F.V. Estyer Désirs défendus Chapitre 20

Chapitre 20

Durant toute l’heure, je lui jette des petits coups d’œil en essayant de rester discret. Je le vois plisser les paupières lorsqu’il regarde vers le tableau, et me rends compte qu’il ne porte pas ses lunettes. Il semble avoir du mal à déchiffrer ce que j’y ai écrit, et je le surprends à s’aider des notes de sa voisine pour les recopier. Il ne participe toujours pas en cours, se contentant d’écouter religieusement les échanges entre les élèves et moi. Je sais qu’il comprend, que ça n’a rien à voir avec son niveau d’anglais. Pourtant, aujourd’hui, malgré le fait qu’il tente de donner le change, je remarque que quelque chose ne va pas. Et c’est au moment où ses doigts massent ses tempes, se sentant sans doute migraineux d’avoir passé sa journée à forcer sa vue pour tenter de déchiffrer les notes des différents profs qui se sont succédés, que je remarque sa main.

Je ne l’ai pas aperçu avant, parce que son voisin de devant la cachait la plupart du temps, et qu’il prenait toujours soin de la dissimuler à la vue de tous — et en particulier à la mienne — sous sa manche. Malheureusement pour lui, j’ai surpris son geste inconscient avant même qu’il puisse baisser le bras. Mes yeux se posent sur ses articulations abîmées. Le sang a séché et forme une petite croûte brune là où la peau s’est déchirée.

Bon sang, que s’est-il passé ?

Tout ce dont je suis certain, c’est que cette fois-ci, sa blessure ne provient pas d’une bagarre. Il se l’est infligée à lui-même, en frappant dans quelque chose de dur. Sûrement un mur en béton.

Nos yeux se croisent et il devine que j’ai découvert ses meurtrissures. Une fois de plus, il ne baisse pas la tête. Comme toujours, il me fixe d’un air de défi, comme pour m’interdire de me poser des questions. Pourtant, je ne parviens pas à m’y résoudre. Des tonnes d’interrogations se bousculent dans mon esprit. Mais je fais mine de rien et reporte mon attention sur le reste de la classe, malgré tout parfaitement conscient qu’il est hors de question que je le laisse s’échapper cette fois-ci.


Une fois les cours terminés, le bruit familier des chaises raclant le sol, des affaires fourrées dans les sacs, des voix fortes, des éclats de rire, se font entendre.

Tout le monde sort de la pièce, et Noah s’apprête à les suivre lorsque je l’interpelle.

— Tu peux rester ici ? J’ai à te parler.

Il ne dit rien. Ne fais même pas mine d’acquiescer. Mais il recule pour laisser ses camarades passer en trombe devant lui sans lui accorder le moindre regard. Seule Maud s’arrête le temps de lui chuchoter quelque chose que je n’entends pas à cause du brouhaha. Elle lui offre un sourire et quitte la pièce, bientôt suivie par l’ensemble des élèves.

C’est alors que je me retrouve seul avec Noah.

Nous nous dévisageons un long moment, sans parler, ses yeux verts ancrés dans les miens. C’est devenu une sorte de rituel entre nous. De nous défier du regard et voir lequel des deux flanchera le premier. Encore une fois, j’en sors vaincu.

— Où sont tes lunettes ? je demande doucement.

Ces mots le désarçonnent. Il ne s’attendait probablement pas à ce que je lui pose une telle question, en apparence anodine. Il fronce légèrement les sourcils, interrogateur, avant de reprendre un visage neutre.

— Elles sont cassées.

— J’ai vu que tu n’arrivais pas à déchiffrer le tableau. Si tu veux, je peux photocopier mes notes pour être certain que tu sois à jour.

Je sens sa méfiance, même si je ne la comprends pas tout à fait. Bordel, à quoi ressemble sa vie si la moindre offre d’aide lui provoque un tel effet ?

— C’est bon, Maud m’a déjà filé les siennes.

Il se tait. Pousse un petit soupir contrit et finit par ajouter.

— Mais merci.

Je hausse les épaules et me remets debout. J’avance doucement vers lui, comme s’il était un animal sauvage que je craignais d’effrayer. Un pas après l’autre, je me rapproche, sans cesser de le regarder.

Je ne m’arrête qu’une fois tout près de lui. Si près nos torses se touchent presque. Je peux entendre sa respiration un peu plus saccadée. Il se mord la lèvre, se demandant sûrement ce que je lui veux.

Avec une extrême douceur, je baisse le bras pour attraper sa main meurtrie. Ses yeux sont complètement écarquillés à présent. Il est terrifié. Il tressaille lorsque ma paume se pose sous la sienne mais ne se dérobe pas. Sa peau est tiède contre la mienne. Je réalise que j’aime ce contact. Que je souhaiterais l’approfondir. Mais je me morigène intérieurement et, lentement, délicatement, je laisse remonter mon bras pour observer sa blessure.


_______________


Bonsoir,


Je suis désolée d'avoir coupé en plein milieu de la scène mais elle ne tenait pas en une seule fois (ça s'est joué à pas grand chose en plus...!^^)

Je profite également de ce chapitre pour vous prévenir que mon roman court "An Unexpected Love" est disponible depuis tout à l'heure sur Amazon. Pour ceux qui souhaiteraient se laisser tenter et découvrir un de mes récits entièrement terminé, c'est l'occasion!! ;-)

Merci encore pour votre fidélité, votre soutien et vos commentaires qui me font toujours extrêmement plaisir! ;)

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31 commentaires

Sauzay

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Il y a 2 ans

Enfin, quoique, il pourrait être interrompu...

IsabellLamberetAdell

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Il y a 8 ans

C'est une jolie histoire je trouve

Sara Devan

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Il y a 8 ans

Ps : je viens de commender an unexpected love

Sara Devan

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Il y a 8 ans

Enfin il s'approche !!!!

Ikare

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Il y a 8 ans

Hahaha, doucement mais sûrement, James s'éloigne de son rôle de professeur pour (essayer d') endosser celui de confident ! En vrai, c'est possible de savoir à l'oeil s'il s'est fait mal aux jointures en tapant sur quelqu'un ou sur un mur de brique haha ? Parce que bon, James il a un peu un 6e sens là s'il peut déterminer ça à vue, de l'autre bout de la classe ^^ En tout cas, il est plein de bonne volonté pour aider ce pauvre Noah, reste à voir si ce dernier va accepter une main tendue...

Elynwe

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Il y a 8 ans

O.o Teacher, doooon't ! XD C'est bien qu'il s'approche de lui, mais peut-être pas annoncer "je fantasme sur toi depuis la rentrée" d'emblée XD James : tu le sauve, et ensuite tu lui apprend le kamasutra revisité par un prof pervers sous les aimables directives de bazinga, mais d'abord, tu le sauves, on va faire les choses dans l'ordre XD Mais il fait tellement fragile, comme s'il était entouré d'un mur en carton sur lequel il a peint des briques pour faire croire qu'il était solide...

daguette

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Il y a 8 ans

coucou, je serai ravie que tu vienne me donner ton avis sur mon histoire "les caprices du temps" merci d'avance pour tes critiques constructives. A bientôt

F.V. Estyer

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Il y a 8 ans

Oh merci!!!

F.V. Estyer

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Il y a 8 ans

(Mon message ne s'est pas affiché en entier!) Je suis contente qu'il t'ait plu! N'hésite pas à mettre un petit mot sur Amazon (même quelques mots...) ca aide pour la visibilité! :-)

Nathb

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Il y a 8 ans

Je viens de finir an unexpecded love. Petite merveille. Bon dimanche
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