Fyctia
Chapitre 11 : Coupable !
A Paris,
Dans les jours qui suivirent l’hospitalisation de Martin, Lily se fit très présente, les infirmières pensaient que la jeune fille en pinçait un peu pour lui, car il était plutôt beau gosse. Mais la présence de Lily n’avait rien à voir avec le physique de Martin, elle percevait qu’elle devait discuter avec lui, qu’elle devait lui ouvrir les yeux sur la protection des animaux.
Alors que Martin se promenait dans le parc, Lily le rejoignit, elle voulait lui parler de son blog :
- Salut Martin, tu vas bien ? Est-ce que tu veux lire mon nouvel article ? J’y parle de la déforestation en Indonésie, pour planter à la place de la forêt de palmier à huile. Ce qui est catastrophique pour les orangs outans, ils en meurent plus de vingt-cinq par jour !
Martin se demandait pourquoi Lily le sollicitait autant, lui qui n’aimait pas avoir de la compagnie, encore moins celles des enfants. Là, il était servi !
Pourtant il n’osait pas demander à Lily de le laisser tranquille, il avait de la peine de la savoir malade. Même s'il continuait à suivre l’évolution de la bourse, ce qu’il faisait en catimini dans le dos de Rose, si l’infirmière découvrait qu’il s’exposait à du stress inutile, il aurait eu droit à d'interminable sermons.
Il était pour autant sensible aux propos de Lily, il se dit qu’au fond il n’était pas si indifférent que cela, et que la situation le touchait bien d'avantage qu'il ne voulait bien l'admettre.
- Allez, fais-moi voir cet article. Après plusieurs minutes de lecture, Martin rendit son papier à Lily. C’est très bien écrit, tu es claire dans tes propos et ce que tu racontes est édifiant, je ne savais pas que les orangs-outans étaient menacés d’extinction, car ils ne trouvent plus de quoi se nourrir en quantité suffisante à cause de la disparition de leur habitat.
- Je crois qu’il y a beaucoup de choses que tu ne sais pas, tu as vécu déconnecté de la "vraie vie". Lily prononça ces mots en dessinant des guillemets avec ses doigts.
Désarçonné par les propos de Lily, Martin ne répondit pas. Comment une gamine de son âge pouvait systématiquement le toucher là où ça fait mal ?
Il avait toutefois du mal à admettre qu’elle avait raison. Mais il avait vécu ces quinze dernières années comme hors du temps, au rythme du CAC40 et des opérations financières, à l’affut des fluctuations boursières. Alors oui, il avait vécu loin des relations humaines, loin de la nature, loin des gens. En effet loin de la "vraie vie", alors le temps était surement venu de s’y reconnecter.
A peine, eut-elle prononcé ces mots que Lily prévient Martin qu’elle allait poster son article sur son blog et qu’elle enregistrerait un podcast sur le sujet, elle reviendrait le voir dans l’après-midi.
L’article fit cogiter Martin un moment, cependant il décida tout de même de passer à autre chose. Il voulut consulter l’actualité pour être informer de ce qui se passait de par le monde.
Mais rapidement il fut agacé ! Tous les sujets lui paraissaient futiles, superficiels et sans profondeur !
Décidément les préoccupations des gens semblaient être la vie des influenceurs, la météo et comment s’acheter le smartphone dernier cri. Fatigué par tout cela, il décida de se reposer un moment. Sa sieste fut de courte durée, des pensées l’assaillaient ! Tiraillé, entre la vie qu'il connaissait et les prises de conscience qu’il vivait aux travers des partages de Lily. Il relut l’article et se dit qu’il pouvait surement contribuer pour à cette noble cause.
Il chercha donc sur le net pour trouver comment il pouvait apporter son aide. Comme apaisées ses cogitations cessèrent peu à peu. Il eut une idée qu'il estima satisfaisante, et qui espérait-il redonnerait le sourire à Lily dans quelques jours.
Il voulait aussi se renseigner concernant Rose, Alors qu’il allait sortir de sa chambre, il avait surpris une de ses conversations téléphonique, elle était en plein échange avec son banquier. Son compte était dans le rouge ! Situation, qu'elle justifiait par l’absence de paiement de la pension alimentaire par son ex. Depuis plusieurs mois il ne la versait plus pour leurs deux filles. Et bien entendu, il faudrait le forcer à payer avec un passage au tribunal !
Elle n’avait ni les moyens, ni le temps ni même de l’énergie à dépenser pour ce mec qui n’avait jamais pris ses responsabilités. Elle était passée infirmière uniquement de jour, afin d'avoir des horaires lui permettant de s’occuper de ses filles.
Le coup avait été rude, quand il l’avait abandonné avec leurs petites en bas âge, pour convoler avec une femme beaucoup plus jeune.
Mais elle n’avait pas eu le temps de s’apitoyer sur son sort, car elle devait tout gérer et surtout garder la tête haute pour les filles, ce qui en quelque sorte lui avait permis de ne pas sombrer dans la déprime…
Mais là, la situation devenait critique et hormis prendre un second job, elle ne voyait pas d'autre solution. Elle rangea son téléphone dans sa blouse, essuya une larme sur sa joue. Et quand elle vit Martin, égal à elle-même, elle lui adressa un sourire, ce sourire et cette bonne humeur qui ne la quittaient jamais.
Il réalisa à quel point, il avait été déconnecté de la réalité de la vie, durant cette dernière décennie. La montre qu’il portait au poignet devait peut être représenter deux ans de salaire, pour Rose. Montre qui au final, quel que fut son prix, donnait l’heure comme n’importe quelle autre !
Perché, dans sa tour d’affaires, il avait été à mille lieux de ces drames qui se déroulaient pourtant à côté de lui ! Lui avec sa vie dorée, faite de bénéfices, et d’artifices, il avait été épargné ! Enfin en apparence car s’il faisait maintenant le bilan à trente-huit ans il se retrouvait seul, sans enfant, sans amis. Les connaissances qu’il côtoyait dans le cadre de son boulot, n’avaient finalement pris aucune nouvelle de lui, depuis qu’il était ici, hormis son supérieur et uniquement pour prévoir son retour prochain dans la salle de marché.
Cette nuit-là, fut plutôt agitée, il rêva qu’il passait devant un tribunal pour de nombreux chefs d'accusations !
Le juge prenait la parole :
- Accusé Beaumont, levez-vous ! Pour les faits qui vous sont reprochés, vous encourez la prison à perpétuité. Pour rappel, les chefs d'accusations sont les suivants : Responsable de la maladie de la jeune Lily. Non-assistance à personne en danger en laissant Rose et ses filles se retrouver à la rue. Et enfin la mort de nombreux animaux par votre contribution à la destruction de leurs habitats en augmentant les bénéfices de sociétés peu scrupuleuses.
Il se réveilla en sursaut au moment où je juge assenait le coup de marteau pour valider le verdict : coupable !
Il lui fallut quelques secondes pour recouvrer ses esprits, ce rêve fut comme un électrochoc.
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