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Mathieu - Partie 3 (2/2)
Les élèves se tournent vers Mathieu, terrifiés. Les yeux écarquillés, ils se séparent et murmurent des paroles incompréhensibles.
Les battements du cœur de Mathieu frappent dans ses tempes. Son sang bouillonne. Les yeux exorbités, il se dirige vers eux, poings fermés. Il est prêt, s’il le faut, à les frapper pour les faire sortir.
— Sortez… Sortez !
Les élèves abandonnent leurs feuilles et partent sans demander leur reste.
Mathieu suit leur mouvement, se dirige vers la porte et la ferme en la claquant. À peine l’a-t-il fait qu’il s’écroule en pleurs. Il laisse la terreur l’envahir. Le stress prend le dessus sur son corps.
Il respire rapidement, essoufflé, en larme, il ne pense plus à rien à part au danger de mort qui guette son fils. Et ça n’arrange rien.
Tremblant, il cède à ses nausées. Il a à peine le temps de saisir la poubelle avant de vomir son déjeuner.
Encore plus exténué, il parvient cependant à se redresser et à s’adosser contre le mur de la classe.
Vomir avait eu comme un effet salvateur. Comme s’il avait recraché ses angoisses. Ça l’avait calmé.
Il parvient finalement à prendre de grandes inspirations et à souffler de longues expirations. Pendant plusieurs minutes, il reste seul dans la classe.
Quelqu’un frappe à la porte.
Mathieu se lève tant bien que mal, essuie la bave au coin de sa bouche et met la poubelle sur la fenêtre, car une odeur infecte a envahi la salle.
— Entrez ! prononce-t-il d’une voix qu’il espérait assez forte.
La poignée de la porte se baisse et Laura, une surveillante, entre dans la classe. Elle prend soin de la fermer rapidement, mais Mathieu a le temps d’apercevoir les collégiens qu’elle va prendre en permanence.
— Je ne savais pas que tu avais besoin de la salle pour faire une étude, s’empresse de dire Mathieu. La salle côté collège est prise ?
Laura couvrit son nez de sa main.
— Oui… Et comme il n’y avait pas cours dans ta salle, je me suis dit que je pouvais l’emprunter… Mais bon…
Le regard ambré de la jeune femme aux cheveux châtain transpire l’empathie. Elle fait partie de ceux qui sont restés en activité, et qui sont au courant de ce qui lui est arrivé.
— Je vais te laisser, je vais trouver une autre salle, annonça-t-elle.
Elle fit demi-tour, saisit la poignée de la porte. Mathieu reste silencieux. Il ne sait quoi dire. Il est juste reconnaissant de la compréhension de Laura. Son cœur bat encore la chamade et il est brûlant de honte, de priver la surveillante de faire son boulot correctement.
— Tu sais… Moi, je ne crois pas aux rumeurs.
Elle se tourna à nouveau vers lui, les yeux humides et un sourire timide aux lèvres.
— Rien ne dit que c’est vrai, le gouvernement ne l’a pas confirmé… et puis, ils se sont peut-être trompés et ça les a guidés vers une fausse réponse.
Mathieu hoche la tête, la gorge serrée.
Je comprends ce que tu veux faire, mais… ça ne me rassure pas.
— Enfin bon… Je n’ai pas de réponse non plus, mais j’espère en avoir bientôt une.
Le cœur du professeur bondit dans sa poitrine.
Quoi ? Comment ça bientôt une ?
— Laura, tu…
— Oui.
Elle hoche elle aussi la tête, essuyant une larme qui coule le long de sa joue. Laura se retourne et, finalement, sort de la salle.
— Pouah, ça pue là-dedans ! s’exclame un élève.
— Chut. On va ailleurs, le réprimande Laura.
Elle ferme la porte et Mathieu entend à peine les bruits de pas et les plaintes des élèves dans le couloir.
Alors… Laura compte en faire partie ? Le suicide collectif de l’Esplanade des Quinconces… Elle est folle. Que fera-t-elle s’il n’y a rien après ?
L’étonnement laisse place au dégoût.
Elle se permet de dire ça, alors qu’elle connait ma situation. Elle laisse tout derrière elle. Elle abandonne.
Mathieu observe la salle de classe, les bureaux alignés et les chaises en désordre. Son regard se dirige vers l’extérieur.
Julien avait raison. J’aurais dû partir, moi aussi.
Le professeur déglutit.
J’ai pris ma décision. J’arrête tout.
- ***
Pris dans les embouteillages, Mathieu regarde dans le vide. La puanteur des gaz libérés par les voitures à l’arrêt est le moindre de ses problèmes. Il entend à peine les bruits de klaxon indignés des personnes derrière lui.
Il ne ressent rien. Il se sent vide. Froid. Figé. Dur.
La file finit par avancer.
Tout s’est bloqué suite à l’incident du camion, et la route, extrêmement abîmée, est en rénovation.
Mathieu a quitté le lycée, abandonnant le dernier cours qu’il devait donner. Le fait de savoir que les élèves vont s’en réjouir ne lui fait aucun effet.
De toute façon, je ne reviendrai pas.
La voiture derrière Mathieu klaxonne. Effectivement, perdu dans ses pensées, il n’avait pas avancé et un écart significatif commençait à se creuser.
Alors qu’il démarre et passe la première, Mathieu sent son téléphone vibrer. Il relâche doucement l’embrayage, permettant à sa voiture d’avancer et décroche.
— Bonjour monsieur Robert, ici Katy du secrétariat du lycée… Vous avez un retard de…
— Je démissionne.
Mathieu raccroche et lance son portable sur le siège passager. Il met son clignotant et tourne pour prendre la sortie qui le ramène chez lui.
Son téléphone sonne à nouveau. Mathieu soupire. La colère monte en lui. Il freine d’un coup sec, arrêtant sa voiture. Il lève la main et l’abat puissamment sur l’appareil, le saisit, le serre de toutes ses forces. Il décroche avec férocité le nouvel appel.
— J’ai dit : “je démissionne” !! Bordel de…
— Monsieur Robert, je suis le Docteur Duroy.
Mathieu tombe des nues.
Et merde.
— Tout va bien, monsieur ?
— Oui… pardon.
— Ce sont des klaxonnes que j’entends ? Vous voulez que je vous rappelle ?
— Non ! C’est bon, allez-y. C’est au sujet de mon fils ?
Mathieu se déporte sur la droite pour laisser passer les voitures bloquées derrière lui. En passant, l’un des passagers lui fait un doigt d’honneur. Mathieu l’ignore, même s’il a très envie de le poursuivre et de le faire souffrir.
— Oui. Pour le moment, Adrien est hors de danger. Cependant… la voix du docteur devient grave.
Mathieu serre les dents.
— Nous devons le garder en soin intensif sous haute surveillance... j'ai besoin que vous veniez avec votre épouse dès que vous pouvez afin de vous faire part des résultats des examens. Quand pouvez-vous être là ?
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Kiria Parker
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Mary Cerize
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