Les mots m’échappent maladroitement. Je regrette de les avoir prononcés. Je baisse les yeux, désolée. Gabriel me prend le menton entre ses doigts. Il semble plus amusé que contrarié.

- J’ai toujours eu un cœur. Et aujourd’hui, il bat pour toi.

Il est adorable et irrésistible. Je lui caresse la joue.

- Je ne veux pas te perdre. Jamais !

Il passe ses mains dans mon dos et descend lentement la fermeture de ma robe. Tout mon corps s’embrase. Notre étreinte est intense et passionnée. "


Lorsque j’ouvre les yeux, la lumière a décliné dans la bibliothèque. Cela crée une ambiance tamisée. Gabriel s’agenouille à mes pieds. Il est irrésistible. Est-il possible d’aimer comme s’il n’y a plus que cela qui compte ?



Le lendemain, ma déception est immense, non pas de voir Monsieur Lächer, mais de la présence de sa femme. Ils m’apportent un autre panier garni. Je leur assure que ce n’est pas nécessaire et que je vais bien. Bien entendu, Madame Lächer prend la parole.

- C’est un terrible malentendu. Henri n’est pas un garçon violent. C’est un jeune homme bien sous tous rapports. Il a dû se passer quelque chose de fâcheux. Il ne s’emporte jamais de cette façon. Mélanie, peut-être l’avez-vous provoqué sans vous en rendre compte ?

- Cela suffit, la coupe Monsieur Lächer. Henri s’est jeté sur Mélanie sans aucune raison.

L’intervention de son mari, d’habitude si calme et en retrait, surprend madame Lächer. Je ne lui laisse pas le temps d’intervenir.

- Je vous assure, Madame Lächer, que je n’ai rien fait qui puisse mettre en colère Henri. En aucun cas…

Mais elle me coupe, irritée.

- Si ! Depuis le premier jour où nous nous sommes rencontrés, vous l’avez rejeté et vous nous avez très largement dédaignés. Vous affichez une certaine suffisance.

Je suis outrée. Ma grand-mère et mon père tout autant. Mais Madame Lächer ne leur donne pas l’occasion d’intervenir. Elle pointe un doigt accusateur dans ma direction.

- Osez me dire le contraire ! C’est bien ce que je pensais. Vous auriez pu…

Cette fois, c’est moi qui l’interromps.

- Quoi ? Etre plus gentille ? On ne se connait même pas et vous nous voyez déjà mariés. Vous l’avez encouragé dans cette voie sans prendre la peine d’apprendre qui je suis ou de savoir ce que je désire. Lors de notre premier échange, Henri m’a tout de suite parlé de mariage comme si mon sort n’avait pas d’importance.

- Quoi ? Vous avez dit à Henri qu’il épouserait Mademoiselle Schöner ? Pourquoi avez-vous fait cela ? demande son mari, outré.

- Et surtout de quel droit ? ajoute ma grand-mère.

Mais Madame Lächer l’ignore et répond à son mari.

- La famille Schöner disposait d’une excellente réputation et Henri a le droit de s’unir à une fille de bonne famille. Mais je suppose que Mélanie ne trouve pas notre famille assez convenable pour elle ?

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