Fyctia
II- Lune
Les yeux bleus foncés de Lune transpercèrent la chambre quand il se réveilla. La grande pièce était dans la pénombre, les rideaux ne libéraient qu’une mince rai de lumière provenant du satellite naturel.
Lune avait chaud, il transpirait et était redressé sur son lit. Ses pensées divaguaient entre la réalité et les rêves, une fois de plus, le jeune homme avait fait un cauchemar. Tout le monde savait que ces sombres rêves pouvaient vous glacer les entrailles en moins de deux. Mais pour Lune, cela était totalement différent, il ne ressentait rien, à peine un petit frisson. Pour lui, un cauchemar n'était autre qu'un épisode de plus dans les centaines d'autres qu'il avait déjà rêvé.
Le jeune homme tourna la tête vers son réveil. Cinq heures dix. Lune pensa qu'il valait mieux se lever maintenant. Il se mouva tranquillement et pris une bonne douche chaude comme il les aimait. Il se badigeonna de son shampoing à la vanille de Madagascar puis il entreprit de s'habiller. Un costume attendait sagement sur un cintre dans sa penderie.
Une fois vêtu, Lune alla s'asseoir à la grande table en chêne noir qui dominait la pièce à vivre. Les volets étaient déjà repliés, une douce lumière dorée éclairait la grande salle. Tout ici respirait l'opulence et la richesse.
Les murs d'un blanc immaculé trahissaient une propreté implacable du lieu ; les étagères, du même matériau que la table, supportaient des souvenirs de nombreux voyages aux quatre coins du monde et les somptueux tableaux et sculptures de maître donnaient un cachet aseptisé à la pièce. Tout objet avait sa place, rien ne dépassait, rien n'était posé au hasard. Lune réprouvait cet appartement qui lui était attribué, pour le jeune homme, il n'y avait aucune créativité que prônaient ses paternels.
Son rêve aurait été d'avoir une petite maisonnette comme celle d'Akos dans Marquer les ombres.*1 La lecture était son pêché mignon ; Lune aimait lire des livres avec de belles histoires d'amour à l'eau de roses ou des histoires fantastiques avec de la magie, avec des créatures surnaturelles. Mais son milieu de vie ne laissait peu de place à l'imagination d'un enfant de sept ans.
Lune sorti de son appartement d'une démarche lasse, son visage démontrait une grande fatigue. Vivre son train quotidien n'était pas de tout repos, le jeune homme était chef de direction des projets chez ArtQuiss. Aujourd'hui il devait s'occuper des nouvelles recrues.
Dans l'ascenseur typiquement parisien, un assistant vint lui remettre les dossiers des futurs promus. Lune le remercia et plongea ses pensées sur les feuilles.
Il y avait neuf hommes et onze femmes entre vingt-deux et trente-quatre ans. Le cadre prit note de l'âge de la plus jeune recrue, c'était assez rare d'avoir des artistes de cette âge dans l'entreprise. Il entreprit de lire sa fiche de renseignement.
Nom : Léonore
Prénom : Soleil
Age : 22 ans
Etudes : aucune
Puis s'en suivit plusieurs photographies de ses travaux. Lune chercha un portrait de l'artiste mais il n'y en avait point. C'était étrange pensa alors le jeune homme. Mais ce qui l'intrigua le plus était son prénom, Soleil. C'était original, mais en plus, le soleil était l'opposé de la lune. Dans l’esprit du jeune homme, cette femme était son opposé. Ce détail le chiffonna car il voulait voir son visage à tout prix.
Le jeune homme sorti de l'hôtel particulier de sa famille. L'odeur de la pollution mêlée aux effluves végétales du fleuriste d'en face lui assagi les narines. Il huma l'air parisien tout en fermant les yeux. Le cadre était indécis, d'une part, il voulait quitter la région pour se ressourcer dans un milieu calme et sans pollution, et d'une autre, il serait mort de ne plus faire ses ballades sur les quais de la Seine tous les soirs.
Lune pris le métro pour se rendre à son lieu de travail. A partir de Saint-Germain-des-Prés, il emprunta la ligne quatre et descendit à la station Cité. Le siège social se situait sur l’île Saint Louis. ArtQuiss n'était pas une entreprise comme les autres. Lors de l'achat de l'immeuble, il avait été décidé de ne pas toucher aux façades et depuis, seule une petite pancarte indiquait l'agence internationale de design.
Une fois dans les lieux, le jeune cadre pris l'ascenseur en direction de l'étage réservé aux réceptions. C'était une grande salle rectangulaire avec des moulures datant de la fin du XIXème siècle. Le sol était tapissé de moquette rouge à l'image de grands établissements de standing parisien. Les murs étaient d'un blanc crème. Il y avait un buffet au fond de la salle, à l'opposé des fenêtres, qui n'était pas encore garni. Sept heures du matin venait à peine de sonner. Lune était un jeune homme de nature anxieuse et il aimait bien de tout planifier dans le but de ne pas succomber sous le stress du retard. C'est pour cela que le cadre rentrait dans l'immeuble alors que les vigiles de nuit n'avaient pas encore été remplacés.
Lune empoigna une chaise et la posa devant une fenêtre. La vue donnait sur les quais de Seine. Le fleuve n'était pas engorgé de bateaux mouches transportant des milliers de touristes à la découverte de Paris et de son histoire. A cette heure, rien ne pouvait trancher le liquide bleuté au reflets orange et rose de l'aube.
Le jeune homme ferma les yeux. Les travaux de Soleil s'imprimèrent derrière ses paupières. Il ne pouvait pas rouvrir se yeux. Son style et ses idées artistiques étaient exquis. De son vivant, Lune n'avait rien vu d'aussi beau. La concurrence allait être rude pour décrocher les deux précieux postes de designer vacants. Mais le cadre avait un pressentiment ; cette jeune femme allait changer sa vie et celle de l'entreprise.
Il rouvrit les paupières. Les rayons du soleil firent envoler de son esprit les travaux de Soleil.
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*1: Marquer les ombres de Veronica Roth
11 commentaires
Sandelina Antowan
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Il y a 5 ans
kleo
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Nymphangie
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Joanna Kheerly
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MiXado
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