Anna C Co-auteur au premier clic Chapitre 10 2/2 - Eric

Chapitre 10 2/2 - Eric

Je passe ma main sur ma tête et l’idée me vient brusquement au contact de mon bonnet. D’un geste rapide, je l’arrache de mon crâne et le pose sur la petite sphère. La taille est parfaite. Tant pis si je suis décoiffé désormais, cela m’importe fort peu face à ma soif de victoire. En revanche, je ne compte pas enlever en plus mon manteau, là, ce serait trop.


Mes doigts tapotent mon menton puis je décide de former de nouvelles boules afin de greffer des bras un peu plus solides. Pourquoi ne pas lui faire tenir un objet ?


— Sympa, lance Mélissa en retournant auprès de moi.


Elle s’avance et s’agenouille devant notre création pour ajouter des yeux et une bouche.


— Attends, l’interromps-je. J’ai une idée. Est-ce que tu n’aurais pas des boutons ?


Elle se redresse, pensive, la tête penchée de côté. En cet instant, elle me rappelle un peu les marmottes que je croisais quand j’étais petit, durant mes voyages en montagne avec mes grands-parents. Paix à leur âme.


— Je dois avoir ça, je reviens tout de suite !


Un problème de réglé. Est-ce qu’il n’y aurait pas d’autres variantes à ajouter en plus ? Je tourne sur moi-même puis fonce sur la porte-fenêtre pour gagner le salon, une idée en tête.

Je saisis une guirlande sur le sapin puis deux boules d’un bleu océan. Peut-être que le résultat fera un peu peur, mais il n’empêche que c’est original.


Dans ma précipitation, je manque de chuter sur l’une des marches de la terrasse menant à l’espace recouvert de neige. Mélissa m’observe en me rattrapant, confuse. Son attention passe de moi à ce que je tiens.


— Tu es un génie, murmure-t-elle du bout des lèvres.


Mon cœur rate un battement, et je sens mes joues s’empourprer. Pourquoi d’aussi simples mots me marquent à ce point ? Est-ce seulement parce qu’ils viennent de la bouche de l’autrice que j’admire ? Je veux croire que oui. Mais je doute de plus en plus que répéter ce mantra en boucle me soit d’une grande aide.


— Tu ne les poses pas ? s’exclame-t-elle en me jaugeant du regard après avoir disposé les boutons sur le ventre du bonhomme.


Mentalement, je me gifle puis m’avance pour placer les boules en guise d’yeux et la guirlande en écharpe.


— Si on ne gagne pas, je ne comprends pas, poursuit Mélissa.


Je recule, ne sachant pas trop quoi dire. Il ne manque plus qu’un objet dans l’une des mains du bonhomme. Sauf que rien ne me parvient en tête.


— Tu as un plan ? demandé-je en désignant les fameuses mains.


— Et pourquoi pas un stylo ?


Je frappe dans mes mains et hoche la tête.


— Excellente idée !


Tandis qu’elle retourne dans le chalet, je me rappelle brusquement d’un détail que j’ai omis. Je dois à tout prix parler à mon collègue. Peut-être que ce n’est pas le bon moment et l’endroit pour, mais je dois mettre au clair ce qu’il s’est passé la veille.


— Au fait, commencé-je d’une petite voix une fois que la jeune femme est de retour, excuse-moi pour hier.


Une fois le stylo planté dans une main du bonhomme de neige, Mélissa se fige avant de tourner les talons, les yeux grands ouverts.


— Moi aussi je te demande pardon. Je n’aurais pas dû te répondre comme ça, clarifie-t-elle.

Je secoue la tête, et sens un poids peser sur mes épaules.


— Ta réaction était légitime. Tu as parfaitement le droit de t’énerver et d’évacuer ce trop-plein que tu as en toi.


— Sauf que…


Je me mords la lèvre inférieure et agite l’index. Elle n’a pas à se justifier.


— Sauf que rien du tout. Je t’assure. Tu as le droit de t’exprimer, vous avez toutes le droit. Votre parole est importante pour faire bouger les choses.


Un nœud se forme dans ma gorge, et une main se pose sur mon épaule, m’oblige à croiser le regard de ma collègue.


— Merci, murmure-t-elle.


Ma bouche s’entrouvre sans qu’aucun son n’en sorte. Des sifflements ramènent notre attention ailleurs, en direction d’Imène, et je comprends que la bataille est terminée. L’heure est venue de noter les bonhommes de neige et d’élire les grands gagnants.


— Bien, voyons voir tout ça, s’exclame l’éditrice en se postant devant celui de Pablo et Estelle.


Des cailloux reposent sur le crâne de leur création. Sans doute pour représenter un cerf-tête. Pour les mains, ils ne se sont pas compliqué la tâche, juste deux brindilles. Maintenant que j’y pense… Est-ce qu’on aurait pu donner à un bonhomme de neige une pelle ? Probablement que non, mais l’image m’amuse.


— Pas mal, conclut Imène.


Ainsi de suite, elle analyse les différentes créations avant de terminer par celle de Mélissa et moi. L’ambiance se fait soudain plus lourde et il me semble que le visage de l’éditrice perd de ses couleurs, non pas en raison du froid, mais à cause de la vue de notre bonhomme. J’avoue qu’il fait un peu peur, et que ce sera sûrement davantage le cas la nuit, mais il n’empêche que c’est le plus original.


— Eh bien…, commence-t-elle avant de se racler la gorge. On dirait bien que nous avons trouvé nos gagnants.


Tous les regards tournent vers ma partenaire et moi. Un silence s’étire puis Imène ouvre grand les bras avec un immense sourire plaqué sur les lèvres.


— Félicitations, Eric et Mélissa, je crois bien qu’on n’avait jamais vu meilleur bonhomme de neige au monde ! déclare-t-elle. C’en est presque glaçant !


Elle secoue la tête puis grimace un bref instant.


— Malheureusement, je n’ai pas de médaille à vous offrir, seulement mes paroles.


Je ne sais même pas si j’aurais accepté la moindre récompense.


— Allez, souriez. Ne faites pas une tête d’enterrement.


Elle s’approche de nous d’un bon pas et attrape nos bras pour les tendre vers le ciel. Je m’autorise finalement à sourire, et échange un regard avec Mélissa. Une douce lueur s’allume dans ses yeux, et je me sens fondre. Bon sang, comment fait-elle pour briller autant ?

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3 commentaires

MelinaSANYA

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Il y a 14 jours

Bon, déjà : mettre un bonnet sur un bonhomme de neige avec autant de panache, c’est un art. Mais ce passage, c’est surtout une pépite de douceur à deux voix, saupoudrée de maladresses touchantes, de mots réparateurs, et d’une complicité qui réchauffe plus qu’un chocolat chaud 🥹💙 Mention spéciale pour ce moment où Eric fond pour un “Tu es un génie” et tente de s’en convaincre rationnellement… en vain. Et puis cette victoire un peu creepy mais franchement méritée ? Iconique 😂 Bravo, tu réussis encore à nous faire sourire avec les yeux qui piquent un peu.

Gottesmann Pascal

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Il y a 14 jours

Rien de mieux qu'une victoire à un concours de bonshommes de neige pour réchauffeur les cœurs. Qu'ils profitent tous les deux, ils sont trop mignons.
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