Pjustine Break, broke, broken le ciel est bleu

le ciel est bleu

J'avais l'esprit embrumé en cette douce matinée de septembre. Je dirais même que « embrumer » était un bien maigre mot pour définir l'état dans lequel je me trouvais à cet instant.


Un marteau piqueur martelait contre mon crâne fragile et ni l'aspirine, ni les litres d'eau fraîche ingurgités depuis le réveil ne pouvaient y faire quelques chose. La fin de soirée restait un peu floue. Il devait être cinq ou six heures du matin lorsque nous sommes rentrées, Marie et moi. Le souvenir de nos éclats de rire dans l'ascenseur résonnaient encore en moi. Pourtant, j'en avais totalement oublié la raison.


Il ne me restait même pas 24 heures pour me remettre debout.


Afin de pallier mon manque de sommeil et éliminer les grammes d'alcool encore présents, je n'avais plus qu'une seule chose à faire, me lever.


La douche fut longue et appréciable. J'enfilai une tenue confortable, me coiffai et me maquillai légèrement puis jetai un dernier regard en direction de la chambre de mon acolyte. Malgré l'heure tardive, la porte était encore fermée.


Une fois dehors, je constatai que la vie parisienne était, quant à elle, déjà bien active. Les âmes vagabondantes se croisaient et se décroisaient à une vitesse ahurissante. Si bien que j'en avais le tournis et des difficultés à respirer. Je m'arrêtai quelques secondes, attrapai ma tête entre mes mains puis soufflai intensément. Si les lendemains de soirées arrosées étaient déjà aussi féroces à la vingtaine fraîchement passée je me demandais bien ce qu'ils me réserveraient une fois la quarantaine entamée.

Pourtant, après quelques exercices d'inspirations et d'expirations, ma respiration semblait reprendre un rythme normal. Ce réjouissant phénomène me poussa à reprendre la route. Quelle route, ça par contre je n'en avais aucune idée. Le temps était si clément que le simple fait de marcher me satisfaisait.


Après une dizaine de kilomètres effectués et une légère récupération de mes capacités, je décidai qu'il était temps pour moi de m'assoir à la terrasse d'un bistrot et ainsi faire disparaître mes crocs. Je commandai un coca zéro bien frais et un sandwich au poulet. Malgré le déjeuner avalé, je restais un long moment attablée menton levé, profitant de la météo ensoleillée.


La serveuse, vêtue de noir de la tête aux pieds, me scrutait d'un œil mauvais. Cette fâcheuse constatation m'incitait à commander de nouveau. Quelques minutes plus tard, elle posa la bouteille sur la table, sans un mot ni même une attention à mon égard. Sa morosité et son manque d'amabilité me fichaient le cafard. Je la regardai s'éloigner, elle avait le pas lourd et les traits tirés.


Je me servais un grand verre d'eau gazeuse lorsque le numéro de papa s'était affiché sur mon cellulaire.


« - Alba?

- Papa?

Sa voix était agressive et son intonation remontée.

- Je viens d'avoir Isabelle au téléphone, qu'est-ce que c'est que cette connerie? Tu as fais la fête hier? Tu étais déchirée et tu dansais avec tout un tas de branleurs parisiens? Les torchons à scandales ne parlent que de ça depuis ce matin!

Aïe.

- Tu as cru ne pas te faire remarquer? Mais où avais-tu la tête Alba? Tu imagines qu'être à Paris change quelque chose? Bien au contraire, tu es cent fois plus exposée! Quelle idiote! Qu'est-ce que va penser le corps enseignant s'il tombe sur ces photos et vidéos de toi? Tu y as pensé Alba? Merde!

- Depuis quand te permets-tu de me faire ce genre de morale? C'est toi l'alcoolique de la famille, pas moi!

- Alba Dillon, tu... ».

Énervée, vexée et attristée, je raccrochai après avoir lâché la bombe et le coupai, au passage, dans sa lancée.


Il allait m'en vouloir, j'en étais persuadée. Cependant, je ne regrettais pas un mot de ce que je venais de lui balancer. Il jouait au papa donneur de leçons maintenant qu'il était soigné et cela me faisait bien rigoler. Qui est-ce qui en avait bavé lorsqu'il était enfermé? Son ingratitude me désolait plus qu'elle ne m'énervait.


Je profitai de ce moment de tension pour allumer une cigarette. La première bouffée me fît tousser ce qui ne m'empêcha pas de continuer.


L'amie de Marie avait passé l'intégralité de sa soirée à se photographier et à nous filmer sur la piste de danse, rien d'étonnant alors à ce que tous ces moments gênants circulaient dorénavant sur la toile. J'ai, tout de même, conscience de ne pas avoir été assez méfiante. Je ne le lui dirais jamais, mais papa avait raison, si mes professeurs venaient à regarder ce genre de vidéos me représentant, je perdrai en crédibilité. Cette situation ne se reproduirait plus, je m'en faisais le serment. Je serais une étudiante assidue et studieuse. Évidemment, je n'étais pas naïve au point d'imaginer une année sans la moindre soirée mais avec davantage de retenue et quelques verres en moins.


Cet événement avait, au moins, eu le mérite de m'ouvrir les yeux sur un point et non des moindres. J'étais la fille du grand Jacques Dillon et, de ce fait, une personnalité publique. A défaut de l'accepter, il était temps pour moi de l'admettre.


Sur ces bonnes résolutions, je décidai qu'il était l'heure de retourner à l'appartement. Je réglai ma note puis m'engageai sur le chemin inverse.


Je ne me rappelais pas avoir marcher aussi longtemps à l'aller tant j'étais essoufflée à l'arrivée.


Lorsque je franchis le seuil de l'entrée, Marie était installée sur le canapé à regarder l'écran télévisé, un pot de crème glacée entre les mains.


- Salut toi, pas trop dur? Me demanda ma colocataire.


- Un peu, toi par contre tu es si pimpante!


Mon propos était loin d'être exagéré si bien que j'en venais à douter quant à sa présence à mes côtés la nuit passée.


J'aurais même pu dire que sa fraîcheur était déconcertante, elle n'affichait pas le moindre signe de fatigue. Mais comment était-ce possible?


- Le maquillage fait des miracles! Bon, il faut que je me bouge, j'ai cours dans trente-cinq minutes. Ne m'attends pas ce soir, j'ai un date tinder, je ne sais absolument pas combien de temps ça va durer, ajoutait-elle, un sourire malicieux au coin des lèvres.


Aussitôt seule, je troquai ma tenue journalière pour mon pyjama fétiche.


Je venais de regarder trois films à l'eau de rose avant de pouvoir enfin rejoindre les doux bras de Morphée.


Demain serait le premier jour du reste de ma vie.

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2 commentaires

Nascana

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Il y a 5 ans

Aie ! Faire les journaux à scandale, c'est dur !
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