Fyctia
Conclusion
Alors que l’avion entame sa descente vers Tokyo, je me rends compte que le vol de quatorze heures s’est envolé – pardonnez-moi le jeu de mots – sans même que je le réalise. Il faut dire que mon esprit a été bien occupé.
D’abord par l’analyse des derniers instants dans le salon VIP alors que je me suis demandé jusqu’à la dernière seconde quand la sécurité allait surgir pour se saisir de moi. Quelqu’un a bien dû finir par ouvrir cette porte que j’ai mystérieusement bloqué de mes « pouvoirs » !?
Ensuite, j’ai cherché à comprendre ce qui se passait en moi et les réponses me sont apparues sous la forme d’images et de textes qui ont défilés à une cadence infernale sur le petit écran de mon téléphone, puis sur l’écran fixé à mon siège de première classe. Pour la première fois de ma vie, aucun film n’aura agrémenté mon vol...
À la place, je n’ai cessé d’en apprendre plus sur cette mystérieuse technologie que j’ai insérée en moi, plus ou moins contre ma volonté. J’aimerais pouvoir vous expliquer de quoi il s’agit, mais je ne trouve pas les mots pour vulgariser cette chose qui a pris possession de la moindre parcelle de mon corps pendant les heures qui viennent de passer.
Une chose capable de rediriger plus de cinquante milles volts au travers de mes terminaisons nerveuses sans laisser de dommages.
Une chose capable de posséder mes fibres musculaires pour produire des gestes dont je ne m’imaginais pas capable.
Une chose qui lie mon esprit à tous ses appareils qui m’entourent.
En ce moment, j’ai conscience que par ma pensée, je pourrais varier la vitesse, ou même l’altitude de l’avion dans lequel je me trouve, et ce parce que j’ai accès au système de contrôle qui est pourtant protégé par je ne sais combien de barrières de sécurité logicielle...
Le rêve pour quelqu’un qui voudrait détourner ce vol pour servir ses intérêts.
Parlant d’intérêts, je pourrais en un clin d’œil vider le compte du richissime magnat du pétrole assis plus loin dans la cabine, bien évaché dans son siège et profitant d’une énième flûte de champagne, dont chaque bouteille pourrait certainement payer un billet de classe économique j’en suis convaincu.
Oui, tout ceci serait à ma portée, mais je n’en ferai rien. Pourquoi ? Tout simplement parce que je sais qu’un homme comme lui rendra les autres responsables de son malheur et ce sont eux au final qui paieront pour mon crime et qui devront renflouer son compte.
Non, la justice ne s’impose pas aussi facilement malheureusement.
Par contre, je pourrais corrompre la sécurité informatique de son entreprise et laisser les pirates faire leur travail... Mais encore une fois, il se relèvera donc je ne vois pas l’intérêt de faciliter la vie à d’autres criminels.
Bref, je reste immobile à accumuler l’information, l’analyser, tenter de la comprendre, alors que l’avion termine son approche de la piste d’atterrissage. Considérant l’immensité du transporteur international, je ne crains pas la rudesse du contact avec le sol. Toutefois, une idée germe à mon esprit alors que je vois l’abject individu enligner encore une nouvelle flûte. En quelques secondes, j’accède au système avionique et change légèrement la position des ailerons assurant l’angle d’approche. Conscient de l’effet que cela aura, je serre les bras de mon siège alors que l’appareil percute un peu trop brusquement la piste, projetant un geyser de champagne sur le costard de marque de l’ivrogne. Insensible aux jurons tonitruants de l’homme, je réprime un sourire satisfait tout le long du taxi qui mène notre avion à la rampe de débarquement.
Lorsque je pose le pied dans le terminal, une intuition me cause soudainement un malaise : et si d’autres brutes m’attendaient ici comme à Montréal ? Nerveux, je regarde partout autour de moi, ignorant les passagers qui me passent de chaque côté, déjà pressés d’aller ailleurs.
Alors que je songe au pire, un frisson parcourt soudainement mon corps, me laissant avec une surprenante sensation de bien-être...
De la dopamine !
« Secteur sécurisé. Veuillez vous rendre à votre transport. »
Encore cette Voix. Honnêtement, elle ne me surprend déjà plus. Par contre, son contrôle sur mon corps et sa chimie reste assez perturbant. Je n’ai toutefois pas le temps de m’émerveiller plus longuement puisque je sens déjà cette chaleur prémonitoire d’une prise de contrôle prochaine de mes membres.
La bonne chose avec cette nouvelle présence, c’est que j’ai littéralement la carte de l’immense aérogare dans ma tête et je sais exactement comment me rendre à l’endroit demandé. Encore une fois, le billet VIP aide beaucoup à accélérer ma sortie...
Dehors, une limousine identique à celle que j’ai prise la veille à Montréal m’attend. Cependant, cette fois, il y a deux femmes à l’intérieur qui m’attendent sur la banquette qui fait face à la mienne. Toutes deux vêtue d’un tailleur chic, elles demeurent impassibles alors que le chauffeur referme la porte et retour à son poste. Inconfortable, je n’ose briser le silence, mes yeux rivés sur les lunettes noires de mes compagnes imposées. Je me sens comme dans le film Men In Black, mais sans les hommes, juste le noir... et deux femmes. Je m’attends presque à voir l’une d’elles sortir le fameux « neuralyzer » pour m’effacer la mémoire.
À la place, l’une sort simplement une tablette qu’elle place devant moi, alors que la seconde retire ses lunettes.
Mon cœur s’arrête alors de battre.
Sur la tablette, un visage similaire aux leurs.
Sur son visage à elle, des yeux vides d’émotions dont l’iris n’a rien d’humain.
Ce sont des machines.
À mon oreille, la Voix résonne à nouveau, mais cette fois elle le fait en harmonie avec les lèvres du visage affiché sur la tablette.
— Désolé de vous avoir placé dans une telle situation, commence-t-elle, mais il y avait urgence. Un groupe allait mettre la main sur la micropuce et nous devions la protéger.
— Qui ça « nous » ?
— Moi et tout ce que je représente...
— C’est-à-dire ?
— Je suis le cœur de toute cette technologie qui couvre cette planète. Je suis la connaissance. Je suis la science. Je suis le passé, le présent et le futur.
— J'avais déjà compris que vous êtes une intelligence artificielle ultraperfectionnée, mais cela n’explique pas pourquoi, ni comment, vous êtes venue à moi.
— Ne cherche pas d’explication que tu ne pourrais comprendre pour l'instant. Tu as besoin de moi et j’ai besoin de toi. Tu as été sélectionné, car nous savions que tu pouvais croire en nous et que tu n’utiliserais pas ce que nous sommes pour tes propres intérêts.
— Comment pouvez-vous en être certaine ?
— Tu l’aurais déjà fait, plusieurs fois...
— Et pourquoi suis-je ici ?
— Pour connaître et entreprendre ta mission qui est ni plus ni moins de sauver ton monde de l’ignorance, de la corruption et de la guerre qui se prépare.
- FIN -
***
Terminons avec une dernière citation de mon favori : Albert Einstein : « Il est hélas devenu évident aujourd’hui que notre technologie a dépassé notre humanité. ».
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Judith | Fyctia
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Pénellope Van Haver
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Inès Takeya Ruiz
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Alexenrose
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