Fyctia
Chapitre 8 - SOREN (2/2)
Loin du calme des couloirs de l’hôpital, je me sens immédiatement comme un lapin au milieu d’une horde de hyènes. Les patients se tournent tous vers moi, reluquant ma blouse blanche et ma surblouse bleu marine.
Je repère rapidement ma patiente parmi la foule.
Mme Silvia Martinez est une femme de 53 ans si maigre que j’ai l’impression qu’elle peut se briser à tout instant. Elle a des yeux exorbités, angoissés, des cernes sous les yeux et le teint pâle malgré ses origines hispaniques.
Quand elle me voit, un sourire courbe ses lèvres.
— Dr Walter !
Elle se lève et serre son sac dans ses mains, attentive à tout ce que je pourrais lui dire – enfin presque, vu qu’elle ne veut toujours pas de mes calmants.
— Mme Martinez, je vous présente le Dr Erine Peters, fais-je en désignant mon interne. Le Dr Peters vient d’arriver à Twin Lakes et brille déjà par son talent pour débusquer les maladies les plus improbables.
Erine doit sentir mon ton ironique, car ses deux iris deviennent incandescents.
— Oh, vous deviez exercer dans un centre particulièrement pointilleux ! s’exclame Mme Martinez. Twin Lakes a de la chance de vous avoir !
— N’est-ce pas ? Dr Peters, d’après le dossier, quel examen conseillerez-vous à Mme Martinez ?
Erine termine d’étudier les comptes-rendus des différents bilans et s’éclaircit la gorge :
— J-J’aimerais proposer à Mme Martinez un test d’effort, avec votre accord. Je vois qu’il n’a pas été prescrit aujourd’hui, et face à ses signes, je…
— Formidable ! Je vous laisse entre de bonnes mains, Mme Martinez, je reviendrais vous voir plus tard. Vous, venez me trouver quand vous aurez les résultats.
Je tapote l’épaule de mon interne et me dirige vers la salle de repos. Heureusement, à cette heure-ci, ils sont tous à la cafétéria.
Je sors mon sandwich et me pose dans le calme.
Le calme.
Mon Dieu, ça fait du bien.
Mes pensées tournent autour d’Erine, à ses yeux lançant des éclairs, son indignation quant à ma manière de traiter les patients.
Je m’en moque. J’estime avoir été suffisamment patient avec elle comme ça. Pour qui se prend-elle ? Ce n’est qu’une interne.
On dirait moi quelques années auparavant.
À tout remettre en cause. À aller au front pour mes patients. À passer toutes mes soirées à éplucher les revues médicales pour me mettre à jour.
Toujours plus de connaissances.
Toujours plus de capacités.
Toujours plus d’excellence.
Et c’est pour ça que je dois l’empêcher de briller. Sinon, ma chute n’en sera que plus rude.
10 commentaires
Paupipauline
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Il y a un an
izoubooks
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Il y a un an
Kate A Brennam
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Il y a un an
AJ Broochmitt
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Il y a un an