Fyctia
28. Victoria
Le ton de Sebastian est différent, ce soir. Malgré son chagrin, je sens une volonté de légèreté dans ses messages. Il est peut-être en train de boire, s’il est déprimé. Il aura honte de notre échange demain, je parie. Tant pis, lui parler me fait plaisir. Je me lance et lui avoue la triste vérité.
Je glousse de nouveau. Il est drôle et si gentil. Finirait-il par critiquer mon attachement bizarre au personnage de Loki, par exemple, comme le faisait toujours Arthur ? J’avais même perdu l’envie de voir les films et la série le concernant, car je craignais ses moqueries. Sebastian est-il comme lui ? Galant et bienveillant quand on le rencontre, et puis, une fois que ses serres sont bien ancrées en nous, dépréciateur et manipulateur ? J’en doute. Il n’y a rien de faux chez lui.
— Vee, qu’est-ce que tu fous ? On t’attend !
La voix de Brooke me fait sursauter et rompt la bulle que Sebastian Harper avait créée autour de moi. J’étais bien, dans ma chambre à peu près rangée et éclairée par la lumière douce de ma lampe de chevet. J’étais surtout bien car j’échangeais avec un homme intéressant, gentil et drôle. Et sexy, soit.
Je me lève à contrecœur et rejoins les filles au salon. Elles ont tout préparé. L’image de l’écran géant choisi par le père de Brooke est figée sur la première seconde du film et n’attend plus que moi. Je m’assois sur le canapé à ma place habituelle et tire sur le plaid, jusque-là monopolisé par Brooke.
— Désolée, je rangeais ma chambre.
Sur son fauteuil tourné vers la télé, Ava secoue la tête et marmonne dans sa barbe.
— Elle ne le fait jamais et il faut que ça lui vienne pile avant de commencer un marathon ciné.
Brooke glousse et lance le premier film. Mon téléphone buzze à cet instant, je sens mes joues qui s’échauffent. Je ne peux pas me retenir de lire le dernier message de Sebastian.
Je tape ma réponse le plus vite possible, tout en vérifiant que les filles sont bien prises par le début.
Je souris malgré moi quand je pense à Sebastian Stan, l’interprète du Soldat de l’Hiver. Connaît-il son existence ? Sait-il qu’il lui ressemble ?
Il va m’empêcher de suivre les aventures de Loki qui essaie de s’emparer de New York !
Il met juste un pouce levé pour ce message-ci. Je dois commencer à l’ennuyer. Je tente alors de me concentrer sur les péripéties qui s’enchaînent déjà à l'écran. Ça vibre de nouveau à côté de ma cuisse.
Je réprime un sourire pour ne pas alerter les filles.
Il va trouver ça abominable, j’en suis sûre. Je l’imagine se nourrir plutôt sainement. Il a peut-être même un chef à domicile, vu qu’il emploie un chauffeur.
— Qu’est-ce que tu fiches ? demande soudain Brooke. Qui t’écrit sans cesse ?
Mes joues deviennent écarlates, c’est certain. Heureusement que le salon est plongé dans la pénombre, seulement éclairé par les lueurs du film. Je repose l’objet coupable sur l’accoudoir du canapé, écran contre le tissu. Il vibre encore. Je me tourne pour répondre à Brooke.
— Oh, euh, ma mère, déclaré-je d’un ton que j’espère détaché.
— Oh putain c’est Harper ! s’exclame Ava. Avec des smileys !
Mon sang se glace dans mes veines. Elle m’a piqué mon téléphone !
— Eh, je rêve ! Ça se fait pas !
— Comment ça, « c’est Harper » ? Sebastian Harper t’envoie encore des messages ?
La voix de Brooke s’envole vers les aigus. Elle a mis le film sur pause et m’observe, les yeux plissés.
— Oui.
— Mais genre, souvent ? Et pour parler de quoi ? On peut voir ?
— Non !
Sa curiosité m’exaspère et me ravit à la fois. Son frère lui manque, je le sais. Elle s’inquiète pour lui. Parfois, quand elle croit que je ne la regarde pas, je note son visage tout triste. Tandis que je lui arrache mon téléphone des mains, je me délecte aussi des joues roses et de l’éclat vif dans les yeux d’Ava. Leurs soucis paraissent moins écrasants, en cet instant, alors qu’elles me charrient et jouent les curieuses.
— Tu peux pas t’en sortir comme ça, Vee, assène Ava. Tu dois nous donner quelque chose à nous mettre sous la dent.
Je pousse un long soupir et leur explique pourquoi il m’a écrit aujourd’hui. Leurs exclamations reprennent de plus belle.
— C’est un truc de malade ! Le grand Sebastian Harper te parle parce qu’il a un coup de blues ?
— Oui, bon, ça a rien d’exceptionnel, répliqué-je. C’est pas une immense star genre David Beckham, hein. C’est un homme comme un autre.
— Un homme diablement sexy, tout de même, remarque Brooke.
— Et mature ! ajoute Ava. Vous dites tout le temps que les jeunes de notre âge sont inintéressants au possible.
Brooke acquiesce avec véhémence. Je secoue la tête de gauche à droite. Elles exagèrent, non ?
Elles allouent trop d’importance à ma relation avec Harper. Relation qui n’existe pas. Elles continuent à déblatérer et à répéter combien ce qu’il m’arrive est extraordinaire. Je prends connaissance de son dernier message.
Ça s’agite beaucoup dans ma poitrine, tout de même.
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Marie Andree
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