Fyctia

Je commence à manger mon repas et elle ne m’accorde aucun regard. Je regarde le titre de son livre et il s’agit du premier tome de la saga Outlander. En tout cas, j’adore la série.

J’émets un sourire en coin et entame la conversation :

— Il est bien ton livre ? J'ai adoré la série.

J’attire son attention et elle me regarde par-dessus son roman.

— Oui, il est génial ! Mais je te conseille de lire le livre. Tu sais qu'une adaptation n’est jamais comme le roman. Tu peux passer à côté de beaucoup de choses, comme des scènes ou alors des aspects psychologiques qui ne sont pas abordés dans la série.

Elle pose son livre sur la table et me tend sa main.

— Enchantée, moi c’est Kate. Tu es nouvelle ?

— C’est exact !

Puis nous parlons tout au long de notre pause déjeuner. Kate est une vraie pipelette, mais ça me fait du bien de rencontrer de nouvelles personnes. J’étais persuadé que les gens seraient snobs, mais peut-être me suis-je trompée ?

*

Le dernier cours se termine enfin. Je me dirige vers le complexe sportif, intitulé Hercules, de l’établissement où se trouve la piscine. Une fois dans les vestiaires, je me change et me dirige vers les bassins.

Il n’y a personne. Jakob ne doit sûrement pas être encore arrivé. Je décide de m'asseoir au bord de l’eau en l’attendant. Je repense à cette journée en fixant l’eau. Le lycée est magnifique, les cours sont intéressants et peu communs. Cette première journée n’a pas été si terrible finalement. Plus, je me perds dans mes pensées et plus je ressens une attirance vers l’eau. Sans m’en rendre compte, je suis sous l’eau, mais lorsque je le réalise, j’entends encore ses murmures devenant peu à peu des voix :

I moíra sou se periménei. Enóste tous anthrópous sas. I moíra sou se periménei. Enóste tous anthrópous sas.*

Je ne comprends pas, mais que signifient ces mots, bon sang ! Tout d’un coup, des bribes d’images me viennent. On dirait des flashbacks. J’aperçois le visage d’un homme, brun aux cheveux courts. Il a des yeux bleus couleurs océans avec une barbe de trois jours. Il a l’air d’être énervé en me regardant, comme s’il avait des éclairs dans les yeux. Ai-je fait une bêtise ? Je m’éloigne de lui et je vois le visage de ma mère en larmes. Ils ont l’air de se disputer. Est-ce moi quand j’étais bébé ? Ma mère me tend vers lui, mais cet homme refuse de me porter ni même de me regarder. Il a l’air de prendre ses affaires et de partir.

Soudain, je sens des bras s'affairer autour de moi et me remonter à la surface. Je me débats. Que se passe-t-il ? Je regarde mon agresseur et il s’agit de Jakob. Il a des traces d’inquiétude sur son visage. J’essaye de le repousser, mais je n’y arrive pas.

— Jakob ? Qu’est-ce que tu fais ? Mais lâche-moi ! crié-je en me débattant.

Il me regarde, ses yeux bleus me foudroient sur place. Je profite de cette occasion pour le repousser une nouvelle fois.

— Uhé ? T’es vivante ? Tu n’as rien ? me questionne-t-il en me tirant par le bras pour que je sois plus proche de lui, puis me tient par la taille et me pose sur le rebord de la piscine.

— Bah oui, je vais bien ! C’est à toi que je devrais dire ça ! Qu’est-ce qui t’es passé par la tête de me faire peur comme ça, lancé-je rageusement.

— Uhé, je suis arrivé à la piscine et je t’ai vu sous l’eau pendant de longues minutes. Je t’ai appelé plusieurs fois et tu ne répondais pas. Je croyais que tu t’étais blessée et que tu étais inconsciente. Tu as déjà fait un malaise hier. Je ne sais pas, mais mets-toi à ma place, bon sang ! Assène-t-il.

C’est à ce moment précis que je remarque qu’il porte son uniforme dans la piscine. Ce qu’il dit est vrai ? Je regarde autour de moi et j’ai un trou de mémoire, je ne me souviens plus du pourquoi et du comment je suis arrivée sous l’eau.

— Je ne me rappelle de rien, dis-je en marmonnant dans ma barbe. Je t’attendais sur les rebords de la piscine. Je te jure, je ne sais pas ce qu’il s’est passé.

Jokob sort de la piscine, ces vêtements moulent à la perfection son anatomie. Il serre les poings jusqu'à ce que ces doigts deviennent blancs. La pièce est chargée en électricité, une tension pesante. Une noirceur passe au travers des iris de Jakob. Je me sens mal, et toute petite. J’ai l’impression d’avoir fait une énorme bêtise et que je vais passer un sale quart d’heure.

— Allons nous changer, on rentre au manoir.

— Mais on ne s’entraîne pas ?

— Je t’ai dit change-toi, on rentre au manoir. On se retrouve devant le lycée. Tu rentres avec moi en voiture, est-ce clair ?

Mais que lui arrive-t-il ? Je ne le reconnais pas. Il est distant et froid.

Je pars et lui obéis.

Nous sommes arrivés au manoir, tout le trajet a été silencieux. Jakob ne m’a absolument pas parlé ni même posé un regard sur moi. Il a toujours son air sérieux, je vois les muscles de sa mâchoire tressaillir. Arrivés dans la cour, il sort de la voiture et part à vau-l'eau.

Ai-je fait quelque chose de mal ? Ou ai-je dit quelque chose qui l’a vexé ?

Je vais vers ma chambre en regardant le sol.

— Uhé ? Comment s’est passé ta première journée d’école ? Tu es bien soucieuse, en me regardant d’un air circonspect, me questionne Shelby.

— Coucou Shelby, ça va. Le lycée est tellement beau, si tu savais. On dirait un immense château et les cours ça allait aussi. C’est juste que… Je crois qu'on s’est fâché avec Jakob…

— Ah bon ? Qu’est-ce qui s’est passé ? Dis-moi tout.

— Je ne sais pas. Il a changé d’humeur d’un coup.

— Mmh… Allons, allons ne t’inquiètes pas. Il a peut-être eu une mauvaise journée. Ce n’est pas forcément de ta faute ma puce. Il a sûrement dû renfrogner sa mauvaise humeur sur toi, me rassure-t-elle en souriant.

Tu sais quoi ? Je vais vous préparer un petit goûter, comme guise de cadeau de la paix, d’accord ? Va donc lui apporter et parle lui. Il se confiera peut-être à toi.

— Tu as raison. J’y vais de ce pas. Je prends le plateau préparé avec soin par Shelby et je me dirige vers sa chambre. Lorsque j’arrive vers la porte, j’entends le cours d’une discussion. Ce sont celles du Comte et de Jakob. Mon instinct me dit de rester derrière la porte et d’écouter ce qu’ils se disent.

— Vice-Président, je crois que sa mémoire revient petit-à-petit. La dernière fois, nous la retrouvons évanouie devant la cascade et aujourd’hui je l’ai retrouvée au fond de l’eau pendant plusieurs minutes. Son seizième anniversaire arrive dans quelques jours, il est temps de lui dire toute la vérité, vous ne pensez pas ? lance Jakob.

Le Comte est dos à Jakob avec les mains croisées. Puis, après quelques longues secondes, il se gratte la barbe d’un air pensif et répond :

— Merci pour ses informations, Major. Nous devons passer au plan B.

— À vos ordres, répond Jakob en étant au garde-à-vous et lui faisant un salut militaire.

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*Ta destinée t’attend. Nous sommes ton peuple.