F.V. Estyer Désirs défendus Chapitre 36

Chapitre 36

Au début, il tente de me dissuader. Me demande de poser les questions directement à Noah pour obtenir les informations souhaitées. De me montrer patient. Mais je ne peux pas. Et me voilà à lui déballer toute l’histoire. Je lui explique ses blessures, sa venue ce soir à mon appartement, ma peur de ce qui pourrait lui arriver si personne n’agit. Et de mes sentiments ambigus pour mon élève.

— Tu es dans une sacrée merde, mon pote, déclare-t-il une fois mon histoire terminée.

— Ouais. Je sais. Merci de me le rappeler, je rétorque froidement.

— Hé. Ne t’en prends pas à moi. Je n’ai simplement pas envie qu’il t’arrive des bricoles.

Je me frotte l’arête du nez, ferme les yeux et tente de repousse cette colère qui m’envahit.

— Désolé. Je suis un peu sur les nerfs ce soir.

Sur les nerfs et exténué. Émotionnellement. Je ne supporte pas de voir Noah ainsi. Ces bleus qui parsèment son corps gracieux, la crainte constante visible dans son regard, dans ses gestes, même s’il essaye de ne pas le montrer. Personne ne devrait vivre comme ça. Je sais de quoi je parle.

— Je veux simplement l’aider à s’en sortir, Sam.

Seul le silence me répond. J’entends sa chaise grincer. Il pousse un profond soupir.

— Tu ne peux pas sauver tout le monde.

Je sais. J’en ai parfaitement conscience.

— Mais je peux au moins essayer. S’il te plaît, Sam.

Un grognement s’échappe de sa bouche, et il finit par abdiquer.

— D’accord. File-moi les infos.

Un petit sourire se dessine sur mes lèvres en comprenant que je viens de remporter cette bataille.


***


Ma tête reposant entre mes mains, je fixe mon téléphone depuis une bonne vingtaine de minutes, attendant impatience des nouvelles de Sam. Je lui ai fourni tous les détails susceptibles de l’aider, bien qu’ils soient minces. J’espère que ce sera suffisant pour le retrouver. Il m’a dit qu’il me tiendrait au courant dès qu’il aurait trouvé quelque chose, et pour l’instant, mon portable reste indubitablement silencieux. J’espère que c’est qu’il est occupé, et non parce que ses recherches s’avèrent infructueuses.

— Tu essayes de le déplacer par la seule force de ta pensée ?

Je sursaute en entendant la voix rauque de Noah et relève la tête pour le découvrir, en face de moi, qui m’observe, intrigué. Et apparemment amusé, si j’en crois le léger rictus qui ourle ses lèvres.

— Quoi ?

Il avise mon téléphone du menton.

— Ça fait trois minutes que je te regarde fixer ton portable sans bouger. Qu’est-ce qui se passe ?

Je me redresse sur mon siège et secoue la tête.

— Rien. Rien du tout. Ne t’inquiète pas.

Il hausse les épaules pour toute réponse. Je plisse les yeux pour essayer de savoir s’il a entendu ma conversation, croisant les doigts pour que ce ne soit pas le cas. Parce que ça serait une catastrophe. Je n’ai pas besoin de ça. Pas maintenant. Alors qu’il a réussi à s’ouvrir à moi. Qu’il commence à peine à m’accorder sa confiance. Est-ce que je viens de tout gâcher ? Mon Dieu, faites que ce ne soit pas le cas. Tous mes efforts réduits à néant par mon impatience. Putain, ça serait vraiment un comble.

Mais ses traits semblent détendus. Ses yeux sont tout ensommeillés, et l’oreiller a laissé une trace sur sa joue. Je ne peux m’empêcher d’être ébloui devant cette vision. Si beau, même en plein milieu de la nuit, les cheveux tout ébouriffés.

Nous nous observons mutuellement un court instant. Il fait jouer sa mâchoire et porte sa main à son visage, sur son côté contusionné.

— Tu as mal ? je m’enquiers, inquiet.

— Non. Ça va. J’ai connu pire.

Je lève les yeux sur le pansement qui protège les strips de son arcade. Ouais. On peut dire ça, en effet.

— Tu devrais retourner te coucher.

Il acquiesce. Se tord les mains. Baisse le regard.

— Est-ce... Est-ce que tu vas me rejoindre ?

Si fébrile. Si fragile. Un oisillon tombé du nid. Bordel. Je crève d’envie de le prendre dans mes bras.

« Laisse-moi te protéger. Laisse-moi prendre soin de toi. Laisse-moi affronter le monde pour toi. Laisse-moi me battre pour toi. »

Je me relève et avance doucement jusqu’à lui. Il regarde toujours le sol. C’est étrange. En général, il ne se détourne jamais. Me défie constamment. Ses joues ont pris une légère teinte rosée et je devine qu’il est un peu gêné par sa requête.

— Bien sûr. Pourquoi cette question ?

— Pour rien.

« Arrête de me mentir. Arrête de reculer. Parle-moi. »

Je me penche vers lui, attrape son menton entre mon pouce et mon index et le force à relever la tête. J’ancre mon regard au sien. Le capture.

— Noah…

Il devine ce que je souhaite. Daignera-t-il accéder à ma requête silencieuse.

— Je croyais que tu avais attendu que je m’endorme pour t’en aller. Je pensais que tu préférais finir la nuit sur le canapé. Et je comprends. Je sais bien que…

Mes lèvres sont sur les siennes. Un baiser bref, dur, possessif.

Il cligne des yeux, surpris par mon geste soudain. Pourtant, je crois que ça va devenir mon moyen favori pour le faire taire.

— Arrête de raconter n’importe quoi.

Je laisse glisser ma main le long de son bras, doucement, caressant sa peau encore chaude d’être restée emmitouflée sous la couette. Ma paume trouve la sienne. Enroule mes doigts aux siens.

— Allez, viens.

Il me suit docilement. Parvenu sur le pas de la porte de la chambre, j’entends mon portable émettre le bruit significatif de l’arrivée d’un texto. Je me fige un instant, songeant à faire demi-tour pour lire le message de Sam. Mon cœur s’emballe quand je comprends qu’il a dû trouver les informations demandées. J’hésite à revenir sur mes pas, à m’emparer du téléphone pour découvrir les mots inscrits. Mais la main de Noah dans la mienne, son corps tout près du mien tandis qu’il me tire légèrement dans la pièce, me convainc.

Je décide que le reste peut attendre demain. L’envie de m’allonger dans le lit, et de retrouver la présence de Noah contre moi, la fermeté de ses muscles, le parfum de sa peau, sa chaleur, supplante tout le reste.

Je ne me fais pas prier, et à peine quelques minutes plus tard, Noah blotti de nouveau contre moi, la tête posée sur mon torse, son bras entourant ma taille, je ferme les yeux et sombre dans un sommeil paisible.

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36 commentaires

Bones blacknight

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Il y a 7 ans

j'adore de plus en plus cette histoire

IsabellLamberetAdell

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Il y a 8 ans

C'est super bien

WhiteAir

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Il y a 8 ans

So cute...

Sara Devan

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Il y a 8 ans

Oh non. Je le sens pas ce texto

Suzy Lemaire

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Il y a 8 ans

Si Noah lit le texto....

Ikare

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Il y a 8 ans

"Bien sûr que j'essaie de déplacer ce téléphone par la seule force de ma pensée, d'ailleurs je peux aussi voler, et regarde mon sabre laser ! je suis en fait un jedi infiltré sur terre pour faire régner la paix et..." et je sais même pas pourquoi je fais des blagues sur star wars avec toi haha, il est temps qu'on fasse quelque chose pour ta culture de ce côté-là :P Breeeeef. Il faut vraiment que tu arrêtes de rendre Noah aussi touchant, j'ai juste envie de lui faire un câlin à ce pauvre garçon, il a bien besoin de quelqu'un comme James dans sa vie, même s'il en fait peut-être un peu trop lui à vouloir le protéger à tout prix x)

mylaure56

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Il y a 8 ans

J'espère que Noah ne va pas tomber sur ce message par hasard car ca risque de tout bousiller :-(

Samounette

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Il y a 8 ans

ça va mal finir cette histoire de texto....

F.V. Estyer

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Il y a 8 ans

Hahah, non mais c'était chou!! ;-)

alexia340

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Il y a 8 ans

mooooonnnnn ♥♥ ( constructif mon commentaire hein ;p )
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