Fyctia
Chapitre 26. Max (Partie 2)
Ma mère et ma grande-tante fixent Nathaniel, charmées. Peter approuve son tout nouveau faux beau-frère. Taylor finit son verre après avoir roulé des yeux. Tabitha lève son cocktail dans ma direction, accompagnée d’un clin d’œil. April sourit d’une façon flippante et même mon père a tourné la tête vers nous. Quant à moi, eh bien je suis toujours aussi muette et… bouleversée ?
Je ne parviens même pas à décrire ce que je ressens. Les mots de Nathaniel m’ont plongé dans une sorte de black-out. Est-ce qu’il pense ce qu’il dit ou ce n’était qu’un mensonge pour duper ma mère ? Et surtout, pourquoi ai-je autant envie que ce soit vrai ?
— Vous prévoyez d’emménager ensemble ? questionne Peter.
Voilà que lui aussi se prend au jeu de l’interrogatoire !
— Ce n’est pas prévu pour le moment, réponds-je. C’est encore trop récent pour…
— Il n’y a pas de temps à perdre quand on s’aime, balance Tabitha.
— Nous voulons juste prendre notre temps et ne pas tout précipiter, raconte Nathaniel sa main qui caresse le bas de mon dos en forme de cercle.
Il appuie sa phrase en déposant un tendre baiser sur le haut de mon crâne. Des fourmillements s’emparent de mon corps tandis que je me colle un peu plus contre son torse. Je ne l’explique pas, je me sens bien dans ses bras, comme si c’était ma place.
— C’est réellement merveilleux, s’emballe ma mère. Je pensais qu’après sa rupture avec Lewis, Maxi ne retrouverait personne et qu’elle continuerait sa vie de débauche, mais je suis heureuse qu’elle soit tombée sur un homme comme vous, Nathaniel. Soyez patient avec elle, je sais combien elle peut être difficile parfois…
Super. Merci, maman !
— Elle n’a pas été tendre avec ce pauvre Lewis, continue-t-elle. Toutes ces fois où elle s’est vexée à cause d’une remarque de Lewis sur sa tenue ou encore sur ses goûts ! Il n’y avait pas de quoi en faire un drame…
— Maman, je…
— Je n’ai pas été étonnée d’apprendre leur rupture, me coupe-t-elle. En revanche, ça ne me plaît pas qu’il ait préféré se mettre avec Fiona. Cheryl n’a pas cessé de se vanter d’être la belle-mère de la perle rare… Mais par miracle, vous êtes là Nathaniel et avec vous nous allons remporter le concours pour la quatrième fois !
Visiblement, mon père n’a pas réussi à convaincre ma mère de me lâcher la grappe !
Elle parle de moi comme si je n’étais pas dans la pièce et ne se rend pas compte de la violence de ses mots. Je comprends qu’elle n’a pas eu une enfance facile avec sa propre mère. Néanmoins, ça n’excuse pas sa méchanceté envers moi. Je n’ai rien fait pour mériter ses critiques acerbes.
J’avale le reste de ma boisson puis agite mon verre afin que ma sœur me resserve. S’il faut que je subisse une soirée de reproches autant me noyer dans l’alcool. Peut-être que cela me donnera le courage nécessaire de l’envoyer paître. Je me détache du corps de Nathaniel et prends un peu de distance avec tout le monde. Je ferai mieux de rejoindre ma nièce dans la salle de jeu, au moins je n’aurais pas à entendre ma mère médire sur mon incapacité à garder un homme dans ma vie.
April me rejoint contre le dossier du canapé où je me suis « cachée », avec mon verre dans une main. Cependant, elle rechigne à me le tendre.
— Tu devrais faire attention avec cette boisson, me prévient-elle.
— Pourquoi tu as mis de l’arsenic dedans ? Si c’est le cas, tu ferais mieux d’aller donner ce verre au dragon !
— C’est le nouveau surnom de maman ?
J’acquiesce.
— Pourquoi est-elle obligée de se comporter comme une peau de vache avec nous ? soupiré-je.
— J’ai arrêté de me poser cette question en août dernier…
— C’est précis, pouffé-je en avalant une nouvelle gorgée.
April glousse. Le liquide dans ma gorge descend dans mon ventre et laisse une traînée de chaleur anormale comme si j’avais mangé un piment et qu’il commençait à agir en moi.
Elle n’aurait quand même pas mis de piment dedans ?
— Plus sérieusement, Maxi, ne fais pas attention à ce qu’elle dit parce que ça n’a aucune importance. Tu n’es pas définie par ce qu’elle pense de toi, ni par qui que ce soit d’ailleurs. Le seul avis qui compte est le tien. Tu es la seule à savoir ce qui est bon pour toi. Si tu as envie de te vexer pour une remarque sur ta tenue ou parce qu’une réflexion te blesse, tu as le droit. Ne brime pas tes émotions parce que des gens sont incapables de les comprendre…
Une larme roule sur ma joue. Les mots de ma sœur m’ont atteint en plein cœur et me procurent un bien fou. Toute ma vie, j’ai eu honte de laisser mes émotions s’exprimer. Je me trouvais immature à cause de ma susceptibilité ou encore stupide d’être aussi sensible. Seulement, ma sœur a raison. Ce n’est pas à moi de refreiner ce que je ressens. Je suis qui je suis, peu importe si ça ne convient pas à ceux qui m’entourent.
April essuie ma larme et me sourit.
— Le point positif dans tout ça, c’est que tu peux compter sur un petit ami bidon plus vrai que nature, murmure-t-elle.
Je soulève un sourcil.
— Ne joue pas celle qui ne sait pas, rit-elle. Il passe son temps à te défendre. Il a remis maman à sa place. Elle a fait celle qui n’a rien entendu, mais il a affronté le dragon pour toi… A mon avis, ce n’est plus qu’une question de minutes avant que ça se débloque entre vous…
— Comment ça une question de minutes ?
— Sois patiente, jeune Padawan… Mais mollo sur la boisson…
Elle dépose un baiser furtif sur ma joue avant d’aller piocher dans le bol de chips sur le plan de travail de la cuisine. Parfois, j’ai du mal à la suivre. Vaut mieux ne pas chercher à la comprendre, je suis bien trop épuisée pour cela.
La soirée suit son cours sans que ma mère ne m’inonde de reproches. Merci aux cocktails d’April qui ont le mérite de détendre tout le monde. Même cette chère Taylor. A vrai dire, j’ai perdu le fil des conversations. Pourtant, je n’ai presque rien bu. Je ris aux blagues de mon frère, imite un Oompa Loompa avec ma nièce redescendue de la salle de jeu, me blottis dans les bras de mon faux petit-ami aussi souvent que j’en ai l’occasion. Je me sens… bien sans être alcoolisée.
Quelqu’un a augmenté le chauffage ?
Ma main droite évente mon visage tandis que je sirote mon verre avec la gauche. Les glaçons dans le punch ne réussissent même pas à baisser la température de mon corps. Au contraire. La chaleur se propage de ma tête à mes pieds. Mon bas-ventre s’éveille sans raison, mes reins menacent de s’enflammer. J’étouffe dans mon pull en laine et si je ne le retire pas dans la minute, je risque d’être recouverte de plaques rouges.
Sans perdre du temps, je monte à l’étage et envoie valser toutes ces couches qui m’empêchent de respirer. Dans la salle de bains, j’enclenche le robinet et me passe un bon coup d’eau froide sur le visage et dans le cou.
Bon sang, ce n’est pas normal d’avoir aussi chaud !
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