Nicolasm59 Coma Flash-back

Flash-back

Vienne, le 31 août 2022


Il est 11h lorsqu’elle franchit les portes de l’Hôpital Hannouche. Malgré le brouhaha incessant du hall d’accueil, elle est ailleurs, comme déconnectée du monde réel.


Son mari à côté lui soutient le bras avec le regard encore plus vide.


Leur monde s’est écroulé ce matin à 9h33.


Un appel de l’hôpital leur demandant de venir immédiatement. Cela concerne leur fils.


Ils n’en savent pas plus. Ils se sont d’abord regardés l’un l’autre, les yeux mouillés, sans réussir à décrocher un mot. Puis tels des zombies, ils ont mis leur manteau et ont pris les transports en commun machinalement alors que c’était la première fois qu’ils se rendaient à cet hôpital.


Quelqu’un la bouscule involontairement en passant. Elle reprend furtivement conscience. Elle doit trouver l’accueil, une âme charitable pour les renseigner dans cette immense ruche.


- Nous cherchons les soins intensifs.

- Il faut ressortir de ce bâtiment et ce sera le deuxième pavillon sur la gauche. Il y a là-bas un accueil où ils vous renseigneront.


La fin de l’été est très agréable à Vienne. Mais son mari et elle ne prêtent pas la moindre attention aux platanes qui jonchent le jardin bien entretenu. Même les pins noirs d’Autriche, fierté locale qui se répand progressivement en Europe à la faveur du réchauffement climatique, ne les émeuvent pas davantage.


A plusieurs reprises, elle manque de s’écrouler, voulant retarder l’échéance, l’inéluctable. Mais son mari la soutient. Des larmes ruissellent sur ses joues.


Ils pénètrent dans le pavillon, un hall beaucoup plus petit que dans le bâtiment principal avec deux colonnes en marbre qui encadrent le bel escalier typique du début du XX° siècle. L’atmosphère est beaucoup plus calme et froide, comme si la mort avait déjà pris possession des lieux. Deux bancs sur la droite. Seule une personne qui se tient la tête entre les mains y est assise. Ils ne parviennent même pas à voir si c’est un homme ou une femme. Au bout des bancs dans le coin droit de la pièce, une petite porte est fermée.


Sur la gauche, un bureau qui semble d’époque fait office d’accueil. Une dame d’un certain âge tape de toutes ses forces sur son clavier sans se soucier des entrées et sorties dans le pavillon. Comme si elle voulait à tout prix briser le silence mortifère qui l’enveloppe toute la journée.


Elle n’arrive plus à sortir un mot de sa gorge nouée. Son mari prend le relais :


- Nous avons été appelés pour aller en soins intensifs.

- Ah oui, prenez la petite porte sur votre droite et descendez l’escalier, ils vous attendent en bas.


Qui est-ce « ils » ? Elle n’y comprend plus rien. La personne qu’ils ont eu au téléphone un peu plus tôt a parlé d’une erreur médicale, d’un laboratoire ? Jamais leur fils ne leur a parlé de cela !


Son mari la guide par le bras jusqu’à la porte. Il l’entrouvre et un escalier étroit les emmène dans une grande salle au sous-sol.


Elle s’arrête à l’entrée de la salle, médusée.


Elle a l’impression d’assister à une scène irréelle comme dans le pire de ses cauchemars.


Ils sont une dizaine, présents, à les regarder en silence. Deux sont en blouse blanche et semblent être des médecins. Les autres sont en costume avec des petites mallettes. La plupart sont debout mais deux hommes particulièrement bien habillés et avec des cravates sont assis à une table face à des ordinateurs et une pile de dossiers.


Tous portent maintenant leur regard vers le centre de la pièce.


Sous la lumière blafarde, une table réfrigérée.


Sur la table réfrigérée, un drap.


Sous le drap, un corps.


Un des deux médecins vient les prendre par le bras pour les approcher de la table.


Elle est au bord de l’évanouissement. Les odeurs de renfermé se mêlent à celles des produits de conservation et lui oppressent la gorge. Elle voudrait se retourner et s’enfuir. Respirer l’air du parc, ne jamais revenir.


Mais son mari d’un côté et le médecin de l’autre l’amènent impitoyablement vers l’irréversible.


Arrivés devant le corps, le médecin, malheureusement habitué à ces cérémonies, les fait assoir sur une chaise côte à côte.


Les hommes en costume s’approchent de la table. L’un deux porte un badge Labopharm mais elle ne sait pas ce que ça veut dire.


Puis d’un coup sec, il descend un peu le drap et dévoile visage d’un jeune homme, apaisé dans la mort. Elle vacille et s’écroule par terre pendant que son mari hurle en se jetant sur le corps.


Quelques secondes s’écoulent qui paraissent des heures.


Puis le deuxième médecin se tourne vers l’un des hommes assis à la table et déchire ce silence :


- Maître, veuillez noter que Martha et Danielo Rodrigues ont formellement identifié leur fils Roberto.


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14 commentaires

Elsa Ténéra

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Il y a 3 jours

Me voilà :-) Merci pour ton passage !

Blanche de Saint-Cyr

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Il y a 5 jours

Ah ouais, chouette retournement de l'intrigue 👏

Nicolasm59

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Il y a 5 jours

Merci !

NohGoa

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Il y a 5 jours

Je dis Like !

Leo Degal

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Il y a 5 jours

Très bon chapitre ! 👌 Et c'était bien Marthaaaaaaaaa ! Son extrême sympathie si suspecte s'explique soudain ! 😂 Je me demande quand même quel était son plan tordu... Elle aurait mieux fait de rester en Autriche car elle va se faire démasquer 😈

Nicolasm59

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Il y a 5 jours

Merci ! Oui, bravo d’avoir deviné depuis un moment ! Son plan tordu dicté par la souffrance, la colére qui se transforment en une haine aveugle sera devoilé dans les derniers chapitres que je reecrirai dans quelques mois

Amphitrite

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Il y a 5 jours

Quelle horreur! Tu restitues bien toutes les étapes, on a l'impression de vivre ce cauchemar en live.

Nicolasm59

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Il y a 5 jours

Merci !
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