Jane--Ice Et que tout se consume Silver 2/2

Silver 2/2

"J’ai demandé au pompier, à l’épicier, au boucher, au boulanger, aucun d’eux ne savait, mais le petit caviste lui, il savait. Qui veut la peau de Roger Rabbit ? -1988"


Ma mère se crispe, je distingue les jointures de ses doigts blanchirent autour de son verre, mon père lui, repose le sien.

-Tu as un odorat exceptionnel Silver, peut être travailler dans le vin n’est pas une bonne solution, les parfums peut être ? tempère-t-il.

Je secoue la tête.

-Je souhaite faire quelque chose d’utile.

Ma mère abat avec force son verre, et je crains un instant qu’il ne soit brisé.

-Utile ? Et donc, que trouves-tu utiles comme métier jeune fille ? crache-t-elle

Je souffle un grand coup, vidant l’air de mes poumons.

-J’aimerais intégrer la formation de pompiers de…

Ma mère part dans un grand éclat de rire qui n’a rien de jovial. Elle tourne sur elle-même en maugréant.

-Pompier ? Mais tu as perdu la raison ? Tu…


Mon père lève la main afin de faire taire la crise d’hystérie.

-Eléonore, laisse-la parler.

Je lui offre un sourire timide, en le remerciant silencieusement. Tandis que ma mère vire au carmin.

-Je suis consciente que c’est très loin de ce que nous connaissons, mais j’ai pris conscience que je n’étais pas faite pour l’œnologie. Je vous remercie pour cette formation à Sacramento et de m’avoir trouvé une place, mais j’ai trouvé ma vocation.

-Comment s’appelle-t-il ? demande ma mère les bras croisés.

-Qui ça ? hasardé je, pas certaine de suivre.

-Le jeune pompier de qui tu t’es entiché !


Je sens que mes joues rougissent, je bafouille légèrement, consumée par la colère.

-Tu penses que je choisirai un métier, juste parce que j’ai croisé un beau garçon ? je secoue la tête de déception avant de reprendre. Non pas du tout, j’ai assisté à un incendie et à l’intervention qui a permis de l’éteindre. Et pendant que j’observais j’avais la sensation au fond de moi que ma place était avec eux. Donc désolée Maman, mais je ne vis pas que pour les beaux garçons, j’ai d’autres centres d’intérêts, je ne suis pas si superficielle.


Même si je ça ne m’étonne pas, ça me vexe et me peine qu’elle pense à moi de cette façon. Elle renifle dédaigneusement.

-Oui bien sûr, comme quand tu as voulu te mettre au tennis, ce n’était pas pour ce professeur mignon du club où nous allions.

- J’avais quinze ans, m’offusqué-je.

-J’ai une liste longue comme le bras d’exemple de ce genre, contre ma mère, avant de tenter d’énoncer sa liste.


-Stop !

Mon père hurle, coupant court à notre lutte.

Je tourne résolument la tête afin de ne pas croiser le regard de ma mère.

-Donc tu veux faire quelque chose d’utile ?

J’acquiesce en plantant mon regard dans le sien.

-Viens travailler avec moi alors !

-Alexander ! s’insurge ma mère.

Mais il l’interrompt à nouveau d’un geste de la main.


-Papa, j’ai 21 ans dans trois semaines, je me suis renseignée, il y a une formation de six mois qui commence en juin au centre de formation du Maryland.

Mon père m’observe en silence puis lâche enfin.

-Bien donc jusqu’au début de la formation, tu vas venir travailler avec moi, aux expéditions, nous verrons si tu es si motivée ou si c’était juste un caprice !

Je me retiens juste à temps avant de dire des horreurs et opte plutôt pour une autre approche.

-Il faut que je m’entraine aussi pour être au niveau.

-Bien ! Tu vas être bien occupée alors jusqu’en juin.

Puis il me tourne le dos et entraine ma mère à sa suite, me laissant seule dans la cuisine.


J’aurai dû être ravie, j’allai intégrer cet été le centre de formation, quatre petits mois me séparant de la première étape de mon rêve. Mais la perspective de travailler sur les docks ne m’enchante guère. S’il fallait en passer par là et leur réaffirmer ma motivation, j’allai le faire.



L’adaptation de ce premier mois m’est compliquée.

Je me lève aux aurores, pour être sur les quais à quatre heures, je m’y rends par mes propres moyens, ne voulant pas profiter des avantages de mes parents.

Tous les employés, du moins la grande majorité, savent pertinemment qui je suis.

Certains se montrent faussement gentils espérant gagner des faveurs auprès de mon père, quant aux autres, ils se méfient craignant que je ne sois là pour les espionner.

Mais les deux camps se sont rendus à l’évidence. Je ne me trouve là pour aucune des deux raisons.


Quelques employés de longue date, tentent de me montrer les postures de bases lors du chargement des marchandises dans les containers.

Mon dos leur rend grâce, car les premiers jours ont été une torture pour mes articulations et mes muscles.


Lorsque la deuxième équipe prend le relais au chargement, je pars me reposer. Car lors du second roulement de la journée, je rejoins l’équipe trois.

Afin de travailler davantage mon cardio je me prévois toujours une séance de sport en fin de journée.

Mon corps n’en a pas l’habitude et n’apprécie que moyennement ce traitement.

Pourtant, je tiens bon et instaure cette routine.


De retour chez mes parents, je m’octroie une douche glacée et j’engouffre rapidement un en-cas avant de tomber de sommeil.

L’avantage de ce rythme, il faut bien en trouver un, je ne vois jamais ma mère plus de dix minutes.

Bien que ce peu de temps lui permet quand même de m’assommer de reproches.


Plus les jours passent plus ça devient facile, mon corps s’est habitué, mes muscles se développent rendant mon travail moins pénible et les séances de sport moins contraignantes. J’y trouve même du plaisir.


Malgré les mois qui défilent, ma mère ne m’adresse toujours pas la parole sauf pour ses sempiternels reproches.

Quant à mon père, je lui prouve chaque jour ma détermination, ne lui donnant aucune raison de critiquer mon travail parmi ses employés, je ne reçois pas de traitements de faveur et c’est bien ainsi.

Mon acharnement a fini par le convaincre de ma motivation, même s’il ne dit rien, je sais qu’il a remarqué mes efforts.

J’aurai pu tout envoyer bouler, partir vers le Maryland, trouver un petit boulot avant de débuter ma formation, mais même si je suis fière, je ne veux pas couper les ponts avec mes parents. J’espère qu’ils approuveront à la fin mon choix. Ce n’est pas gagné, mais je garde l’espoir.

*

Je fais un rapide bilan : 21 ans fêtés, quatre mois sur les docks : ok. Relation avec mes parents : sans commentaire.

Et dans une semaine, je m’envole vers un autre état, afin de débuter ma formation.

Je désire intégrer les pompiers professionnels pas les volontaires. Il y a plusieurs tests à passer en plus de la formation.

Des tests écrits, des tests physiques, des entretiens psychologiques et une fois toutes ces épreuves passées, il y a le test final.

Un test réel, grandeur nature, l’incendie. Bien qu’il se déroule dans un centre de formation, les flammes demeurent réelles.

Combattre les feux voilà ce que je veux faire, je souhaite conscrire des flammes.

Je suis déterminée, motivée et mon rêve semble à portée de main, je dois faire mon maximum et tout tenter pour parvenir au but que je me suis fixé.

Direction le Maryland, attention, j’arrive !

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8

8 commentaires

Alexenrose

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Il y a un an

J'ai adoré ce chapitre. On voit sa motivation et aussi ce qu'aurait pu être sa vie si elle avait laissé ses parents décider. J'ai aussi un pincement au coeur car on sent que pompier c'est un métier qui la passionne et aujourd'hui, elle ne l'est plus.

Jane--Ice

-

Il y a un an

Oui elle aussi est ambivalente, elle aimait être pompier mais finalement l'industrie du cinéma lui convient bien aussi .

Carl K. Lawson

-

Il y a un an

😉
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