PICOT Hors programme Chapitre 9- Clara

Chapitre 9- Clara

Chapitre 9- Clara

Cela faisait une demi-heure que j’étais réveillée. Sans courage pour me lever.

J’ai traîné au lit encore un moment. Je l’avais bien mérité ! La tête enfouie sous les couvertures, je revivais les évènements de la semaine. Analysant chacun de mes choix. Me disant que j’aurais dû davantage canaliser les bavardages. Que j’aurais dû mieux expliquer la notion de croissance. Que j’aurais dû prendre plus de temps pour les calculs.

En filigrane, le visage de Léo Legrand se dressait entre mes réflexions. Je me suis persuadée qu’il n’était qu’un séducteur qui tentait sa chance avec la nouvelle prof. D’un coup d’éponge, j’ai chassé son image. Puis, j’ai repensé à la proposition des élèves. J’entendais leur voix. « Vous jouez aux cartes, madame ? » Un léger sourire s’est dessiné sur mes lèvres. Ils avaient osé !

Et j’avais refusé.

Quelle idiote !

Je n’avais aucune spontanéité, je n’écoutais jamais mon cœur. Toujours à faire ce qu'on attendait de moi.

J’étais fatiguée d’être l’écolière modèle. Lassée d'accomplir ce que l’on exigeait de moi.

J’aurais dû accepter.

Mais on ne sort pas avec ses élèves ! Et merde !

Je me suis dit que, finalement, cette première semaine s’était bien passée. J’avais assuré !


J’ai attrapé mon téléphone qui dormait près de moi. J’avais un message de Charlotte.

Cc Clara, pas de soucis pour venir t’aider pour les cartons. Tu me raconteras ta première semaine. À toute.

J’ai pianoté quelques mots : quatorze heures chez moi.


Charlotte a sonné à quinze heures !

J’ai dégringolé l’escalier, mais ma mère est arrivée la première à la porte. Je la détestais quand elle faisait ça.

— Bonjour Charlotte, a-t-elle dit d’un sourire niais.

— Bonjour madame.

De la troisième marche où j’étais restée coincée, j’ai fait signe à Charlotte de monter.

On s’est retrouvé dans mes douze mètres carrés. La chambre en désordre ressemblait à un champ de bataille. Chaque objet semblait avoir été éparpillé pour une raison mystérieuse et trois cartons attendaient leur heure de gloire.


— Tu veux qu’on commence par quoi ?

— Les livres, c’est ce dont j’ai le moins besoin.


On a retiré les ouvrages des étagères. Entre Dostoïevski et Da costa, les "Tintin" et les "Martine" de mon enfance se faisaient face.

Bon an mal an, on a enfourné quelques affaires dans un carton plus lourd que nous. Au jeu de Tetris, nous n’étions pas trop mauvaises.


— Alors ta semaine, dis-moi. Les collègues sont sympas ? Ça fait quoi d’être prof ?

Je ne savais pas ce que ça faisait d’être prof. - Rien, bizarre. - J’ai préféré raconter ma rencontre avec Cécile et Noah.

— Je te les présenterai. Ils sont vraiment sympas. Noah m’offre des cafés le matin. Il arrive toujours très tôt ! Cécile est chouette comme fille…


Pendant qu’on discutait, les livres s’étaient parfaitement imbriqués, laissant ce qu’il faut de vide pour les bibelots. Ils ne me serviraient jamais à rien, mais c’était des cadeaux. Un de mon père, de mon grand-père et même de tonton Marc… Bref, je n’avais aucune envie de m’en séparer.


— Tu les as tous lus ?

— Oui. Sinon je ne les aurais pas achetés.


Elle m’a offert un sourire crispé. Puis, elle a rebondi sur mes propos.


— Donc ce Noah te paie des cafés. Tu ne trouves pas ça étrange ?

— Non pourquoi ? Moi aussi je lui en offre !


Elle a fait la moue.


— Ça ne m’étonnerait pas qu’il ait une idée derrière la tête ton Noah ! Marié ?


J’ai stoppé net ses élucubrations.


— Arrête, il ne se passera jamais rien entre Noah et moi !

— Comment le sais-tu ?

— Parce que je le sais ! C’est tout.


Elle a gardé le livre qu’elle tenait dans sa main et m’a regardé d’un drôle d’air.


— Il y a un autre prof ! Et tu ne m’en parles pas !


Elle avait presque crié. J’ai cru que ma mère allait nous entendre.


— Mais non. Qu’est-ce que tu insinues ? Il n’y a pas d’autre prof !

— Tu as craqué pour un élève, c’est ça ?


Ses yeux scintillaient comme si des étoiles dansaient dans un feu. Un peu comme les flammes d’une bougie. Elle voulait connaître tous les détails. Nom, prénom, âge, hobbies.


— Mais Charlotte, je n’en sais rien. Ça ne fait qu’une semaine que je travaille.

— Tu as bien un nom à me donner ?


Elle avait croisé ses bras sur son torse. Il n’était plus question de remplir des cartons de souvenirs périmés. Elle attendait… J’ai secoué la tête, tentant de chasser cette idée. C’était ridicule ! J’avais l’impression d’être dérangée, d’avoir un problème, de ne pas être normale. Qui s’éprend d’un de ses étudiants, vraiment ?


— Des élèves m’ont proposé une partie de cartes après les cours.

— Et tu as dit non, évidemment !


J’ai pris un air contrit. C’est mon côté rigidité qui ressortait. Si rien n’est organisé, ma mère s’offusque. Il lui faut des cartons d’invitation pour tout. Et je déteignais sur elle. C’était horrible. Pourquoi ne pouvais-je pas me laisser porter ? Pourquoi devais-je voir le vice partout ? Était-ce gênant de rencontrer un élève au café ? Mal d’avoir des sentiments. Avais-je des sentiments ?


— Ce n’est qu’une partie de cartes, Clara. Qu’est-ce que tu risques ?

— Justement. Je ne sais pas.

— Tu ne vas pas à coucher avec lui… Elle a ri aux éclats… pas encore.


J’ai écarquillé les yeux. Qu’est-ce qu’elle racontait ? Elle m’a lancé un clin d’œil. J’ai souri. Elle avait gagné ! Je ne risquais rien, d’accord. Juste un café et une partie de belote.


— Tu veux qu’on sorte ce soir, ça te fera le plus grand bien. Tu as l’air fatiguée.


Je l’étais. L’idée ne m’enchantait pas plus que ça, mais je n’ai pas dit non.


On s’est retrouvé dans un bar branché. Charlotte et ses amis préparaient leur diplôme de notariat. Charlotte avait toujours été brillante. J’étais très fière d’elle.

Lorsque nous sommes arrivés, une musique électro envahissait l’espace. Le cadre était moderne, l’ambiance décontractée. J’aimais bien cet endroit. Il proposait des cocktails hyper créatifs, de toutes les couleurs. J’étais en admiration devant le barman quand un homme est venu m’accoster. C’est la dernière chose dont j’avais besoin. J’ai tourné le dos au type qui n’a rien compris.

Je suis gentiment retournée m’asseoir à la table qu’on avait squattée. Charlotte et ses amis évoquaient leur alternance et leur lieu de stage. Rien de passionnant. J’ai sorti mon téléphone.

J’ai surfé sur les réseaux sociaux. Puis, j’ai ouvert l’application du lycée. J’avais un message de Léo Legrand.

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20

20 commentaires

Alyssa Well

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Il y a 22 jours

:)

Cara Loventi

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Il y a 22 jours

Alors attention à la cohérence, une relation prof élève est interdite, même si l’élève est majeur car c’est considéré comme abus d’autorité, c’est évidemment pire si il est mineur ! Donc si, elle risque gros ! Surtout qu’elle est sa prof principale. Elle ne pas l’ignorer ;) et accepter toute activité sociale en dehors du cadre scolaire est considéré comme inapproprié. Donc son conflit interne devrait intégrer tout ça ;) Je surligne le passage qui mériterait d’être ajusté.

PICOT

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Il y a 22 jours

merci pour ton retour. Moi, je sais tout ça, mais pas mon personnage, même si Clara s'en doute. Qu'est-ce qui n'est pas cohérent ?

Cara Loventi

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Il y a 22 jours

Peut-être que je me trompe mais de mon point de vue, c’est justement que Clara ne le sache pas qui ne me paraît pas crédible. c’est assez répandu dans l’esprit commun que les relations prof élèves ne sont pas tolérées surtout avec un mineur, rapport à ce qu’on voit dans les médias, dans les films etc… Après elle peut avoir du mal à lutter contre, car le cœur se fiche bien de tout ça, mais son ignorance me perturbe 🙈. Mais c’est peut être moi qui suis à côté de la plaque avec ce ressenti ! 😉

PICOT

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Il y a 22 jours

Non tu as raison. Elle le sait puisqu'elle a refusé la partie de cartes mais elle a aussi envie de se lâcher. Je vais voir pour mieux faire ressortir ces deux facettes de son dilemme.

WildFlower

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Il y a 23 jours

Tu nous fais monter la pression d'un coup là ^^

PICOT

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Il y a 23 jours

un peu comme tes fins de chapitres qui s'arrêtent au "mauvais moments" ;)

Sofia77

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Il y a 23 jours

☺️

PICOT

-

Il y a 23 jours

Merci
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