Fyctia
Chapitre 2
Cinq ans plus tard.
Le crépuscule enveloppait les rues de Paris d'une lumière douce, alors qu'Alex se frayait un chemin à travers la foule pressée, un mélange de détermination et d'appréhension sculpté sur son visage.
Son téléphone, véritable prolongement de sa main, vibrait frénétiquement. Des messages non lus s'empilaient, mais un seul captivait son attention. Un date Tinder l'attendait, mais l'excitation était ternie par un enthousiasme mitigé, les derniers messages échangés avec l’inconnu l’avaient laissée dubitative. Alex se demandait si elle devrait annuler, peut-être même poser un lapin au garçon qui l'attendait quelque part dans la ville.
La perspective de ce rendez-vous lui évoquait une teinte fade de déception. Elle songeait à des sujets de conversation prévisibles, aux silences gênants et aux faux-semblants habituels. Un soupir fugace s'échappa de ses lèvres alors qu'elle déambulait dans les rues pavées de la capitale. Paris, malgré son charme indéniable, semblait étouffer l'étincelle de son enthousiasme.
L'esprit d'Alex était un tourbillon d'idées. Les partiels approchaient à grands pas, dans deux petites semaines seulement. Elle se surprit à calculer mentalement le temps qui lui restait pour étudier, jonglant avec les priorités entre l'amour naissant et les ambitions académiques. Les cafés animés, les boutiques scintillantes, rien ne semblait pouvoir dissiper le nuage de stress planant au-dessus d'elle. Alors qu'elle franchissait l'entrée du métro, les pensées de l'étudiante tourbillonnaient. Les visages anonymes des passagers se mélangeaient dans un kaléidoscope. Ses pas pressés sur les quais résonnaient avec l'écho de sa propre hésitation.
C'est alors que son portable, agrippé dans sa main, interrompit son tumulte mental. Un prénom familier s'afficha à l'écran, provoquant une pause dans sa démarche. La tentation de décliner l'appel effleura son esprit, mais une curiosité mêlée à une pointe d'inquiétude la poussa à décrocher.
– Alex ? fit la voix familière au bout du fil.
– Marie ? Est-ce que tout va bien ? rétorqua la jeune femme, surprise.
– Théo nous a quittés.
Les mots semblaient résonner dans l'air du métro. L'annonce abrupte la fit vaciller, sans un mot de plus, Alex raccrocha brusquement.
Le bruit assourdissant de la foule s'évanouit, absorbé par une brume sonore. Aucune expression ne se dessina sur son visage. Elle ressentait un profond sentiment de confusion, ainsi qu’une émotion indéfinissable. L'air du métro devenait étouffant, elle avait désespérément besoin de respirer.
Sans attendre, elle s’élança sur le quai, les pieds frappant la pierre avec une urgence frénétique. La jeune femme émergea dans la fraîcheur de la nuit parisienne, aspirant l'air comme si chaque bouffée pouvait éclaircir les pensées qui tournoyaient dans son esprit. La ville s'étendait devant elle, mais tout semblait flou, comme si la réalité s'était estompée.
Ce connard était parti. Mais les souvenirs qu'il avait laissés derrière lui semblaient soudainement plus présents que jamais.
Les colonies de vacances de sa jeunesse, baignées de soleil et de jeux. Des lettres échangées pendant l’année dans l’attente de se retrouver pendant l’été. Des parties de foot, où la camaraderie surpassait la compétition, une complicité qui semblait indéfectible. Puis, un souvenir sombre vint obstruer tout le reste. Il y avait une époque où Théo n'était pas un enfoiré, mais simplement son ami le plus cher.
L’étudiante n’avait pas remarqué que ses pas l’avaient instinctivement ramenée au pied de son immeuble. Quand elle franchit le seuil de la porte, elle ne put plus se contenir. Des émotions refoulées depuis longtemps éclatèrent. Elle retira son écharpe et son manteau et se laissa tomber à genoux dans le hall.
La jeune femme ne parvenait pas à expliquer pourquoi, étant donné qu’elle haïssait Théo de tout son être, mais l’annonce de sa perte venait de raviver les souvenirs de leur amitié passée. De l’époque où ils n’avaient que douze ans et que le monde s’offrait à eux. La réminiscence de leur groupe d’amis inséparables et de toutes leurs bêtises pendant les deux mois d’été.
Alors qu’elle se redressait lentement, un nouveau message sur le groupe WhatsApp intitulé « Tocard Gang », n'ayant plus été utilisé depuis des années, apparut sur son écran.
« Les funérailles sont mercredi », avait écrit Marie. « J’espère que vous pourrez tous être présents, Théo tenait beaucoup à vous ».
Elle saisit ses affaires et grimpa doucement les escaliers la menant à son appartement. Le téléphone vibra à nouveau, Alex le regarda brièvement avant de l'éteindre sans hésitation. Elle n'était pas prête à affronter les voix qui tentaient de la réconforter ou les questions qui cherchaient à pénétrer sa sphère intérieure. Couchée sur son canapé, les yeux fixés sur le plafond, elle se laissa submerger par les souvenirs qui dansaient dans son esprit.
Une image se découpait clairement : deux pré-adolescents se tenant par la main, les cheveux en liberté sous le souffle du vent. Les Pyrénées s'étendaient devant eux, majestueuses et immuables, tandis qu'ils s'élançaient vers le bord d'une falaise, se jetant dans le vide pour plonger dans un lac plusieurs mètres plus bas. Le maillot de bain rouge d'Alex contrastait avec la palette douce des sommets en arrière-plan. Alors qu’ils étaient dans les airs, en l’espace d’un instant, les enfants avaient comme des ailes. L'eau en contrebas scintillait sous les rayons du soleil, leurs rires insouciants résonnaient, défiant la pesanteur.
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Lyse236
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Il y a un an
lagloiredesmots
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Il y a un an
EmyDestiny
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LoveHurt
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Il y a un an
izoubooks
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Carl K. Lawson
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Il y a un an