Fyctia
9. Samuel - Découvertes 2
« Samuel songe à faire marche arrière, mais l’attitude de l’inspectrice le pousse à poursuivre. »
— Désolé d’être aussi indiscret, poursuit Samuel. Je me demandais juste si tu avais pratiqué la boxe thaïlandaise ?
— Non. Pour le moment, je prends des cours de Jujitsu et j’ai complété une formation avancée en Krav Maga il y a moins de deux ans. Sinon, j’ai essayé le Karaté et le Kendo pendant quelques mois.
Impressionné, Samuel fixe la jeune femme d’un air un peu niais, attirant un regard furibond de cette dernière.
— Quoi, tu penses que c’est impossible pour une femme d’évoluer dans ce genre d’univers ?
— Absolument pas ! se défend Samuel. En fait, je pense à un film que j’ai regardé au moins dix fois. Kill Bill, tu connais ?
À la fois amusée et terrifiée par le parallèle fait par le jeune homme, Rebecca hésite sur le ton à employer. D’un côté, elle ne veut pas en dire trop, mais de l’autre elle est heureuse de voir qu’il n’est pas choqué par son parcours. Choisissant d’y aller avec humour, elle se lance.
— J’aurais voulu écrire ce scénario, mais j’étais trop jeune à l’époque.
Complètement assommé par la répartie d’apparence banale, Samuel s’arrête net et l’observe attentivement. Dans une ancienne vie, cette femme l’aurait séduit à tous les niveaux, autant physiquement qu’intellectuellement. Déjà, il lui aurait proposé un rendez-vous en dehors de cette enquête. Pourtant, aujourd’hui, il s’en sent incapable.
Remarquant l’immobilité de son partenaire, Rebecca s’arrête à son tour. Dans son esprit, ses pensées sont plus embrouillées que jamais suite à son allusion à sa jeunesse. Logiquement, elle devrait craindre cet homme visiblement aux prises avec un problème de contrôle de la colère sachant ce qu’il a fait à son ami. Surtout que l’ami en question est un salopard de première qu’il fréquente depuis plusieurs années. Pourtant, elle se surprend à lui livrer, morceau par morceau, des éléments de sa vie personnelle. Cette réalisation, d’abord agréable, réveille toutefois la peur ancrée dans sa mémoire.
Cette seule fois, tout juste adulte, où elle a accordé sa confiance à un homme et que ce dernier l’a trahie de la pire des façons.
Cette soirée où Rebecca, la jeune femme innocente, est morte.
Voyant le visage déconfit de l’inspectrice, Samuel est pris d’une soudaine bouffée d’angoisse. Sa curiosité déplacée vient-elle de la pousser à fuir sa présence ? Ou, au contraire, s’attend-elle à plus de sa part et elle le trouve inintéressant par son incapacité à prendre les devants ?
Comme toujours quand il est question d’une relation avec une femme, Samuel se sent partir en vrille, perdu dans la multitude de suppositions qui se succèdent dans son esprit.
Figés dans les escaliers devant les mener à l’extérieur, les deux jeunes gens sont chacun pris dans leurs pensées sombres et ils se fixent sans se voir. La situation s’étire ainsi pendant plusieurs secondes avant que Rebecca sorte brusquement de sa transe.
— Je sais que cela n’a pas de sens, mais je voudrais t’expliquer pourquoi je crains tant les hommes.
— Pourquoi ?
— Pour m’aider à te faire confiance.
— Je ne vois pas en quoi me raconter ton histoire va t’aider, mais je suis prêt à t’écouter.
— Évidemment, cette conversation devra rester entre nous. Rares sont les personnes de mon entourage qui connaissent la vérité à mon sujet.
— Je ne suis pas du genre à raconter les secrets, donc ne t’inquiète pas pour ça.
Après une grande respiration, Rebecca écoute attentivement pour s’assurer qu’aucun pas ne résonne dans la cage d’escaliers.
— Lorsque j’ai eu dix-huit ans, commence-t-elle avec émotion, mes amis ont organisé une fête où l’alcool a coulé à flot. De mon côté, désireuse de vivre mon anniversaire à fond, je n’ai pris qu’un seul verre, vers la fin de la soirée. C’est mon copain qui me l’a remis. Je le fréquentais depuis environ huit mois et l’adolescente romantique que j’étais à l’époque s’imaginait déjà le mariage. Ce que je ne savais pas, c’est qu'il avait mis du GHB dans ma boisson suite à un défi ridicule proposé par ses copains. Quand je me suis réveillée, droguée, il m’a tout avoué, mais je n’étais plus seule avec lui. Ses amis étaient complètement saouls et ils l’ont battu devant moi en riant. Puis ils ont jeté leur dévolu sur moi. J’ai repris conscience trois jours plus tard à l’hôpital. Un passant avait retrouvé mon corps et celui de mon copain dans un fossé à plusieurs dizaines de kilomètres du lieu de la fête. Pour couronner le tout, mes parents m’ont reniée, disant que tout était de ma faute et que j’aurais la mort de mon amoureux sur la conscience pour le restant de ma vie.
À présent tremblante de tous ses membres, Rebecca s’appuie sur la rampe pour ne pas tomber, les yeux fermés, incapable de regarder l’homme à qui elle vient pourtant de raconter sa triste histoire. Elle sent les larmes qui coulent le long de ses joues, mais elle n’a même pas la force de les essuyer tellement les images dans son esprit la tourmentent.
Quelques marches plus bas, Samuel est totalement bouche bée. Son instinct protecteur lui hurle de serrer la jeune femme dans ses bras pour la rassurer, mais deux choses l’en empêche. D’abord, cette éternelle impression de trahir la mémoire de Sarah, mais surtout cette fois l’idée qu’un contact masculin en ce moment ne saurait la rassurer.
— Je suis sincèrement désolé que tu aies eu à subir une telle horreur. Si je peux faire quoique ce soit pour t’aider, demande-le-moi.
Absorbée par un tourbillon de noirceur, Rebecca observe Samuel d’un regard vide. Le fait qu’il tremble presqu’autant qu’elle la rassure, mais il reste un homme imposant et potentiellement dangereux. Tiraillée entre l’envie de lui faire confiance et sa conscience blessée qui lui dit de fuir, elle reste immobile à réfléchir un moment.
— Aide-moi à coincer cette brute et ses complices, finit-elle par répondre.
— Je comprends maintenant pourquoi cet appel anonyme de détresse t’a autant touchée. Je ne sais pas si tu trouveras ici ou au gymnase quelque chose pour incriminer Bruno, mais je ferai tout ce que je peux pour t’aider. Je traque les crétins dans son genre depuis un moment moi-aussi, histoire d’éviter à d’autres ce qui a détruit ma vie.
— Tu as clairement souffert toi-aussi. Tu m’as parlé avoir perdu ton amoureuse, mais cela n’explique pas toute cette rage qui t’anime, je me trompe ?
— Elle n’est pas seulement partie, elle s’est faite assassiner suite à un rendez-vous anonyme sur un site de rencontre. Je ne sais pas si tu connais ces plateformes, mais tu dois savoir que des monstres agissent dans l’invisibilité de ce bouclier numérique qui n’a pas lieu d’être. À l’époque, je ne savais rien de cet univers, mais aujourd’hui je peux te jurer que je fais tout pour percer leurs défenses et les exposer à la justice.
Jetant à nouveau un regard à sa montre, Samuel constate que l’heure de son entraînement est passée. Profitant de la discussion sur le sujet, il change brusquement ses plans.
À suivre...
21 commentaires
Alma Rose
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Il y a un an
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Il y a un an
imaginary21
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Il y a un an
Stephanie L.Moon
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Jill Cara
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cedemro
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Jill Cara
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Il y a un an
Jill Cara
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Il y a un an
afterwardsss
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Il y a un an