Fyctia
Chapitre 16 - 2/2 - Loup
Assis sur le tabouret, face au chevalet, baigné dans la lumière tamisée d’une pièce de mon appartement que j’ai transformé en atelier, je déverse toute ma colère sur le papier. Mes coups de crayons sont tantôt vifs, tantôt lourds, tantôt hésitants puis plus rapides, effrénés et fulgurants. Je fais des grands gestes, je soupire puis souffle de frustration. J’attrape la feuille, la déchire puis la jette plus loin au sol.
Un nœud me serre l’estomac, je pense à Constance. Elle a toujours souffert de sa maladie. Les douleurs musculaires, la fatigue chronique, la chute brutale de sa vision, les sensations de brûlure sur toute sa peau comme si des coups de couteaux lacèreraient son corps. Notre niveau de vie nous a permis de lui offrir des soins personnalisés et adaptés à son cas ce qui a permis de faire drastiquement baisser le nombre de poussée inflammatoire. Malgré tout, son état demeure fragile et demande un traitement et une vigilance constante.
Comment mes parents osent-ils me faire culpabiliser alors que je suis prêt à tout pour aider ma petite sœur à aller mieux ?
Je ferme les yeux durant quelques secondes et laisse les notes de piano flottant dans l’atmosphère, m’emporter loin dans mes pensées. J’ouvre mes paupières puis me laisse porter par la mélodie douce et mélancolique sans tenter de réfléchir. Je débute un nouveau croquis et commence à tracer des lignes. Des contours qui me semblent familiers. Les courbes de son visage, l’ombre de ses yeux, la douceur arrondie de sa bouche. Je me lève et m’éloigne un instant de mon dessin.
– Combien de temps vais-je encore garder ton visage en tête sans devenir fou ? murmuré-je pour moi-même.
Comment oublier Mira alors que chaque ligne de mes dessins me ramène à elle. Trois mois que j’attends un message, un appel, un signe de sa part. Trois mois de silence. Trois mois que j’ai perdu espoir et que je tente de la chasser de mon esprit mais que mes doigts semblent être d’un autre avis. Je sais que je dois l’oublier, il le faut. Elle a pris sa décision et je la respecte. Même si mes doigts brûlent de la dessiner… de la toucher.
Je secoue ma tête pour reprendre mes esprits. Je saisis un carnet puis me rassois sur le tabouret. Ce carnet qui était vide et dont elle a esquissé la première phrase. À laquelle, j’ai ajouté des vers. Auxquels j’ajoute depuis des mois, mes pensées les plus intimes. Celles que je n’arrive pas toujours à exprimer à voix haute. Celles qui demeurent secrètes, gravées à jamais dans le papier. J’attrape un stylo puis les mots coulent comme une rivière traçant son chemin au milieu d’une forêt, j’y dépose les fragments de mon cœur et de mes douleurs.
Tu es là.
Partout et nulle part.
Comme un souffle qui m’éteint et me rallume.
Comme l’écho…
De la mélodie de mon cœur.
Je relis silencieusement chaque mot. Chaque vers qu’elle ne lira probablement jamais et c’est peut-être mieux ainsi. J’ai certainement rêvé cette connexion entre nous et il est temps que je redescende sur terre. Je relève la tête vers le portrait de Mira posé sur le chevalet, mes doigts glissent doucement sur les bords du papier comme si à travers mes dessins et mes mots, je pouvais encore la toucher et la sentir une dernière fois.
Je soupire puis ferme le carnet qui était encore dans ma main et le balance brutalement sur mon bureau. Je me lève puis me dirige vers la fenêtre. Les gouttes de pluie glissent le long de la vitre, le vent violent fait virevolter les feuilles aux teintes ocres et rouges dans une danse survoltée et le ciel noir dépourvu d’étoiles reflète définitivement mes états d’âmes.
– Il est peut-être temps de rallumer les étoiles…
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Le Mas de Gaïa
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Il y a 2 mois
Lys Bruma
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Assmag
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MONTENOT Florence
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MONTENOT Florence
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Stephanie L.Moon
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Lys Bruma
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