Fyctia

Une fois servis par Bruno, Paul et Jenna trinquent puis :

— Alors ? Tu penses quoi de Magali ? la presse-t-il.

Surprise et un peu flattée qu’il lui demande son avis, Jenna sourit.

— Honnêtement ? Je la trouve super sympa et très simple et abordable. Je t’avoue qu’avec tout ce que tu nous as dit sur elle, je m’imaginais une pimbêche mais c’est tout le contraire.

— Tu l’aimes bien, alors ?

— Du peu que j’ai vu, oui. Mais l’important ce n’est pas qu’on l’apprécie ou non, précise Jenna. C’est ce que, toi, tu ressens.

Paul a lui aussi des étoiles dans les yeux lorsqu’il jette un regard en coin à Magali.

— Je suis fou d’elle. Mais j’ai peur qu’elle finisse par penser que je ne suis pas assez bien pour elle. Tu comprends, elle fait des études de droit alors que je suis qu’un barbouilleur qui ne finira jamais son DEUG d’art plastique… Et puis ses parents sont blindés alors que ma mère…

Jenna soupire.

— Ne focalise pas là-dessus. Si elle est vraiment amoureuse de toi, ça n’aura aucune importance pour elle.

— Tu crois qu’elle l’est ?

— Je ne la connais pas assez pour en juger mais du peu que j’ai vu, elle en présente tous les signes, assure sincèrement Jenna.

Magali arrive à cet instant. Passant ses bras autour de la taille de Paul, elle demande d’un ton incertain :

— Je vous gêne ?

— Du tout, s’amuse Jenna en ramassant son verre. Je vous laisse, les amoureux !

La soirée arrive à son terme. Après un gros smack à une Juliette dépitée, Houdini annonce qu’il doit rentrer.

Tandis que le petit groupe se dirige vers la voiture de Magali qui a offert de déposer Diana, Jenna, Marjo et bien sûr Paul — Adélaïde ayant pris sa voiture et Juliette vivant en centre-ville — Marjo reçoit un texto d’Houdini.

— Chère Marjolaine, depuis que je t’ai rencontrée, je ne cesse de penser à tes lèvres rouge cerise— bien sûr— et je brûle de désir d’y goûter. Accepterais-tu un rendez-vous en toute intimité ? lit-elle avec satisfaction sans remarquer que Juliette se trouve derrière elle.

Oups…Dommage pour toi, rit Jenna devant la déconfiture que Juliette peine à dissimuler.

— OK, j’ai compris, assure Juliette d’un ton blessé. Je me rentre, bonne nuit.

Marjo ne fait pas un geste pour la retenir et hausse les épaules.

— Je n’y peux rien s’ils craquent tous pour moi ! déclare-t-elle avec philosophie.

***

— Alors, ton concours s’est bien passé ? demande Jenna à Philippe lorsqu’il la récupère à la gare le vendredi soir.

— Difficile d’être sûr, mais je suis plutôt confiant.

— Super !

Jenna toussote puis aborde le sujet qui la taraude depuis l’appel de Kristian.

— Sinon, c’est quand déjà tes vacances ?

Philippe lui confirme malheureusement les dates et elle tente :

— Oh ? Ce ne serait pas mieux la semaine d’après ?

— Pourquoi ? Tu as quelque chose de prévu ? rétorque Philippe d’un ton peu amène tout en se garant devant chez ses parents.

Trop risqué d’insister, réalise Jenna, frustrée.

Elle passe sa soirée à ronger son frein et grince des dents lorsque vient le moment d’assurer son « devoir conjugal ». Elle n’éprouve plus de désir pour Phil et elle peine à faire semblant. Ce dernier ne semble pas se rendre compte de son manque d’allant et ne cesse de rechercher le contact physique. Refoulant sa répulsion de plus en plus prononcée, Jenna s’abandonne passivement à ses caresses et s’évade par la pensée tandis qu’il s’introduit en elle.

***

En raison de l’état d’esprit de Jenna, la pendaison de crémaillère de Georges et Candice le samedi soir tombe à pic. Passive, elle participe peu à la soirée, attendant patiemment que les premiers invités rentrent se coucher, attendu qu’ils ont tous réservé dans le même hôtel.

Lorsque Luc et sa copine prennent congé vers une heure du matin, Jenna suit le mouvement sans prendre la peine de s’excuser auprès de Pascal qui lui a parlé toute la soirée.

— Tu rentres déjà ?! s’étonne un Philippe bien éméché.

Bah oui, ça fait des heures que tu ne me calcules pas, Pascal me gonfle avec ses histoires de boulot et je meurs d’ennui même si Candice essaie d’élever le débat.

— Je suis claquée, prétend Jenna. Ne t’en fais pas pour moi, profite de ta soirée.

Une fois dans sa chambre d’hôtel, Jen se débarbouille puis plonge la main dans sac pour en sortir son roman en cours de relecture.

— Alors mon petit Gage qui c’est qui va passer sous un gros camion dans deux chapitres ? se réjouit-elle tout en se calant contre l’oreiller.

***

Lorsque Philippe et Benoît rentrent à sept heures du matin, ils sont complètement saouls et réveillent tout l’hôtel. Gloussant, Philippe allume la lumière de la chambre dont il claque la porte avant de s’écrouler sur le lit en titubant.

— Oh putain, c’était une trop bonne soirée ! lâche-t-il.

Tu m’en diras tant ! Sinon, ça aurait été trop demander de ne pas être réveillée en sursaut ?

***

Philippe grogne lorsque Jenna, habillée et prête depuis quelques heures le secoue.

— Il est midi trente et on doit rendre la chambre avant treize heures, rappelle-t-elle à Phil.

— Raaa oui, fais chier. Passe-moi un Efferalgan, j’ai mal au crâne.

— S’il te plaît, merci, ironise Jenna tout en lui préparant le médicament demandé.

Philippe plus ou moins d’aplomb, ils retrouvent Benoît et Isabel à la réception de l’hôtel.

— Les autres sont déjà tous partis, déplore Benoît.

Les quatre amis vont déjeuner au Mc Do, durant le repas Phil et Ben racontent à leurs copines ce qu’elles ont loupé en rentrant se coucher plus tôt.

— Pascal était complètement pété, il s’est endormi la gueule dans les cactus, rit Phil. Mike a quasiment du le porter pour le mettre dans la voiture.

— Par contre Candice, elle n’a pas été cool, déplore Ben. Elle nous a carrément mis dehors alors qu’on voulait reboire un coup avec Georges !

— Elle était peut-être fatiguée à sept heures du mat, lui fait observer Isabel.

— Raa bah on pend sa crémaillère ou on ne la pend pas, professe Phil. Personne ne l’a empêchée d’aller se coucher.