Fyctia

Jacob and the stone

Emile Mosseri

• TW : Noyade, deuil, mort.

Je décidais de commencer à nager. Je n’avais pas spécialement de but, je voulais seulement profiter de cette eau bleue et de ce soleil éclatant. Je me laissais porter sur le dos. Que pouvait-il bien m’arriver ? Je savais parfaitement nager ( j’avais eu mon diplôme de 50 mètres attention ! ) et étais assez proche du bord.

Enfin ça… C’était ce que je pensais jusqu’à ce que je rouvre les yeux et que je me vois m’éloigner de plus en plus vite.

Je vis mon père se lever d’un bond sans pour autant distinguer son expression, j’étais maintenant trop loin pour discerner les détails de son visage. Il se mit à courir vers moi à grande allure et voulant le rejoindre, je ramenais mes bras devant moi et tentais de nager comme je l’avais toujours fait. Je supposais qu’il voulait me rejoindre.

Un mouvement. Puis deux. Puis trois.

Il ne se passait rien. Je n’avançais pas. Je reculais. Pourquoi est-ce que je reculais ?!

La peur m’étreint soudainement la gorge et des larmes coulèrent sur mon visage recouvert d’eau salée. Je vis mon frère rejoindre mon père et tous deux, se jetèrent à l’eau. Je crus voir ma mère au téléphone mais sous la panique et l’intense stress qui m’habitait, je n’étais plus sûre de rien. J’étais seulement certaine d’une chose : J’avais fait une grosse, même très grosse bêtise et celle-ci pourrait bien me coûter la vie.

J’entendais mon nom être scandé au loin encore et encore mais je peinais à répondre, l’eau s’infiltrant sans cesse dans ma bouche.

“ Hazel !

– Papa ! Criais-je, à bout de souffle.

– On va venir te chercher Princesse, essaie encore de nager vers nous !”

Et j’essayais, encore et encore sans jamais m’arrêter. Jusqu’à m'essouffler.

Je commençais à perdre espoir et ma gorge me brûlait à force de crier. Je ne parvenais même plus à voir la plage. Je n’étais maintenant plus entourée que d'une vaste étendue d’eau. Et à part les cris de mon père et de mon frère, à part le courant qui m'emmenait au plus loin, c’était le calme plat. Pas un oiseau ne volait dans le ciel. Pas un bateau ne naviguait à l’horizon. Et surtout… Pas un seul moyen déployé en vue de nous sauver.

Je ne m’arrêtais maintenant plus de pleurer. J’avais beau n’avoir que sept ans à peine, je me rendais déjà compte que mes agissements pouvaient avoir des conséquences.

Je sentis une vive douleur me paralyser la jambe droite et je criais. J’allais mourir, j'allais me noyer. Je n’arrivais plus à bouger la jambe, j’étais complètement bloquée. Mon père et mon frère avaient disparu. J’étais toute seule.

Je vis alors un hélicoptère se diriger vers moi mais il était trop tard. J’allais juste…. Couler et… Être submergée ?

“ Je ne veux pas mourir ! Criais-je désespérément en crachant de l’eau. Sauvez ma famille ! Sauvez mon père ! Je vous en supplie, sauvez mon fr-frère !”

J’avais la voix tellement éteinte et rauque que je doutais que l’on m’entende. Je me laissais emporter par la mer, tentant tant bien que mal de sortir la tête de l’eau afin de reprendre mon souffle. J’étais complètement aveuglée et je ne parvenais plus à rouvrir les yeux. Mon corps était glacé, et j’avais froid.

Est ce que c’était un signe ?

Je ne m’étais jamais préparée à mourir, à sept ans je ne savais pas ce que cela faisait de sentir la vie quitter son corps… Et mon frère ? Y avait-il déjà pensé ? Lui qui n’avait que quatre ans de plus que moi ne devait jamais se l’être imaginé.

Mais il allait survivre.

Il était fort, beau, grand, courageux, attentif. Il était mon frère. Mon tout. Et je ne m’imaginais même pas qu’il puisse ne plus être là.

Dans un dernier effort et une dernière pensée pour ma famille, je levais le bras en l’air avant qu’il ne retombe mollement dans l’eau et que je ne sombre définitivement dans ce nouvel enfer.