Fyctia
Chapitre 6 - Partie 4
Il me répond d’un sourire et nous accélérons le pas jusqu’à la première bouche de métro que nous trouvons. Nous nous glissons dans une rame et parcourons les quelques arrêts jusqu’à mon quartier. Ross est silencieux, et très observateur. J’apprécie le fait que nous n’avons pas à meubler chaque moment par des conversations qui n’ont pas forcément grand intérêt et que nous acceptons chacun le temps de pensées de l’autre. Le tout plus fluidement que je ne l’ai jamais ressenti. Je songe à justifier cela par le fait qu’il soit le cadet de toute une fratrie : à la fois habitué à être entouré de monde et d’avoir ces moments de silence. Nous arrivons en bas de mon immeuble et je fais signe à Pierre pour qu’il ouvre la porte depuis son bureau. Il actionne le verrou automatique d’un son grinçant mais ne sort pas pour nous saluer, se contentant d’agiter la main à notre attention lorsque nous passons devant la grande vitre de sa cabine. Je grimpe les marches rapidement, suivie de près par mon acolyte toujours silencieux, et ouvre la porte.
- Tada ! fais-je d’un ton léger pour tenter de lui faire décrocher un sourire.
Il me dépasse et entre dans la pièce principale de mon appartement. Il se positionne au centre, et tourne tout autour de lui, comme pourrait le faire un agent immobilier avant de donner une estimation. Alors qu’il est dos à moi, je me rends compte que son appartement, même celui qu’il loue pendant qu’il est à Paris, doit être bien plus grand que le mien; bien mieux meublé aussi. Je me sens soudain un peu honteuse de l’avoir fait entrer ici pour des questions d’organisation et de le voir à présent, les bras croisés, au milieu de mon modeste salon.
Ton esprit pratique te perdra, un de ces quatre, Madeleine !
Pourtant lorsqu’il se retourne, il arbore un chaleureux sourire. Il prend place dans le canapé, rapidement rejoint par mon félin curieux. Malgré son costume sur mesure et ses chaussures de ville, il ne détonne pas.
- Allez vous changer Madeleine, je suis en très bonne compagnie, me dit-il.
J’acquiesce et quitte la pièce avec mes sacs en papier à la main. Je les dépose prestement devant mon dressing et jette un œil à mon rétro planning du week-end avant de saisir le cintre qui porte ma tenue de ce soir. Je m’assure que la porte de ma chambre soit bien verrouillée : je ne sais ce qui me mettrait plus mal à l’aise entre le fait qu’il me découvre à moitié nue en train de me changer ou qu’il aperçoive mon plan littéralement tiré à quatre épingles sur le panneau de liège. La seconde option semble primer dans mon esprit. Je me presse pour ne pas le faire attendre trop longtemps et enfile une jupe beige qui m’arrive juste au-dessus du genou, le tour de ma taille élégalement décorée d’un noeud de tissu noir que je resserre après y avoir glissé un fin chemisier blanc. Je tire mes cheveux en une queue de cheval bien haute, et enfile mes escarpins préférés - talons hauts mais confort absolu. Lorsque je ressors de la pièce, Ross s’est levé du canapé et fait face à ma bibliothèque, me tournant le dos. Une de ses mains passe de livre en livre comme s’il cherchait un titre en particulier, l’autre est glissée dans la poche de son pantalon, tirant judicieusement le tissu sur une certaine partie de son anatomie qu’on ne peut que complimenter. Il stoppe mes douteuses réflexions en se retournant vers moi, et je vois ses yeux s'écarquiller après m’avoir regardé de haut en bas. Sa réaction me réchauffe le bas-ventre d’une manière qui ne m’est pas permise. Je décide d’alléger l’ambiance en lui tirant la langue et cela fonctionne à merveille. Il sort de sa contemplation et il me semble l’apercevoir déglutir, mais un joyeux sourire s’étire enfin sur ses lèvres.
- Vous êtes sublime, Madeleine.
- Merci beaucoup, je vous retourne le compliment.
- Je crains ne pas pouvoir captiver les regards ce soir.
- Tâchons de les éblouir ensemble, conclu-je, en saisissant un de mes sacs dans l’entrée.
Je caresse le dos de mon chat qui vient se frotter à nous alors que nous avançons vers la porte. Ross se baisse et lui frotte entre les oreilles avec son pouce, enclenchant la machine à ronronnement de mon matou.
- Je crois que je me suis fait un nouvel ami, dit-il en se redressant.
- Il ne vous aura complètement adopté que lorsque vous lui aurez donné à manger.
- La prochaine fois, c’est promis, glisse-t-il à l’attention de mon chat.
Il regagne le couloir avant moi et je me retourne pour fermer ma porte à clé. Je ne fais pas attention à ce qu’il me raconte, réalisant les conséquences de sa précédente phrase. Je remarque que c’est d’ailleurs le premier homme que je fais entrer dans ce petit appartement, préférant largement partager leur chambre à coucher pour déguerpir plus vite en cas de rendez-vous foireux. Pourtant, avec lui, cela avait été d’une fluidité étonnante, comme tout ce qu’il faisait. Souhaitait-il revenir ? Je secoue la tête en tournant la clé dans la serrure et écarte les images qui passent malgré moi dans mon esprit.
C’est ton boss, Maddie, c’est interdit.
Je me retourne vers lui, le sourire le plus serein possible sur le visage et nous descendons les marches pour retrouver la rue. Je me remémore jusqu’au métro pour notre prochaine destination, mon mantra du week-end : c’est juste un week-end entre amis, profite de ce moment, sans réfléchir à ce qu’il arrivera après.
12 commentaires
Maeva Grandjean
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Il y a 2 ans
Sarah van Cauwenberghe
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Il y a 2 ans
AnnaK
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Il y a 2 ans
Coeur fondant
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Cécile G
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cloclozoccola
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Il y a 2 ans