Fyctia

Que penser de cette séance ? De ce film ? De ce scénario ? De ces différents choix stylistiques et scénaristiques ? Ma critique à chaud ne va pas être de tout repos, je vous le dis.

Je vous explique brièvement, le film parle d’un jeune botaniste découvrant une plante en voie de disparition sur un terrain convoité par une multinationale. Scénario classique en soi. Le botaniste doit donc se lier avec les habitants des villages voisins pour préserver ce trésor unique et malgré leur méfiance ils vont se battre contre la corruption.

En soit cela aurait pu être un meilleur film, certains plans n’étaient pas bons selon moi et l’émotion peine à transparaître. Peut-être que c’est dû à un jeu d’acteur trop contrôlé ou à des dialogues parfois trop explicites qui laissent peu de place à l’interprétation. On aurait gagné à une approche plus subtile à mon sens.

Résultat : je ne suis pas chamboulée. Malgré ça, c’est un film avec du potentiel, mais qui, à mes yeux, ne parvient pas à dépasser le statut de belles intentions. Pourtant, il y a de quoi en discuter, les paysages étaient selon moi sublimes et certaines scènes ont quand même réussi à capturer la beauté de la nature et sa vulnérabilité.

- Alors ? Qu’est-ce que vous en dites ? l’homme à ma droite m’interroge, tout sourire, comme s’il avait hâte que je lui expose mon avis.

- Eh bien je dois dire que je suis un peu déçue, et vous ?

Je ne développe pas car un homme monte sur scène, probablement le réalisateur. Et d’ailleurs mon mystérieux inconnu ne daigne même pas répondre à ma question. Je tourne discrètement le regard et je remarque qu’il est concentré sur l’estrade tout en employant une expression stressée. Mon attention se reporte devant moi et je pince les lèvres, si mon avis ne lui plaît pas, tant pis pour lui, il faut savoir respecter les goûts de chacun !

L’homme grisonnant qui s’attelait à régler son microphone était dorénavant prêt et se lança :

- Je vous remercie tous d’être présents ce soir, dans cette salle pour l’accueil de Ce que murmure la terre. J’espère que vous avez apprécié votre séance et le lieu de réception de cette avant-première. Je vous prie à présent d’accueillir le réalisateur du long-métrage que vous venez de voir et qui va pouvoir vous en dire quelques mots !

Ah, c’était donc pas lui le réalisateur ? Je me redresse sur mon siège pour essayer d’apercevoir du mouvement à l’avant au même moment où mon voisin se lève. Il doit vouloir aussi observer le premier rang, mais ce n’est pas une raison pour déranger toutes les personnes derrière nous quand même. Mais il n’en reste pas là et passe devant chaque spectateur de la rangée avant de descendre les marches. Mais qu’est-ce qu’il fait ? Ne me dites pas qu’il va monter sur l’estrade, il a tellement aimé le film qu’il veut en faire part a tout le monde ? Je le regarde mi-dubitative, mi-gênée en attendant qu’il prenne la parole :

- Bonsoir a tous et merci beaucoup de votre charmante compagnie ce soir.

Mais qu’est-ce qu’il raconte ?

- Je me présente, Maxence Alory, réalisateur sur le projet qui vous a été projeté il y a quelques instants.

Je me fige instantanément, enfin tout mon corps se fige sauf mes joues qui deviennent brûlantes. Je n’aurais même pas eu besoin de mettre du blush finalement. Et mon cerveau n’arrive plus du tout à suivre ce que le réalisateur communique. La honte. J’étais tout ce temps assise avec lui sans m’en rendre compte. Et je lui ai dit que son film était décevant accessoirement, mais bon tout va bien. Non pas que je n’allais pas finir par lui dire, mais j’aurais aimé savoir que c’était lui avant de m’exprimer sur mon avis. Quelle cruche je fais. Reprends toi Flavie, ça va aller, c’est rien, tu vas aller le voir quand il aura fini son speech et ça ira. Il va me détester c’est sûr, moi qui comptais lui poser mes petites questions habituelles je ne sais même pas s’il y répondra. Oh si la terre pouvait m’avaler tout entière je ne dirais pas non !

Je suis distraite de mes pensées par tous les spectateurs qui se lèvent pour s’éclipser du cinéma, signe que Monsieur Alory a fini son petit discours dont je n’ai rien écouté bien sûr, sinon ça ne serait pas marrant. En revanche, je suis moi-même tentée de suivre tout ce beau monde, malheureusement j’ai un pot d’honneur avec la brochette du premier rang et le réalisateur bien entendu. Je suis ravie comme vous pouvez vous en douter.

Je me lève lentement, en prenant mon temps, époussetant ma longue jupe avant de moi-même m’enfuir de la salle pour me rendre dans le hall qui a été aménagé en conséquence. Des tables avec de jolies nappes vertes trônent en plein milieu et des boissons ainsi que de petits amuses-bouches ont été disposées dessus. Je contourne discrètement les tables tout en attrapant un de ces petits canapés qui m’attire avant de m’avancer vers les sièges. Je n’ai pas fait trois pas après avoir enfourné mon amuse-bouche que je vois un homme se placer à travers mon chemin, tout sourire.

- Alors votre avis décevant ?

Maxence Alory se tient face à moi.