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Nuit #2

Cet idiot se moquait de moi et de mon inquiétude. J'attrapais une serviette et lui donnais un coup sec sur la hanche. Cela eut pour effet de redoubler son hilarité. Puis, tout d'un coup, il redevint sérieux et se tourna vers moi, un masque d'anxiété sur le visage.


- Pourquoi tu étais dans la forêt tout à l'heure, Lexy ?


Je grimaçais. Je savais que tôt ou tard, il finirait par me poser cette question que j'avais éludée à la sortie des cours. Je déglutis, et lui répondis d'une voix où je tentais d'effacer toute trace de mensonge.


- J'étais partie me promener, je te l'ai déjà dit.

- Sérieusement ? grinça-t-il, pas dupe. Lexy, dis-moi la vérité enfin. Partir se promener dans la forêt après les cours, sans être accompagnée et sans prévenir quelqu'un... Même toi, tu ne fais pas ça. C'est à cause de cette fourrure blanche, c'est ça ? ajouta-t-il.


Je détournais le regard et m'éloignais dans le salon, vaincue. Comment avait-il deviné ? Je ne voulais pas lui expliquer en détail la raison de mon escapade dans la forêt, et je ne comprenais pas pourquoi il voulait tant savoir ce que je faisais là-bas ? Ce n'était pas la première fois que je m'y aventurais seule. Puis, quel mal y avait-il ? Après tout, j'avais entièrement le droit de m'y promener. Rien ne me l'interdisait, surtout que j'étais restée aux abords du lycée. Et je n'étais pas partie longtemps. Je ne répondis pas et restais assise sur le canapé. Il fini pourtant par me rejoindre et relancer le sujet.


- Lexy, je croyais qu'on avait réglé la question, c'était un loup. Je ne comprends pas pourquoi cela t'obsèdes autant.

- Ce n'était pas un loup, répétais-je, agacée. Je te l'aurais dit, sinon. Et je ne vois pas en quoi ce que j'ai fait est répréhensible. Ce n'est pas comme si j'avais frappé quelqu'un.

- Lex...


Soudain, on sonna à la porte, provoquant à la fois le soulagement et l'inquiétude chez moi. Connor se hâta d'aller ouvrir, coupa court à la discussion. J'espérais qu'il n'y reviendrait pas. Je n'avais vraiment aucune envie de donner d'explications à mon frère, mais je ne savais pas mentir convenablement. Il grillerait mon mensonge dès qu'il s'échapperait de ma bouche.

Alors que je m'attendais à voir débarquer dans le salon une douzaine d'inconnus, j'entendis plutôt une voix stridente s'élever de l'entrée :


- Lexy ! Joyeux anniversaire !


Annabelle. J'aurais du me douter qu'elle serait présente ce soir. Je peux raisonnablement la considérer comme une de mes plus proches amies : en fait, c'est sûrement la seule, avec Connor, qui me comprenne un tant soit peu. Je la connais depuis mon enfance, et c'est l'une des rares personnes qui a toujours était la pour moi. Annabelle est aussi la petite amie de Connor. Ils sortent ensemble depuis deux ans maintenant, et ont l'air d'être le couple le plus heureux du monde. Franchement, ça me dégoûte profondément, parfois. Pas parce que je les envie... enfin peut-être un peu. Je jalousais surtout la capacité qu'ils avaient de se comprendre parfaitement sans même avoir à échanger une parole : cette connexion profonde, ce lien étroit qui les unissait. Je désirais vraiment connaître cela également. Connor et Annabelle vont vraiment bien ensemble : ils sont tous les deux grands, blonds, aimés de tout le monde et très intelligents. Aucun doute, ces deux-là s'étaient vraiment bien trouvés.


Après avoir embrassé rapidement Connor en guise de salutation, mon amie à la longue crinière dorée se précipita vers moi, et j'avais à peine eu le temps de me lever du canapé qu'elle me sautait littéralement dans les bras en criant :


- Joyeux anniversaire ma belle !

- Ça va Ana, j'ai compris, riais-je malgré sa forte étreinte et le soudain manque d'air que cela engendrait. T'as pas amené de cadeaux, j'espère, ajoutais-je tandis que je m'éloignais d'elle, sentant un besoin irrépressible de respirer.

- Tu rigoles ? Bien sûr que je t'ai amené quelque chose !


Je n'eus pas le temps de lui répondre que je n'en voulais pas que déjà trois autres personnes avaient fait irruption dans le salon. Il s'agissait de trois garçons, et ceux-ci rigolaient à gorge déployée avec mon frère, comme s'ils ne s'étaient pas vus depuis des siècles. En les observant, je souris de soulagement, presque instinctivement. J'avais eu peur que de parfaits inconnus viennent ce soir, et être obligée de faire la conversation avec des gens qui je n'appréciais pas, a tel point que j'en avais totalement oublié mes vrais amis. Je me sentis honteuse. Je n'en avais pas beaucoup, je n'avais aucun droit des les oublier de la sorte. Connor referma la porte et déclara d'une voix forte, tandis qu'Annabelle prenait place sur le canapé :


- C'est bon, on est complet !

- Salut Lex ! Bon anniversaire ! s'exclama un garçon à la peau noire et aux yeux sombres pétillants, s'avançant vers moi.


Il portait des dreadlocks et il était immense. Un sourire flottait continuellement sur son visage, ce qui avait pour effet de transmettre un bonheur instantané à tous ceux qui l'entourait. Il ne devait sûrement pas ressentir le froid, car il était habillé d'un jean et d'un simple débardeur. Il tenait un papier cadeau à la main. Je voulus grimacer en voyant le paquet, mais je me retins. Je ne sais pas si je l'ai déjà dis, mais je n'aimais les cadeaux d'anniversaire ; je trouvais que c'était une tradition stupide. Quel genre de personne sensée offrait à quelqu'un un cadeau parce qu'il se rapprochait un peu plus du moment de sa mort ? En tentant de ne faire apparaître aucune expression de désarroi sur mon visage, je lui souris en retour :


- Merci, Michael ! Je suis contente de te voir !

- Bon anniversaire Lexy ! rit un rouquin près de moi que je pris dans mes bras.


Il s'agissait d'un de mes plus vieux amis également. Kevan avait un teint constamment maladif, comme s'il était atteint d'un mal irrécupérable. En vérité, il était irlandais, et cela se voyait : il avait leur accent fort, les tâches de rousseurs caractéristiques et des yeux très clairs. Il était lui aussi très, et à l'inverse de Michael, très peu musclé. Cela ne l'empêchait pas d'avoir une grande force physique insoupçonnée. Kevan était dotée d'une très grande gentillesse, et ne se laissait jamais faire. Quelque part, je l'admirais aussi. Il était la preuve que l'on pouvait être une personne très généreuse sans pour autant devenir le bouc émissaire de toute cette société qui perdait peu à peu son humanité.


- Oui, oui, bon anniversaire, bla bla bla. Bon, on commence cet apéro, j'ai faim moi !


Je levais les yeux au ciel. Carter était un incorrigible mangeur. Dénudé de toute forme de politesse, de tout respect d'autrui, il ne pensait qu'à s'empiffrer. Il était loin d'être un gentleman, même s'il en avait l'air avec son corps svelte et musclé, ses cheveux noirs coupés courts et sa barbe parfaitement entretenue. Encore une fois, j'avais la preuve qu'il ne fallait jamais se fier aux apparences. Je me demandais parfois comme nous avions pu finir par devenir ami.

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