Fyctia
Sages paroles
Le lendemain matin, je suis prête alors qu’Epsolis n’est toujours pas levé. Je dois dire que je n’ai rien dormi et ce voyage en « compagnie » d’Inaki ne m’enchante guère.
Je perçois qu’Eriem est déjà debout, car je l’entends dans la cuisine. Elle n’a pas envie de me louper et elle sait que je suis capable de partir sans l’avertir.
Quand je descends, je vois qu’Adriel est là, lui aussi. Bizarre, nous n’avions convenu de nous retrouver seulement dans une heure. Mais Eriem n’est pas là. C’est Adriel qui le préparer le petit déjeuner ?
J’en suis là dans mes réflexions lorsque je me rends compte que des mains câlinent le dos de mon ami. Je comprends mieux pourquoi, il est ici. Après m’avoir raccompagné hier soir et profité d’un dernier verre, il n’est jamais rentré chez lui.
— Hum, hum…
Je m’éclaircis la voix pour leur signaler ma présence, mais ils sont tellement passionnés dans leur étreinte qu’ils ne m’entendent pas.
Je sais que je ne devrais pas, mais je me sers le plus discrètement possible mon petit déjeuner, puis m’attable en les fixant. J’en suis à la moitié de mon bol lorsque je n’en peux plus. Je pouffe de rire.
— Vous êtes sérieux ? les interromps-je. Dix minutes sans décoller les lèvres ni ouvrir les yeux.
D’un bond, ils s’écartent l’un de l’autre.
— Mais, qu’est-ce que tu fais là ? s’étonne Eriem. Tu ne devais te lever que dans vingt minutes.
— Le sommeil s’est laissé désirer, et il a été très léger, me justifié-je. Et vous alors ?
Je les désigne les deux, d’un geste du menton.
— On allait te le dire, commence Adriel.
— Nous sommes sortis ensemble pour la première fois au début d’Hiternum, complète Eriem, visiblement mal à l’aise.
Soit presque deux mois. Je comprends pourquoi Adriel voulait tant me raccompagner chaque jour.
— OK.
Je me lève, les laissant les deux plantés là.
Je suis vexée, même si je me doutais qu’il allait se passer un truc entre ces deux-là tôt ou tard.
— Ariane, dit Eriem en entrant dans ma chambre.
— Non, je n’ai pas besoin d’explications, la stoppé-je avant qu’elle ne se repende en excuses.
— Je pense que si, au contraire.
— Tu fais ce que tu veux, Eriem, tu le sais. Je ne vais pas vous reprocher de me l’avoir caché. Mais c’est juste que ce matin, avant le pèlerinage le plus important de toute ma vie, j’aurais apprécié de prendre mon petit déjeuner en compagnie de mes amis plutôt que les regarder se tripoter. Maintenant, excuse-moi, mais il faut que je me prépare.
Mon ton lui indique que je n’attends aucune réponse de sa part. Elle se retourne puis s’en va.
Je n’ai jamais été aussi rapide pour m’habiller. En même temps aujourd'hui, je dois porter les habits du pélerin. J’ai décidé de fausser compagnie à Adriel et je vais me rendre seule à l’Académie. Je descends les escaliers le plus discrètement possible et sors de chez moi, sans un regard en arrière.
Je profite du chemin pour me calmer, car même si je ne leur en veux pas, je suis tout de même énervée. Et ma journée va être bien assez chargée en émotions pour que je m’encombre de celle-ci.
Lorsque j’arrive, Inaki est déjà là. Je me surprends à l’observer. Même s’il reste un crétin à mes yeux, je ne peux nier qu’il a du charme.
Le Sage de l’Académie m’intercepte et me tire à l’écart.
— Ariane, avant de partir, tu dois savoir que si tu obtiens des réponses, elles pourraient ne pas être conformes à tes attentes.
Le Sage ne sort jamais de la tour dans laquelle il habite, au-dessus de la bibliothèque. C’est un choc de le voir là et surtout qu’il me parle. D’habitude, les Sages, gardiens de la mémoire collective et protecteurs du clan ne s’expriment jamais face aux simples gens comme moi. Ils sont très reconnaissables, grâce à leur tunique violette, leur couvre-chef de la même couleur et leurs yeux d’une teinte si claire, qu’ils paraissent blancs, seule leur l’iris noir se distingue.
— Je ne comprends pas, lui confié-je.
— Ce voyage est pour toi plus qu’une quête de pouvoir, continue-t-il de façon énigmatique. Laisse ton esprit te guider.
Il me serre la main comme pour me souhaiter bonne chance puis disparait avant que je n’aie pu ajouter autre chose.
— Qu’est-ce que tu fous là ? demande une voix dans mon dos que je commence à trop bien connaître.
— Je t’attendais, lui rétorqué-je avec ironie.
— Ne joue pas à la plus maligne avec moi, me menace Inaki, tu sais que je suis capable…
— Tsss, tsss, tsss… N’oublie pas que tu es mon protecteur, lui rappelé-je avec un clin d’œil avant de rejoindre nos coéquipiers, même si moi, je ne suis pas là en tant que tel, je suis plus à l’aise avec eux, qu’avec les gamins.
Le directeur de l’Académie s’approche de moi. Croiser deux figures aussi importantes la même journée, c’est vraiment bizarre.
— Ariane, vous partirez devant avec Inaki et la moitié des porteurs. Vous pourrez ainsi installer le camp pour l’arrivée des autres.
— Très bien Directeur, acquiescé-je.
— Bon voyage, termine-t-il avant se diriger vers le groupe qui commence à se rassembler.
Je rejoins Inaki pour qu’il ne parte pas sans moi, mais j’aperçois Adriel qui me fonce dessus, furieux.
— Tu as osé me fausser compagnie, s’indigne-t-il. Je t’ai attendu plus de quinze minutes avant de me rendre compte que tu étais partie.
— Oui, tu étais trop « occupé » pour me voir, lui rappelé-je, la voix acide.
— On s’était donné rendez-vous Ariane, je ne pensais pas que ma relation avec Eriem te perturberait autant. Si…
— Laissez-moi en dehors de votre histoire, j’avais besoin de faire le point et d’être seule. Visiblement, mes meilleurs amis ne trouvent pas le temps de m’informer qu’ils couchent ensemble.
— Mais Ariane…
— J’ai dit stop. Maintenant, excuse-moi, mais je suis attendue. On se verra au campement ce soir. Fais attention à toi.
Et je le laisse planté là et rejoins mon protecteur.
— Enfin ! s’exclame ce dernier en m’apercevant. Ton chéri t’a mis en rogne on dirait.
— C’est juste un ami, répliqué-je.
— Bien sûr, vu le regard qu’il te lance, on ne dirait pas. Je peux le rendre jaloux si tu veux ?
— Ce. N’est. Pas. Mon. Chéri.
— Si tu le dis.
Je sens sa main me caresser le dos.
— Mais dégage, le repoussé-je. De quel droit tu te permets, tu ne m’apprécies même pas.
— Je vérifiais juste mon hypothèse, ricane-t-il.
— Et ?
— J’ai eu ma réponse.
Je me retourne et vois Adriel en train de partir dans la direction opposée.
Je hausse les épaules et prends mon sac. Je n’ai pas confiance dans les soldats qui nous accompagnent après le dernier entraînement. Je préfère m’occuper moi-même de mes affaires.
— Bon on y va ? leur demandé-je, passant mon arc et mon carquois dans mon dos.
Et sans attendre leur réponse, j’entreprends le voyage le plus important de ma vie.
17 commentaires
Sam Laurent
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Sand Canavaggia
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Charlie L
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Gabriele VICTOIRE
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Nightingale87
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