Fyctia

« Merde si je me dépêche pas de le buter, je vais me retrouver en quatre contre un… »

Profondément blessé du côté supérieur gauche, il peine à se relever. Il pense la partie terminée, incapable de rattraper son frère.

– Tu croyais vraiment pouvoir me vaincre ? J’ai vu que tu étais dans la classe G et je t’ai directement ciblé. J’espère que tu le prends pas personnel ? En tout cas, je me demande comment mère et père vont réagir quand ils vont apprendre que leur fils favori s’est fait avoir comme un débutant par leur fils raté.

L’énergie dorée autour du semi-loup s’estompe. Arborant un regard de dégoût, Olivier se tient face à son frère vautré au sol prêt à tirer.

– Tu n’es pas un raté, répond avec une pointe d’amertume Alexandre.

– Tu répondras ça à l’Ordre ! Tu as eu la chance de naître en tant qu’homme-loup et d’avoir une magie aussi pure que la lune. Moi, on m’a toujours considéré comme ton jumeau impur. « L’or est l’éclat solide du soleil et corrompt la lune. » comme disent les anciens. Ça se voit juste dans le nom qu’ils ont donné à nos armes ! Éclat-Lune… Rouillastre… On voit laquelle de nos deux armes ils affectionnent le plus. Qu’est-ce qu’il faut pas entendre… dit Olivier en piétinant la tête de l’homme-loup.

– Encore toujours la même discussion… Tu ne vois donc pas qu’être un bestial est une malédiction et qu’on s’en fout de ce que pensent de vieux loups en robe, crie furibond Alexandre.

Soudain, un éclat argenté en forme d’épée s’abat sur Olivier. Violemment touché, il trébuche sur une racine. Alexandre se jette sur lui malgré ses blessures. Il esquive une balle à l’éclat intense et désarme son frère en lançant son sabre sur lui. Le garçon au sol est pris au piège face à de longues dents pointues. Les deux adolescents arborent dans leur regard une haine sans pareil, chacun jalousant la vie de l’autre. Alexandre va pour achever son jumeau qu’un projectile le propulse sur un arbre. Sa forme de loup ancestral disparaît et une fumée magique émane de sa blessure.

Les camarades d’Olivier viennent pour l’aider à se relever.

« Ça va. Je n’ai pas besoin d’aide. »

Alexandre, sonné, se retrouve sans défense. La magicienne de foudre s’apprête à l’achever d’un sort à distance, mais soudain une silhouette tombe du ciel en plein milieu des quatre élèves.

« Nicolas ! », dit Alexandre les yeux béants.

Le semi-golem tournoie rapidement dans les airs avec ses rubans cyan aussi aiguisés que des lames. Surpris et épuisés, les trois camarades d’Olivier ne réalisent pas que leur tête est sectionné jusqu’au moment d’être éjecté par une marré lumineuse. Seul le semi-loup parvient à éviter l’attaque en se baissant. Il réagit aussitôt en invoquant son révolver doré. Nicolas se réceptionne sur un nuage pour amortir la chute et esquiver une balle. D’un ruban, il désarme son opposant, mais ce dernier a déjà invoqué une myriade de pépites d’or qu’il s’apprête à tirer.

« Je suis mal ! »

À bout portant et dans les airs, Nicolas est à la merci du semi-loup. Tout à coup, une épée d’éclats argentés s’abat sur la poitrine d’Olivier. Son corps se fissure d’une lumière vive, ses yeux dorés s’assombrissent et son sort se désagrège.

« Point vital touché. Limite du corps magique atteint. Éjection. »

Une explosion de lumière retentit.

« Merci, Alexandre. Désolé, t’es le seul que j’ai pu sauver », dit Nicolas d’une voix monotone.

***

De l’affrontement, il reste Nicolas d’intact, et Alexandre de blessé. Ce dernier utilise son mana pour se régénérer et, en une quinzaine de minutes, ses entailles se referment d’une couche superficielle. Cependant, un gros bleu demeure sur son flanc droit.

Les deux élèves continuent leur périple en direction de la base de la classe F. Leur progression se fait lente à cause des blessures d’Alexandre et en silence, car les deux adolescents ne sont pas de gros parleurs. Nicolas, en tête de file, est à l’affût du moindre son et empreinte magique. L’homme-loup tient à le remercier de l'avoir secouru, mais le semi-golem l’interrompt sec. À l’aide de son mana, il détecte quelques présences, dont une familière.

« Carte, dit Nicolas. »

Une interface semblable à un radar apparaît sur sa main droite. Il y a cinq points blancs non loin de lui.

« Des alliés. Pourquoi ils ne bougent pas ? »

– Qu’est-ce qu’il y a ?

– Je crois qu’il y a des élèves de notre classe qui ont des ennuis. Reste là et continue de te régénérer. Suis-moi à la trace depuis la carte. Si tu vois que je me fais éjecter, retourne à la base, ordonne le semi-golem en grimpant dans les arbres à l’aide de ses rubans.

Alexandre acquit d’un hochement de tête.

Nicolas saute de branche en branche à vive allure toute en se rééquilibrant subtilement à l’aide de sa capacité à voler. Il se rapproche suffisamment de ses camarades pour communiquer avec eux par télépathie.

– C’est Nicolas de la 1G. Vous allez bien ?

Après un long moment de silence, il entend une voix faible et somnolente.

– Nicolas… à l’aide… Elles se sont toutes endormies… J’ai les paupières si lourdes…

– J’arrive Alice, répond le semi-golem d’un ton monotone.

L’adolescent accélère la cadence, en faisant de plus amples sauts. Soudain, quatre rayons lumineux jaillissent vers le ciel. Sur le radar, il ne reste qu’un point blanc.

« Merde… »

Il arrive sur les lieux et, du haut d’un arbre, camoufle sa présence.

Sa camarade Alice, vacillante, essaie tant bien que mal de repousser les assauts d’un semi-corbeau.

Nicolas évalue les différentes options pour la secourir. Il opte pour une attaque-surprise semblable à celle qu’il a faite plus tôt, mais un cri de corbeau retentit. Le garçon comprend tout de suite qu’il est repéré par un familier, car il n’est pas censé y avoir d’animaux dans la simulation.

Le semi-oiseau se tourne en direction du hurlement.

Nicolas forme une énorme plate-forme de nuage pour se cacher et mieux se mouvoir, mais des plumes transpercent la nébulosité et le harcèlent comme si son ennemi savait parfaitement où le jeune garçon se trouve.

« Comment il sait où je suis ?! » se demande-t-il avant de voir un corbeau dans le ciel. « C’est lui qui donne ma position ! Arcus ! »

Le garçon souffle un imposant nuage aussi droit qu’un trait en direction de l’oiseau, mais le corbeau l’esquive aisément. Le semi-golem réalise, tout en évitant des plumes noires à la fois du familier et du mage au sol, qu’il ne pourra pas toucher le volatile à l’aide d’Arcus qui ne peut qu’aller en ligne droite et opte donc pour un sort plus flexible.

« Nuage aux multiples couleurs peint le ciel. Nuage nacré ! »

Deux sphères multicolores tournoient dans chacune de ses mains et se transforment chacun en sept rayons nébuleux. Quatre montent vers le ciel en direction du corbeau et les dix autres descendent vers le mage de plumes.