Fyctia
Chapitre douze 3/3
Trevor
— Putain, mais c'est quoi ton problème ? s’énerve Clarisse envers Helena.
— Oups, je crois que j'ai manqué le panier.
— Non, tu crois ? Ce n'est pas comme s'il se situait là-bas.
Elle pointe de son index l'endroit en question qui se trouve tout de même à un bon mètre de nous. C'était un ratage voulu, on le sait tous.
— Oh ça va ! peste mi belleza en retour. Tu ne vas pas râler parce que tu t'es pris un stupide ballon dans la tête. Qu'est-ce qu'il y a, je t'ai enlevé le peu neurone qui te restait ?
De ses doigts, elle mime des pleurs exagérés, tout en boudant de sa bouche.
— Il n'y a pas mort d'homme, tu es toujours vivante.
Elle se détache de moi, plaque ses mains contre ses hanches, relève le menton, puis lui réplique :
— Je te signale que tu viens de gâcher un échange de baisers avec mon petit copain.
Helena perd de son sourire. Elle nous foudroie. Une aura malveillante se dégage de son corps pour se mêler à la teinte rougeâtre de sa robe qui attire l’œil sur elle par sa beauté. Et bien que l'on ne le perçoit pas à l'œil nu, je la connais bien assez pour lire en elle. Elle n'a absolument aucun secret.
— De toute façon, tu ne sais même pas embrasser, répond Helena qui n’a pas bougé d’un pouce. Sinon, il passerait son temps collé sur ta bouche.
— Ah oui, vraiment ? riposte sa rivale.
Elle se saisit du gobelet, l’avale cul sec – alors que Dori n’a pas tiré dans le panier – et elle contourne ensuite la table pour atteindre notre position.
— Oui, vraiment. Dois-je te rappeler que tu as devant toi l'ancienne meilleure amie de ton petit copain ?
Elle effectue un pas vers Clarisse, relève légèrement la tête pour lui faire face et ajoute :
— Les filles comme toi, j'en ai vu passer à foison ! Ne te crois pas privilégiée parce que tu sors avec lui en ce moment.
Ses lèvres s'étirent dans un large sourire. Elle se retourne un instant vers Maxine, toujours à la même place, et qui est désormais aux côtés de Dori. Celle-ci l’observe, amusée par un tel spectacle.
— Je devrais peut-être te donner des cours, pour pouvoir le satisfaire, non ? déclare-t-elle, son attention de nouveau sur son ennemie numéro un.
Helena tente de la pousser dans une colère. Elle essaye de la chercher en lui lançant des piques, en insinuant qu'elle est une piètre petite amie qui ne parvient pas à embrasser correctement. Et je suis sûr que si elle le pouvait, elle lui dirait qu'elle est très mauvaise au lit, mais elle ignore si nous couchons ensemble ou non ; bien que j'aie précédemment sous-entendu que les fellations avaient eu lieu.
— Je n'ai pas besoin de toi pour savoir embrasser Trevor ! crache-t-elle en effectuant un pas vers elle.
Deux poules qui se battent pour le même coq. Dommage qu’on n'ait pas pensé à mettre un ring.
— Je le fais déjà très bien, ajoute-t-elle. Tu ne te souviens pas de la première fête ?
Un rire nasal s'extrait de son petit nez en trompette.
— Tu plaisantes ? Il semblait dégoûté. On aurait cru qu'il embrassait un cadavre, raille Helena.
Je me mords la joie intérieure pour retenir un amusement qui tente de s'échapper.
La mâchoire de la seconde blonde se contracte devant une telle offensive. Une telle insulte. Helena attaque fort et elle paraît savoir où viser exactement.
— Laisse-moi t’apprendre et observe.
Tout à coup, sans me demander la permission, Helena agrippe mon pull pour me ramener à elle et plaque brutalement ses lèvres contre les miennes. Elle échange un premier baiser, qui se veut langoureux, en forçant la barrière qui sépare nos deux langues avec la sienne. Ma main glisse sur sa taille et je la rapproche un peu plus de mon corps, alors que nos lèvres se scellent entre elles dans une odeur vanillée qui plane dans l’air. Ce moment est rempli de chaleur torride, intense. Un gouffre sans fond s'ouvre sous nos pieds pour nous faire plonger dans les abîmes de l'enfer. Nous brûlons ensemble dans un brasier incontrôlable. Elle est une putain de drogue que l'on consomme pour la première fois et qui, on le sait très bien, nous rendra accros. Je n'ai jamais touché à cette merde, pourtant, je n’hésiterai pas à la dévorer encore et encore sans attendre une seule seconde de plus. Elle commence à reculer son minois, prête à rompre le contact, mais ma saisie autour de sa taille l'en empêche et elle repart de plus belle.
Je perçois ce qui me semble être un léger gémissement, alors que nos souffles se mélangent l'un à l'autre. Mon rythme cardiaque frôle les quatre cents battements par minute. J'ai l'impression d'être au volant de ma voiture sur l'un des circuits, à plein bal, zigzaguant entre les véhicules et prenant des virages bien trop vite, bien trop serrés qui me manqueraient de m'envoyer rejoindre Tupac. J'ai longtemps cru qu’Helena était une angesse, parfois déchue, alors qu’au bout du compte, elle est juste Perséphone, la reine des enfers.
Elle est mon adrénaline qui me fait bander lorsque je franchis cette ligne.
Tandis que la fête est censée fuser autour de nous, cet échange ne m'offre que le silence. Il n'y a qu'elle et moi, à cet instant présent, et je me découvre en train de perdre un jeu que j'ai moi-même lancé. Je sais où voulait en venir Clarisse, elle souhaitait la pousser à bout. Finalement, c'est elle qui prend les devants sur cette bataille, alors qu'elle me fait sombrer. Je sombre contre la bouche de mi belleza, et bordel que je déteste ça. C'est une putain d'erreur.
Elle est la première à se détacher, nous laissant tous les deux hors d'haleine. Nos pupilles se fixent un instant, pendant que la distance se forme entre nos corps en ébullition. Ses lèvres pleines et humides sont entrouvertes. Je suis sûr qu'elle se rend compte, elle aussi, de la bourde qu'elle vient de commettre.
Ce qui me paraît être une éternité ne dure finalement que trois secondes. Trois secondes où le temps se suspend pour nous couper du monde. Puis Helena se retourne tout à coup vers Clarisse.
— Oh pardon, j'ai totalement oublié de te demander ta permission, sourit-elle. J'espère que tu n'es pas trop jalouse.
La victime de sa méchanceté peine à trouver ses mots. Dori ne peut s'empêcher de se marrer devant cette scène ; d'autres également. Ce n'est pas Helena qui est humiliée ce soir, mais c’est la sœur des Theta Zeta Mu. Notre couple ne sera plus pris au sérieux après ça ; j'en mettrai ma main à couper.
— C’est comme ça qu’on embrasse Trevor Prieto, pétasse.
Comme une reine, Helena Brielle lui tourne le dos puis quitte, sans un dernier regard, la pièce. Maxine ne perd pas un seul instant pour la rejoindre dans un rire cristallin qui produit un écho à travers la musique. Je ne peux m'empêcher de contempler cette petite blonde qui mouve ses hanches aux rythmes de ses pas, dans cette robe rouge qu'elle a bien fait de ne pas déserter.
Je suis sûr d'une chose, cette guerre entre nous va me rendre dingue. Parce qu'Helena est à moi. Pour l’instant.
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