Fyctia
Chapitre 17 Jay
— Salut Jay, tu te sens comment ?
Jay avait un mal de tête lancinant. Il n’avait pas cessé de se réveiller pour se rendormi. Affalé contre ses oreillers, son épuisement l’empêchait de mettre un pied par terre.
— Ça pourrait être mieux. Non pas que je ne sois pas content de te voir Alec mais, qu’est-ce que tu fais là ?
— Je suis ton garde-malade ! Ezra m’a laissé ses clés pour que j’ouvre.
— Il en fait trop. Je n’ai pas besoin qu’on me surveille.
— Il était super inquiet que t’ailles bosser. Du coup vu que lui aussi travaille ce soir, je me suis proposé pour veiller sur toi.
S’il s'était senti assez en forme, Jay aurait sauté de son lit, remercié Alec et l’aurait renvoyé chez lui en quatrième vitesse pour retrouver les deux étudiants en art qui comptaient payer pour l’avoir pendant trois heures.
Alec avait installé la chaise de bureau d’Ezra pour se mettre près de son lit. Il était en train de le fixer sans bouger.
— J’ai l’impression d’être avec un gardien de prison.
— Hein… Oh, pardon ! T’as besoin de quelque chose ?
— Oui, que tu te détendes. Cligne Alec. Et respire.
Le basketteur se mit à rire. Son corps se relâcha sur la chaise et Jay tenta tant bien que mal de se redresser sur ses oreillers.
— Tu n’as pas à rester ici Alec. Je peux m’occuper de moi.
— Ezra m’a envoyé un message tout à l’heure en me prévenant que tu dirais ce genre de trucs. Il m’a dit de pas me laisser avoir par ton air combattif et que quoi qu’il arrive, tu devais te reposer. Il prend ça très au sérieux alors moi aussi.
— Je vois… Tu te rends donc complice de séquestration, ça va chercher loin ça Alec.
L’air étonné du garçon régala Jay. Il soupira avant de sourire. Il y avait un mélange de tous plein d’aspects chez lui qui faisaient qu’il ne rentrait dans aucune case trop étriquée. Alec s'éclaircit la gorge avant de parler.
— Bon alors… pour éviter de me retrouver derrière les barreaux, qu’est-ce que tu dirais si on décidait plutôt de passer un moment ensemble, d’un commun accord ? Moi, j’aimerais bien ça.
Timide mais direct. Jay appréciait le mélange et se doutait qu’Ezra aussi. Il ne put retenir un bâillement qu’il dissimula trop tard derrière sa main. Son envie de dormir pendant encore des heures était grande. Il en avait besoin. Mais il estimait avoir encore plus besoin d’argent.
— J’ai vraiment besoin de travailler Alec.
— Tu fais quoi comme boulot ?
— Qu’est-ce qu'Ezra t’a dit ?
— Seulement dit que c’était pénible et ingrat. Et que je devais te demander directement.
Jay rigola avant de se laisser aller contre ses coussins. Ses yeux luttèrent pour rester ouverts mais cette conversation promettait d’être amusante pour lui.
— C’est plus un secret pour grand monde et je suis même surpris que tu n’aies pas entendu Lee en parler avant.
— Lee ? Quel rapport ? Il ne travaille nulle part.
— Sache que Lee est mon client. Parmi beaucoup d’autres sur le campus.
— Ton client ? Tu vends quoi ?
Le même air interrogateur persista sur le visage du basketteur pendant plusieurs secondes. Jay esquissa un sourire en prononçant sa réponse le plus distinctement possible.
— Mon corps.
Cela faisait longtemps qu'il n’avait pas dit à voix haute ce qu’il faisait à quelqu’un qui l’ignorait. Les premiers temps, lorsqu’il avait dû aller à la pêche au client, Jay devait discrètement expliquer ce qu’il proposait. Il avait été habitué à toutes sortes de réactions. Moquerie, intérêt affiché ou dissimulé, jugement. Mais cela faisait maintenant plus de deux ans qu’il avait ses clients réguliers et que le bouche à oreille faisait le reste pour lui. Alors d’une certaine manière, il était très curieux de voir la réaction qu’allait avoir le copain d’Ezra.
— On te force ?
— Non, ne t’en fais pas. J’aime le sexe. C’est mon choix.
— C’est… peu commun. Surtout sur un campus ?
— Hm, je sais. Ce qui fait de moi un produit d’exception que beaucoup veulent obtenir.
— Un… produit ?
— C’est une façon de parler.
Mais c’était bien comme ça qu’il se voyait. Son corps était un bien consommable qui lui rapportait de l’argent. Cela faisait un moment qu’il l’avait compris et donc il s’exploitait lui-même. Jay était certain d’être au clair avec ça.
— Et tes clients te traitent correctement ?
— Pour la plupart, oui. J’ai pas mal d’étudiants bien en place ici qui me font travailler. Et comme ils ne veulent pas se passer de mes services, ils ne m’envoient que des garçons dont ils sont sûrs. Il y a quelques imbéciles mais l’ignorance finit par bien vite les ennuyer. Donc tu vois, tout va bien pour moi.
— On dirait… une société secrète. J’avais aucune idée de tout ça.
— C’est ce qui fait ton charme. Et ce qui a dû plaire à Ezra en plus de tout le reste.
Une nouvelle réalisation éclaira les yeux d’Alec.
— C’est ça le sujet qui fait que vous vous disputez parfois alors…
— Hm. Ezra joue les chevaliers en armure mais je ne suis pas une princesse à sauver. Un jour, il finira par le comprendre.
— Tu crois ? Je sais pas franchement. Ezra s’inquiète pour toi car ce que tu fais comporte des risques non ?
— Comme dans beaucoup de travails j’imagine.
— Oui mais toi, tu n’as aucune protection. Tu n’es pas salarié et tout ça. Donc s’il t’arrive un pépin, c’est ta parole contre celle d’un connard.
— Tu penses que je suis inconscient ?
— Je sais pas, j’espère que non. Tu dégages cette assurance incroyable qui m’impressionne vachement mais je comprends qu’Ezra puisse se faire du souci. C’est normal quand on tient autant à quelqu’un, non ?
Jay garda le silence. Il n’y avait ni jugement ni dégoût dans la voix d’Alec. Il énumérait seulement des faits dont il n’ignorait rien.
— Et bien heureusement pour moi, il va être occupé à prendre soin de toi maintenant donc il va m’oublier un peu, ricana Jay.
— C’est ce que tu voudrais ?
— Qu’il arrête d’essayer de m’empêcher de travailler ? Oui !
— Qu’il t’oublie.
Le nouveau silence qu’il n’arriva pas à combler commença à le mettre mal à l’aise.
— Ça n’arrivera pas tu sais. Il ne t’oubliera jamais.
— Pourquoi… tu dis ce genre de chose ?
— Vous êtes très proches.
— Je… Je suis désolé. Tu n’as pas à t’en faire. Maintenant que tu es dans sa vie, je vais garder mes distances. Peu importe ce que tu as cru comprendre, c’est ma faute. Ne le blâme pas s’il te plaît.
— Je n’en veux à aucun de vous. Et tu ne dois pas t’éloigner de lui. Il a besoin de toi.
— Non, c’est de toi qu’il a besoin enfin !
— De nous deux. Tu penses pas que c’est possible ?
Jay fronça les sourcils. Il était désarmé par cette conversation qu’il n’arrivait pas à maitriser. Il secoua la tête et glissa davantage dans son lit.
— On devrait arrêter de parler de tout ça.
— Je t’ai mis mal à l’aise… Pardon, j’ai été trop honnête encore…
— C’est pas toi. Je sais pas… Je suis épuisé et… j’aimerais dormir maintenant.
Jay grelottait à nouveau. Le froid qu’il ressentait sur tout son corps était cependant moins éprouvant que le cœur désespéré qui tapait contre sa cage.
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