Fyctia
Chapitre VI 2ème partie
Une fois la porte enfin ouverte, je peux reconnaitre au moins que la chaleur intérieure rend l'endroit accueillant. Nulle décoration outrageusement m'as-tu-vu, mais plutôt un confort rustique et cosy de chalet propre à Aspen. Je traîne ma grande valise que j'abandonne près de la table basse et balance ma veste sur le canapé d'angle avant de m'y affaler. J'allume l'écran plat, zappe frénétiquement de chaine en chaine et me laisse gagner pas la fatigue.
Je sursaute au contact d'une main sur mon épaule qui me secoue doucement.
— Désolé, Auxane, je ne voulais pas te faire peur, me gratifie d'un sourire navré mon beau-frère.
Les yeux ensommeillés, je perçois la silhouette de ma sœur qui danse d'un pied sur l'autre derrière lui.
— Putain quel réveil, j'aurais pu mourir d'une crise cardiaque, craché-je.
Lorelei ne me laissa pas finir ma phrase qu'elle se blottit contre moi mettant fin à ma complainte. Je sens ses épaules tressaillir et un petit hoquet s'échappe de sa gorge trahissant un sanglot.
— Ne me dis pas que tu pleures ! couiné-je.
— Quoi, non, euh, désolée, c'est juste que tu m'as tellement manqué...
— Je te rappelle que l'on s'est vu le mois dernier, tu es vraiment bizarre en ce moment, soufflé-je en tapotant maladroitement ses cheveux qui me chatouillent le nez.
Même si j'ai toujours été très proche de ma sœur, le passage à nos vies d'adulte respective nous a un peu éloignés. Je me suis marié et consacré pleinement à ma peinture quand de son côté elle finissait ses études d'architecte, rencontrait l'amour de sa vie et achevait ainsi toute possibilité de carrière en ne se dédiant plus qu'à son couple. Choix d'existence que je ne comprends pas, mais que somme toute, je respecte, après tout, chacun peut bien faire ce qu'il veut. Ce qui me dérange cependant, c'est tout cet élan de mièvrerie depuis que mon mariage a volé en éclat. Les gens n'ont plus qu'une profonde pitié au fond des yeux lorsqu'ils me font face. Chaque regard de réconfort nourrit la colère bouillonnante que je garde au tréfonds de mes tripes.
— Viens chérie, laissons ta sœur se reposer un peu, intervient mon beau-frère en la saisissant par les épaules. Elle atterrit d'un long vol, elle doit être claquée. Auxane, je te souhaite la bienvenue, tu es ici chez toi, nous t'avons réservé une des chambres du premier étage, tu n'as qu'a choisir celle qui tu préfères, mon frère prendra celle qui reste. Comme on dit premier arrivé, premier servie, rit-il.
À l'évocation de ce dernier, je croise le regard de ma sœur qui grimace une excuse silencieuse. Si je ne connais pas Alexandre Sander personnellement, j'en connais la réputation. C'est dans son cabinet que ma sœur a effectué ses stages d'entreprise et ainsi rencontré l'élu de son cœur, mais elle m'a dépeint un tableau que je n'aurais sûrement pas envie de peindre de son maître de stage. Arrogant, imbu de sa personne, narcissique, prétentieux, bref une liste qui laisse rêveuse. Je suis furieuse d'avoir à le rencontrer dans ces conditions, furieuse d'avoir à le rencontrer tout court et furieuse contre la terre entière ! Agacée, je me lève toisant mes hôtes puis prends la direction de l'escalier de bois les nerfs à vif.
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