Fyctia
Décision à prendre P5
Lorsque Marjo rentre chez elle et retrouve Jenna, il est presque vingt-heures trente. La brune lance son sac dans un coin puis se laisse tomber sur le canapé-lit.
— Je suis morte…
— Tu veux que je nous fasse un thé ou un café ? propose Jenna en se levant.
— Une vodka plutôt… j’ai une bouteille dans le frigo et il y a du jus de cerise.
Pendant que Marjo s’allume une cigarette, Jenna leur prépare un verre. Une fois servie, Marjo pousse un gros soupir.
— Je suis dégoûtée, ça fait deux jours que tu es là et on n’a même pas pu passer une vraie soirée ensemble. Et en plus demain je dois y être à huit heures du mat’… Tu crois que tu pourrais rester un peu plus longtemps ? Comme demain c’est vendredi, on pourrait se faire un resto et prendre le temps de se poser…
Le ton de Marjo est presque suppliant et Jenna attrape son téléphone.
— OK, je préviens Phil que je reviendrai samedi en fin de matinée.
— Merci. Je vais faire un truc à bouffer pendant que tu l’appelles. Des pâtes ça t’ira ?
— Oui, oui, ne te casse pas la tête pour moi.
Philippe répond au bout de deux sonneries.
— Alors ? Tu es prise ?
— Bonjour à toi aussi. Je n’ai pas encore la réponse, je le saurai demain. En fait, si je te téléphone c’est pour te dire que Marjo aimerait bien que je reste un jour de plus pour passer la soirée avec elle.
— Pfffff… et donc tu rentrerais quand ?
— Samedi en fin de matinée.
— Le truc, c’est que, comme je vais rentrer de Dunkerque vers vingt-heures, Yannick nous a invités à manger et que j’ai dit oui… Il y aura Pascal aussi.
— Oh bah, tu n’auras qu’à y aller sans moi. Je n’en mourrai pas si je loupe une soirée couscous à la Yannick, rétorque Jenna.
— Comment tu sais qu’il a prévu du couscous ?
— Bah à part les sardines au barbecue et la salade de gésiers, c’est le seul truc qu’il sait faire.
Et encore…
— Pffff, soupire à nouveau Phil. De toute façon, si je te dis non, tu feras la gueule toute la soirée donc bah reste avec ta copine.
Euh… mais d’où j’ai besoin de ta permission ? Phil reprend sans lui laisser le temps de réagir.
— Par contre, là je vais devoir te laisser, j’ai prévu d’aller boire un coup avec les mecs de ma formation.
— OK, amuse-toi bien.
— Appelle moi demain pour me dire pour la fac.
Après cela, Marjo et Jenna passent la soirée à bavarder de Kristian et de Chouchou avant de se coucher vers minuit.
***
Marjo et Jenna se lèvent toutes les deux aux aurores le vendredi. Jenna file d’abord à Paris 5 où une déception l’attend. Son nom n’est sur aucune liste, que ce soit la principale ou la complémentaire. Putain, je le sens de plus en plus mal, stresse-t-elle. Elle prend au passage une des brochures sur les différentes maîtrises proposées et passe vite fait au bureau des inscriptions afin de se renseigner sur les tarifs et les places disponibles.
— Il nous reste quelques places en psychologie sociale et en neuropsychologie, la renseigne-t-on.
Entre la peste et le choléra, le choix est cornélien… songe Jenna, de plus en plus découragée. Je la sens de plus en plus mal barrée cette histoire !
***
Jenna fait le trajet menant à la dernière faculté où elle a postulé dans les affres de l’angoisse. Plongée dans de sombres pensées, elle manque de louper sa station et sort juste à temps du métro. Le cœur battant, elle s’approche des listes. Une boule se forme dans sa gorge. Et voilà… c’est foutu, songe-t-elle alors que ses inquiétudes se concrétisent.
Encore sous le choc de ce nouvel échec pourtant prévisible, elle se dirige vers les bureaux d’inscription du pas traînant de la perdante afin de se renseigner sur les places disponibles en maîtrise.
— Oui, il nous reste de la place en psychologie du développement, confirme le chargé des inscriptions. En revanche, il faut vous décider rapidement, l’année commence dans dix jours.
— Je sais… soupire Jenna. Vous fermez à quelle heure aujourd’hui ?
— Seize heures.
Après l’avoir remercié et pris les tarifs d’inscription, Jenna retourne chez Marjo. Elle a besoin de faire le point et de réfléchir. Elle a peu de temps pour prendre sa décision et ne peut pas s’offrir le luxe de se tromper.
***
Une fois rentrée chez Marjo, Jenna se fait un thé et s’allume une cigarette, l’esprit en ébullition. La déception est d’importance… Certes, elle le pressentait mais une partie d’elle espérait qu’elle se montre une fois de plus trop pessimiste. Après avoir fixé le vide pendant une bonne demi-heure, Jenna passe à l’action. Son premier réflexe est de téléphoner au CROUS. À mesure que l’assistant social répond à ses questions, son cœur se fait plus lourd.
— Très bien, c’est clair, merci et bonne journée, conclut-elle la conversation.
Son second appel est pour monsieur Dahu.
— En ce moment c’est plutôt calme mais j’aurai absolument besoin de quelqu’un pour seconder Christine dans deux semaines, explique-t-il. Donc si vous voulez le poste, il faut me donner réponse lundi afin que j’aie le temps de chercher quelqu’un d’autre si vous n’êtes pas intéressée.
— Bien sûr, je comprends, assure Jenna. Quoi qu’il arrive, je vous appelle lundi matin.
OK… souffle Jenna en reposant son téléphone sur la table. Voilà la situation… Option un : Je m’inscris en maîtrise à Paris 13, sachant que je vais devoir trouver un logement et un travail. Plus-value du plan : Kristian et une seconde spécialisation. Risques : galère financière et beaucoup de travail en maîtrise… donc un emploi du temps de dingue pour payer mon loyer et le reste. Mais … il y a Kristian. Option deux : je m’inscris en DU alcoolisme à la fac de médecine pour garder mon statut d’étudiante et mon appart’. Je signe avec le centre et je m’assure un boulot. Plus-value : pas de galère et du concret assuré. En plus, il n’y a que deux heures de cours par semaine pour DU. Inconvénients : … pas de Kristian. D’un autre côté, si je déménage ici et que Kris part à Bab El Oued dans deux mois, j’aurais tout perdu et je me serai mise dans la merde toute seule. Après, c’est vrai que les opportunités d’emploi sont plus importantes dans une grande ville donc je trouverai certainement quelque chose…
Dans un silence total, Jenna passe un long moment à retourner le problème dans sa tête, en oubliant de déjeuner — de toute manière elle a l’appétit coupé. L’option une est la plus risquée mais c’est aussi celle que plébiscitent les papillons qui rêvent des fameux après-midis câlins… L’option deux est le choix de la prudence mais elle a une grosse boule dans la gorge à la perspective de sacrifier Kristian sur l’autel de la sécurité. Elle ne demande l’avis de personne, ne voulant pas être influencée dans un sens ou dans l’autre. Ce choix est déterminant pour son avenir et elle considère que c’est à elle et à personne d’autre qu’il revient. Et puis au moins, si je me plante, je n’aurai qu’à m’en prendre qu’à moi-même.
Le temps s’écoule… Lorsque quinze heures sonnent, Jenna ramasse son sac et sa veste puis sort de l’appartement de Marjo. Sa décision est prise.
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Wizzette
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Il y a 7 mois
Jess Swann
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Il y a 7 mois
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Jess Swann
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Il y a 7 mois
La Plume d'Ellen
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Il y a 8 mois
Jess Swann
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Il y a 8 mois