Fyctia
Échec à l’hôpital 3
Cet après-midi, Maloire et Edgar ont prévu de rendre visite à Alex, pour lui poser d’autres questions et, surtout, pour le mettre en garde. En effet, son téléphone portable étant sur écoute permanente, ils ont intercepté une communication anonyme émanant d’une cabine publique. Ce qui paraît pour le moins étrange de nos jours où l’utilisation des téléphones mobiles s’est généralisée. Un pré-tendant membre de son club moto, qui désirait lui rendre visite, voulait, s’assurer qu’il ne le dérange-rait pas, au cas où une autre visite était prévue, mais peut-être aussi, s’assurer qu’il était seul. Même surveillé, Alex doit être très prudent dans le choix de ses visites et les limiter à son cercle familial et amical le plus restreint possible. Avant de se rendre sur les lieux, Maloire a prévenu le policier de garde de leur arrivée.
Il est quatorze heures, quand la voiture, conduite par Maloire, entre dans le parking de l’hôpital. Comme à son habitude, prise au volant de sa Jaguar S-Type, Maloire s’enfonce au fin fond du par-king pour y trouver une place isolée, loin des autres véhicules et surtout, à l’abri des coups de portières. Il ne supporte pas ces maladresses insouciantes qui laissent des traces indélébiles sur les voitures. Même pour celle qu’il utilise en ce moment, cette voiture de fonction qu’il déteste par-dessus tout, il en fait une affaire de principe. On est maniaque ou on ne l’est pas.
Là-bas, tout près de la haie de cyprès, ça fera l’affaire, pense Maloire. Et puis, un peu de marche ne fait pas de mal, ça facilite même la digestion, paraît-il. La voiture s’approche lentement de la zone repérée, quand soudain Edgar s’écrie :
– Inspecteur, regardez à gauche, une Coccinelle bleu ciel.
Maloire pile et tourne la tête dans la direction indiquée. Il aperçoit effectivement la Coccinelle en question garée au fond du parking. Il manœuvre pour s’en approcher, afin de voir si elle est occupée. Arrivé à sa hauteur, il ralentit, puis voyant qu’elle est vide de tout passager, s’arrête pour noter le numéro de sa plaque minéralogique.
– Il y a peut-être une chance sur un million que ce soit celle que nous recherchons, mais je ne veux pas prendre le risque de la négliger. Je vais appeler le policier de garde pour lui demander d’être vigilant avant qu’on arrive.
– Et si je dégonflais ses pneus, pour l’empêcher de partir, au cas où on serait encore pris de vitesse, ajoute Edgar.
– Non, je vais positionner ma voiture de telle sorte qu’elle ne puisse plus sortir de son stationne-ment. Son propriétaire devra lancer un appel au microphone de l’hôpital pour que la voiture gênante soit dégagée. Si ce n’est pas un de nos agresseurs, nous n’aurons plus qu’à nous excuser.
– Vous avez raison, votre solution est moins radicale et plus souple que la mienne, répond Edgar, pendant que Maloire manœuvre.
– Allô, Inspecteur Ravel, ici Maloire. Je vous appelle du parking de l’hôpital où nous sommes actuellement. J’ai une petite inquiétude, il se pourrait qu’un de nos agresseurs soit dans vos murs. Je vous demande de redoubler d’attention et de ne laisser entrer personne dans la chambre d’Alex Sa-vin, jusqu’à ce que nous arrivions.
– Pas même le personnel médical ?
– Non ! Absolument personne, c’est clair ? répond Maloire en claquant la portière de sa voiture.
– Mais il y a une infirmière qui vient d’entrer à l’instant même.
– Pour quoi faire ? répond Maloire tout en accélérant le pas vers la porte d’entrée.
– Je ne sais pas exactement, elle portait un petit plateau métallique à la main, je crois qu’elle fait la distribution des médicaments.
– Comment est-elle ? ajoute-t-il le souffle court.
– Elle est jeune et blonde, je crois, je ne l’ai pas détaillée.
– Entrez tout de suite dans la chambre voir ce qu’elle fait, on est là dans quelques secondes.
Maloire raccroche et range son téléphone tout en courant en direction du parvis de l’hôpital, imité en cela par Edgar qui court à son côté. Il a un mauvais pressentiment et pense : « Ah ! Si je n’avais pas garé ma voiture si loin, je ne perdrais pas autant de temps pour accéder à l’hôpital. D’un autre côté, si je l’avais garée plus près, je n’aurais pas pu découvrir la Coccinelle ».
Le sas d’entrée franchi, Maloire demande à Edgar de prendre le second escalier qui mène à l’étage, pendant que lui prend le premier. Pas le temps de prendre l’ascenseur, pour gravir deux étages. Ils avalent les marches deux par deux, comme s’il y avait le feu, bousculant quelque peu les visiteurs qui traînent.
Pendant ce temps, le garde fait irruption dans la chambre. Il découvre l’infirmière penchée sur Alex, un oreiller dans les mains, en train de le presser fortement sur son visage. Surpris par ce spectacle, il n’hésite pas un instant et se précipite sur elle pour l’immobiliser et l’empêcher de continuer son acte criminel. Arrivé à proximité de l’infirmière, cette dernière, qui n’avait pas bougé un cil, se retourne brusquement et lui plaque son Taser sur la poitrine. L’effet est immédiat, le policier est pris d’une violente convulsion, il titube et perd aussitôt l’équilibre. L’infirmière le bouscule violemment, l’écarte de son chemin et s’enfuit en courant de la chambre.
Maloire, qui avait emprunté l’escalier le plus proche, arrive le premier sur le couloir du deuxième étage et entrevoit une silhouette blanche, détaler au fond du couloir. Il s’avance à grands pas vers la chambre d’Alex, quand Edgar surgit à son tour du second escalier.
– Edgar, elle s’est enfuie par ici, poursuis-la, tu as carte blanche.
Maloire entre rapidement dans la chambre d’Alex, dont la porte est restée grande ouverte. Il dé-couvre le policier de garde groggy, assis sur le sol, dos au mur, près du lit d’Alex. Ce dernier est allongé sur son lit, les bras sous les draps et un oreiller sur le ventre. Il respire péniblement et essaie d’articuler quelques mots qui ont du mal à sortir de sa bouche béante.
– Ne parlez pas, monsieur Savin, je suis au courant, restez calme et reprenez votre souffle.
Maloire empoigne son téléphone et demande des secours immédiats à la gendarmerie locale. Il interpelle une infirmière qui passait dans le couloir et lui demande de s’occuper d’urgence des deux occupants de la chambre. Il dévale ensuite les marches de l’escalier quatre à quatre et ordonne à l’accueil que l’on condamne toutes les issues de l’hôpital. Personne ne doit entrer ni sortir sans l’autorisation expresse de la police qui va bientôt arriver. Il prend ensuite le microphone pour faire une annonce qui est diffusée par la multitude de petits haut-parleurs disséminés dans tous les lieux.
– Mesdames et messieurs, pour des raisons de sécurité, nous avons volontairement fermé tous les accès de l’hôpital. Nous vous demandons de rester calmes, de ne plus sortir de vos chambres et de ne plus vous déplacer dans les couloirs ou escaliers jusqu’à nouvel ordre. Cette mesure s’applique aux patients, aux visiteurs et au personnel médical, hors état d’urgence et autorisation spécifique.
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